Ce qu’il faut savoir sur l’interdiction du territoire français

Le 28/02/11

La déclaration de culpabilité par les juridictions répressives donne lieu au prononcé d’une sanction pénale à l’encontre de l’auteur de l’infraction réprimée.

Selon la gravité des faits et la qualité du condamné, la peine peut prendre diverses formes telles qu’une mesure privative de liberté, une amende, un travail d’intérêt général ou le retrait d’un droit.

Au terme de l’article 132-24 du Code Pénal, le droit français applique le principe de la personnalisation des peines.

C’est ainsi qu’une personne de nationalité étrangère peut être condamnée à une interdiction du territoire français pour une durée de 10 ans maximum ou définitivement à défaut de relèvement de sa peine.

Pour mieux comprendre l’application des dispositions conjuguées du Code Pénal et du Code de l’Entrée et du Séjour des étrangers et du droit d’asile un petit bilan s’impose.

Quelle est la nature de l’interdiction du territoire français ?

L’interdiction du territoire a une double nature conférée tant par son origine que par ses effets : c’est à la fois une condamnation pénale et une mesure d’éloignement.

En premier lieu, il s’agit d’une décision de justice prononcée à l’issue d’un procès pénal en répression d’une infraction.

Elle sanctionne à titre principal l’auteur des délits se rapportant au droit des étrangers : entrée et séjour irréguliers, aide à l’entrée et au séjour irrégulier d’un étranger, mariage ou reconnaissance d’enfant de complaisance, soustraction à une mesure d’éloignement, infractions à la législation sur le travail et sur l’hébergement collectif.

Mais les juridictions répressives peuvent également assortir leur condamnation d’une interdiction du territoire à titre de peine complémentaire.

Tel est le cas pour les crimes contre l’humanité, meurtres, assassinats, viols, proxénétisme, trafics de stupéfiants, vols aggravés, extorsion, recel, crimes contre la nation…

Dans tous les cas, cette interdiction de territoire ne peut être prononcée sans que le prévenu ait pu faire valoir ses observations.

Cass. Crim. 11 juin 2008 Pourvoi 07-83024

En second lieu, l’interdiction du territoire français constitue une mesure d’éloignement au même titre que l’arrêté de reconduite à la frontière, l’obligation de quitter le territoire ou l’expulsion.

En exécution de cette peine, l’étranger condamné doit être éloigné de France, le cas échéant après exécution d’une peine d’emprisonnement, sans pouvoir revenir avant l’expiration du délai imparti.

Qui est protégé contre l’interdiction du territoire français ?

Cette sanction ne peut être prononcée à l’égard de certains étrangers qui bénéficient d’un régime de protection.

Cette protection est dite relative à l’égard de :

* l’étranger, ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d’un enfant français mineur résidant en France, à condition qu’il contribue effectivement à l’entretien et à l’éducation de l’enfant depuis sa naissance ou depuis au moins 1 an,

* l’étranger marié depuis au moins 3 ans avec un conjoint de nationalité française, à condition que la communauté de vie entre les époux n’ait pas cessé depuis le mariage et que le conjoint ait conservé la nationalité française,

* l’étranger qui réside régulièrement (sous couvert d’un titre de séjour) depuis plus de 10 ans en France, sauf s’il a été pendant toute cette période titulaire d’un titre de séjour « étudiant »,

* l’étranger titulaire d’une rente d’accident du travail ou de maladie professionnelle servie par un organisme français et dont le taux d’incapacité permanente est égal ou supérieur à 20 %,

* l’étranger résidant habituellement en France depuis plus de 15 ans, sauf étudiant.

A titre d’exception, les étrangers concernés par ces situations ne pourront être éloignés que par décision spécialement motivée au regard de la gravité de l’infraction et de la situation personnelle et familiale de l’étranger.

Cette protection est dite quasi- absolue à l’égard de :

* l’étranger qui justifie résider habituellement en France depuis qu’il a atteint au plus l’âge de 13 ans,

* l’étranger résidant régulièrement (sous couvert d’un titre de séjour) depuis plus de 20 ans en France,

* l’étranger résidant habituellement en France et dont l’état de santé nécessite une prise en charge médicale indispensable qui ne peut être assurée dans le pays de renvoi,

* l’étranger résidant régulièrement en France depuis plus de 10 ans et qui, ne vivant pas en état de polygamie, est marié depuis au moins 4 ans avec un ressortissant français qui a conservé la nationalité française ou avec un ressortissant étranger qui vit en France depuis qu’il a atteint au plus l’âge de 13 ans, à condition que la communauté de vie n’ait pas cessé depuis le mariage,

* l’étranger résidant régulièrement en France depuis plus de 10 ans, et qui, ne vivant pas en état de polygamie, est père ou mère d’un enfant français mineur résidant en France, à condition qu’il contribue effectivement à l’entretien et à l’éducation de l’enfant depuis sa naissance ou depuis au moins 1 an.

Cependant, cette protection doit être écartée dans des cas graves de nature à porter atteinte aux intérêts fondamentaux de l’Etat ou liés à des activités terroristes…

La Cour de Cassation rappelle encore qu’en application de l’article 131-32 du Code pénal, aucune interdiction de séjour ne peut être prononcée pour un condamné âgé de plus de 65 ans.

Cass. Crim. 9 septembre 2008 Pourvoi 08-81336

A préciser enfin qu’en aucun cas, une interdiction du territoire français ne peut être prise à l’encontre d’un mineur.

Comment contester l’interdiction du territoire français ?

Avant tout chose, il convient de relever que la Cour de Cassation a précisé que la peine complémentaire d’interdiction définitive du territoire français n’est pas prescriptible s’agissant d’une peine privative de droit.

Dès lors que cette peine n’exige aucun acte d’exécution.

Cass. Crim. 7 janvier 2009 Pourvoi 08-82892

Pour autant comme toutes décisions de justice, cette condamnation peut être contestée par la voie de l’appel ou, le cas échéant, de l’opposition.

Si les juridictions répressives confirment la sanction ou l’aggravent, il sera alors possible de présenter une demande de relèvement.

Mais ce recours n’est ouvert que lorsque l’interdiction du territoire français est prononcée à titre de peine complémentaire.

Sauf exception, le ressortissant étranger doit résider hors de France lors du dépôt de cette requête qui ne pourra intervenir qu’à l’expiration d’un délai de 6 mois suivant la décision de condamnation.

Cependant, la Cour de Cassation a ouvert une brèche en relevant que la violation de l’article 8 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme constitue une exception à la règle de la présence à l’étranger en application du droit au recours effectif devant une instance nationale.

Encore faut-il qu’un grief sérieux résultant d’une atteinte au droit au respect de la vie privée et familiale soit démontré.

Cass. Crim. 13 juin 2007 Pourvoi 06-86065

L’injonction de payer, recouvrement simplifié de créance

Le 21/02/11 (mis à jour le 22/02/11)

Au terme de ses articles 1405 et suivants , le Code de Procédure Civile institue une procédure simple et peu coûteuse permettant aux particuliers ainsi qu’aux professionnels de recouvrir les sommes qui leur sont dues.

Ce recours au juge conciliant rapidité et efficacité qui est présenté dans le présent billet, est appelé injonction de payer.

Cas d’ouverture de l’injonction de payer :

Les dispositions du Code de Procédure Civile énumèrent limitativement les cas d’ouverture de cette procédure.

– Le premier cas concerne l’existence d’une créance née d’un contrat ou résultant d’une obligation de caractère statutaire telle que les cotisations sociales. La législation impose que le montant de la somme à recouvrir soit déterminé.

Il faut préciser que le créancier pourra également dans ce cadre solliciter le règlement d’une clause pénale sous réserve de réduction par le juge du montant fixé au contrat.

 – Le second cas s’applique à la créance dite cambiaire qui ressort d’une lettre de change, d’un billet à ordre ou d’une cession Dailly conformément à la loi n° 81-1 du 2 janvier 1981 facilitant le crédit aux entreprises.

En dehors de ces cas, l’injonction de payer peut également être sollicitée dans des circonstances plus inattendues.

Ainsi le recouvrement des dommages et intérêts alloués lors d’une mesure de composition pénale ouvre droit à cette procédure comme le précise l’article 41-2 du Code de Procédure Pénale :

« La victime a également la possibilité, au vu de l’ordonnance de validation, lorsque l’auteur des faits s’est engagé à lui verser des dommages et intérêts, d’en demander le recouvrement suivant la procédure d’injonction de payer, conformément aux règles prévues par le code de procédure civile ».

Procédure de saisine simplifiée :

Le créancier saisit le juge de sa demande par requête datée, signée et accompagnée des pièces justificatives.

Dans un souci de simplification, des formulaires CERFA portant mentions des conditions de forme et de fond prescrites ont été édités à destination des justiciables.

Ladite requête sera déposée au greffe de la juridiction du domicile du débiteur dont la compétence diffère selon le montant et la nature de la créance :

– en matière civile :

Il appartient à la juridiction de proximité de se prononcer si le montant ne dépasse pas 4 000 euros, à l’exception des domaines particuliers de la compétence du Tribunal d’Instance.

Si le montant de la créance est supérieur à 4 000 euros ou si celle-ci est relative à un contrat de crédit à la consommation, un contrat de louage d’immeubles ou portant sur l’occupation d’un immeuble, c’est le Tribunal d’Instance qui sera compétent.

– en matière commerciale, seul le Président du Tribunal de Commerce pourra être saisi.

Il faut noter que le créancier peut demander dans sa requête qu’une partie des frais de recouvrement expressément déterminés, soit mise à la charge du débiteur au titre de l’indemnité de l’article 700 du Code de Procédure Civile.

Ordonnance portant injonction de payer :

L’impératif de célérité qui préside à la procédure d’injonction de payer, impose au juge de procéder au contrôle de la recevabilité et du bien-fondé de la requête avant de rendre son ordonnance.

Cette ordonnance portant injonction de payer devra être signifiée par huissier dans un délai de 6 mois aux fins d’information du débiteur : à défaut, elle sera réputée non avenue.

Jusqu’à la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, cette formalité était d’autant plus importante qu’elle influait sur le droit d’ester en justice.

En effet, la Cour de cassation jugeait, sur le fondement de l’ancien article 2244 du Code Civil, que la requête en injonction de payer n’avait pas d’effet interruptif de la prescription : seule la signification de l’ordonnance d’injonction produisait un tel effet.

Cass Civ. 1ère 10 juillet 1990 Pourvoi 89-13345

Cass Civ. 2eme 11 décembre 2008 Pourvoi 07-16260

L’adoption du nouvel article 2241 du Code Civil semble changer la donne puisque le texte n’exige plus une citation en justice ou un acte signifié pour s’empêcher de prescrire.

Une demande en justice est désormais suffisante.

Cette discussion interpelle sur la nature et l’effet de l’ordonnance portant injonction de payer qui varie selon les suites de l’affaire.

Exécution de l’ordonnance ou opposition :

Le principe du contradictoire qui s’impose en procédure civile, fait naître un droit d’opposition permettant au débiteur de contester l’ordonnance portant injonction de payer.

Ce dernier dispose ainsi d’un délai d’un mois à compter de la signification pour saisir le Tribunal ayant statué par déclaration au greffe ou courrier recommandé AR auquel seront jointes la copie de l’ordonnance et toutes les pièces utiles au recours.

Lorsque l’ordonnance portant injonction de payer est rendue, le créancier peut donc se retrouver dans deux situations :

– Dans la première hypothèse, le débiteur ne forme pas opposition dans le délai imparti.

Le créancier saisira donc de nouveau le juge afin qu’il appose la formule exécutoire sur l’ordonnance.

Ce n’est que lorsqu’elle sera revêtue de cette formule que ladite ordonnance produira tous les effets d’un jugement contradictoire ayant autorité de chose jugée.

Dans un arrêt du 13 septembre 2007, la Cour de Cassation a rappelé qu’une ordonnance portant injonction de payer n’est une décision de justice qu’en l’absence d’opposition dans le mois de sa signification.

Si elle n’est pas signifiée, son exécution est impossible.

Cass. Civ. 2eme 13 septembre 2007 Pourvoi 06-14730

– Dans la seconde hypothèse, le débiteur saisit le Tribunal de son opposition qui ouvre alors une instance contentieuse.

Le juge entendra les arguments de chacune des parties avant de statuer sur la créance et son exigibilité.

A l’issue des débats, le jugement rendu sur opposition se substituera à l’ordonnance d’injonction de payer qu’il anéantit.

Cass Civ. 1ère 25 juin 2009 Pourvoi 08-18363

On l’aura compris la procédure singulière d’injonction de payer est très efficace pour peu que le débiteur ne forme pas opposition.

Ce dernier ne pourra alors exercer aucune voie de recours à l’exception du pourvoi en cassation limité à la contestation des conditions d’apposition sur l’ordonnance de la formule exécutoire.

Cass. Civ. 2eme 3 avril 2003 Pourvoi 00-19905

L’opposition à chèque : conditions et sanctions

Le 31/01/11

Le chèque est un moyen de paiement par lequel l’émetteur (le tireur) donne l’ordre à un établissement bancaire (le tiré) de verser une somme déterminée au profit d’un bénéficiaire (le porteur).

Si l’utilisation de ce titre a considérablement baissé en dix ans au bénéfice des règlements par cartes bancaires, elle représentait encore plus de 20 % des opérations en 2008.

Le décret-loi du 30 octobre 1935 a permis d’encadrer le paiement par chèque et en a précisé l’usage ainsi que les cas d’opposition.

 

Mais il faudra attendre la Loi n°2005-845 du 26 juillet 2005 pour que cette législation soit codifiée dans le Code Monétaire et Financier.

Depuis lors l’article L. 131-35 dudit code dispose :

« Il n’est admis d’opposition au paiement par chèque qu’en cas de perte, de vol ou d’utilisation frauduleuse du chèque, «de sauvegarde,» de redressement ou de liquidation judiciaires du porteur. Le tireur doit immédiatement confirmer son opposition par écrit, quel que soit le support de cet écrit ».

 

C’est ainsi que les cas d’opposition sont limitativement énumérés et admis dans le respect du principe de l’irrévocabilité de la provision qui interdit au tireur de refuser le paiement d’un chèque.

L’article L. 131-35 du Code Monétaire et Financier autorise donc cette procédure en cas de perte, de vol ou d’utilisation frauduleuse du chèque, mais aussi de redressement ou de liquidation judiciaire du porteur.

Je vous propose de nous intéresser aux conditions de mise en oeuvre de l’opposition à chèque ainsi qu’aux sanctions qui l’encadrent.

 

Perte ou vol :

Le premier cas visé par les dispositions du Code Monétaire et Financier concerne la perte ou le vol d’un chèque qu’il soit parfait, vierge ou incomplètement rédigé.

Le critère déterminant qui est utilisé, est la dépossession involontaire, qu’elle ressorte d’une soustraction frauduleuse ou d’une extorsion.

Ainsi, les juges de la Cour de Cassation ont eu l’occasion de préciser que l’opposition pratiquée par une personne, qui n’a pas été involontairement dépossédé de son chèque, n’est pas licite.

Cass. Com.18 février 2004 n° 01-03136

 

Si cette situation apparaît comme la plus courante, l’article L. 131-35 du Code Monétaire et Financier vise pourtant d’autres circonstances dans lesquelles l’opposition est admise.

 

Utilisation frauduleuse :

Le deuxième cas trouve à s’appliquer en présence de manoeuvres frauduleuses d’une personne qui entend tirer bénéfice du chèque telles que :

– la falsification par un tiers à son profit d’un chèque émis par le titulaire du compte,

– la modification du montant d’un chèque par le porteur,

– l’émission d’un chèque faux par un tiers auquel le titulaire du compte a remis volontairement des formules.

Cette fois, le fondement de l’opposition est la tromperie impliquant l’intervention active soit du porteur bénéficiaire, soit d’un tiers.

Aussi la jurisprudence considère-t-elle que le droit d’obtenir paiement d’un chèque ne pouvant être subordonné à la réalisation d’une condition, ne constitue pas une utilisation frauduleuse justifiant l’opposition, la remise de ce chèque à l’encaissement, même s’il a été reçu à titre de garantie.

Cass. Com.24 octobre 2000 n° 97-21710

 

Redressement ou liquidation judiciaire :

Les dernières circonstances permettant d’ouvrir droit à l’opposition illustrent les situations dans lesquelles le porteur est privé de sa capacité de gérer.

C’est ainsi le cas lorsque le bénéficiaire du règlement est placé en redressement ou en liquidation judiciaire.

 

Très logiquement, l’opposition sera écartée s’il est établi que le titre en cause a été remis au liquidateur judiciaire.

Cass Com.8 juillet 2008 n° 07-16936


Rôle du banquier :

Comme on l’aura compris, l’opposition fait obstacle à l’exécution de l’ordre de payer qui a été donné au tiré.

Elle agit donc directement sur l’action de l’établissement bancaire en qualité d’intermédiaire de règlement du porteur.

 

C’est ainsi au banquier qu’il appartient de rappeler au titulaire du compte les sanctions encourues en cas d’opposition fondée sur un motif non autorisé car :

« Tout banquier doit informer par écrit les titulaires de compte des sanctions encourues en cas d’opposition fondée sur une autre cause que celles prévues au présent article ».

 

Malgré cette obligation d’information, il n’est tenu à aucun devoir de contrôle : la jurisprudence n’a jamais admis la déresponsabilisation du tireur au détriment de l’établissement bancaire.

Les juges de la Cour de Cassation ont donc décidé que le banquier tiré n’avait pas à contrôler la réalité du motif d’opposition invoqué au paiement d’un chèque.

Cass. Com 8 octobre 2002 n° 00-12174

Déjà Cass. Com. 9 février 1981 n° 79-15168

 

Sanctions pénales et civiles:

Le législateur a mis en place des sanctions pénales consécutives aux infractions suivantes :

– Le délit de blocage de la provision de l’article L. 163-2, al. 1er du même code prévu lorsque le tireur qui, ayant conscience de porter atteinte aux droits d’autrui, procède au retrait ou au blocage de la provision.

– L’infraction de refus de paiement d’un chèque au motif que le tireur y a fait opposition : l’article L. 163-1 du Code Monétaire et Financier punit d’une amende de 6 000 € le Banquier qui s’oppose au paiement d’un chèque hors les cas prévus, au motif que le tireur y a fait opposition.

Les agissements du porteur seront quant à eux réprimés dans le cadre du vol, de l’escroquerie ou de la falsification de chèque.

 

Par ailleurs, des sanctions civiles ont également été prévues pour éviter tout détournement de l’opposition quant au motif:

– Si le motif est exclu des cas visés à l’article L. 131-35 du Code Monétaire et Financier, l’opposition sera sans conséquence : le tiré devra payer et engagera sa responsabilité en refusant de le faire.

– Si le motif est permis mais fallacieux, la mainlevée de l’opposition pourra être obtenue devant le juge des référés.

 


Ainsi le législateur s’est assuré du respect des dispositions de l’article L. 131-35 du Code Monétaire et Financier par la coercition.

Il a entendu rappeler que le règlement par chèque est soumis à un principe, celui de l’irrévocabilité de la provision dont l’opposition au titre n’est que l’exception.

L’origine des Lois : la loi du 11 juillet 1975 portant réforme du divorce

Le 24/01/11 (mis à jour le 11/09/11)

Comme précédemment annoncée, je poursuis la série de billets sur l’origine des lois dont le deuxième épisode est consacré à la Loi n° 75-617 du 11 juillet 1975 portant réforme du divorce.

Le Droit français connait la dissolution du mariage depuis la révolution française : mais c’est la Loi Naquet du 27 juillet 1884 qui l’imposera et en fixera les principes.

Dans la seconde partie du 20ème siècle, les femmes font entendre leurs voix pour faire changer leur statut au sein de la famille et émerger leurs droits.

La réforme des principes restrictifs du divorce s’inscrit donc dans l’ère du temps et poursuit une évolution évidemment nécessaire à la lecture d’un manuel de droit publié au sortir de la seconde guerre mondiale.

Au chapitre de la capacité juridique, on peut y lire :

 « Cas de la femme mariée

La femme même mariée, a donc pleine capacité juridique. L’exercice de cette capacité ne peut être limité que pas un contrat de mariage ou par la loi (art.216 du code civil).

De par la loi, elle subit deux restrictions essentielles :

a) Le choix de la résidence de la famille appartient au mari

b) La femme peut exercer une profession séparée de celle de son mari, à moins que ce dernier ne s’y oppose ».

Le Droit au brevet d’Enseignement Commercial Premier Degré – R.VERGNAUD – Librairie ISTRA 1956

Cette réforme a également pour but d’adapter le droit à la famille française, à ses nouveaux modèles et à sa vision actuelle du couple.

Le changement est amorcé par la loi n°65-570 du 13 juillet 1965 portant réforme des régimes matrimoniaux qui introduit le régime légal de la communauté réduite aux acquêts.

Cette législation figure comme une première étape car elle rend effective la capacité juridique de la femme mariée pouvant désormais ouvrir un compte en banque en son nom propre et travailler séparément de son conjoint sans son autorisation.

Le divorce sera la seconde étape de l’évolution.

Et c’est dans ce contexte que le Doyen de l’Université du Panthéon-Assas, Jean Carbonnier, se voit chargé de rédiger l’avant projet de la loi de 1975.

Jusqu’à cette date, la rupture du mariage ne pouvait se fonder que sur la faute.

On distinguait alors les causes dites péremptoire telles que l’adultère ou la condamnation à une peine afflictive et infamante de l’un des époux*, des autres causes.

Ces dernières se limitaient aux excès, sévices et injures graves constituant un manquement grave et renouvelé des devoirs et obligations résultant du mariage et rendant intolérable le maintien du lien conjugal.

Pour ces causes dites non-péremptoires, il était évidemment difficile de rapporter la preuve des agissements fautifs, d’autant que l’aveu n’était pas reconnu.

L’un de mes professeurs d’Université expliquait que cet état du droit donnait lieu à des situations vaudevillesques.

Ainsi, les époux qui s’entendaient sur leur séparation, n’avaient d’autre choix que de s’écrire mutuellement des lettres d’injures pour que leurs fautes soient établies et que le droit au divorce leur soit ouvert.

Les magistrats fermaient les yeux sur ces divorces consensuels appelés S.O.P par référence aux insultes courantes contenues dans les missives (salope, ordure, putain).

La loi de 1975 bouleverse les procédures et consacre la rupture amiable du mariage ainsi que la faculté de divorcer unilatéralement d’un époux non fautif.

L’article 229 du code civil prévoit ainsi trois cas de divorce :

– le divorce par consentement mutuel,

– le divorce pour rupture de la vie commune consécutif à une séparation de fait d’une durée de six ans,

– et le divorce pour faute.

Au travers de sa rupture, la réforme met en lumière l’ambivalence du mariage à la fois contrat et institution.

Elle crée par ailleurs une nouvelle fonction judiciaire, celle du Juge aux Affaires Matrimoniales.

Mais son impact ne se limite pas au seul droit civil et à ses instances juridictionnelles : il se propage jusqu’au droit pénal.

C’est ainsi que l’adultère de la femme mariée jusqu’alors constitutif d’un délit dont l’amant était tenu complice -et non coauteur – sera dépénalisé.

Et tandis que les couples français gagnent en sérénité et en liberté, les femmes trouvent dans cette réforme indépendance, confiance et reconnaissance.

En 2004, le divorce fera l’objet d’une modernisation sans qu’un délai de quatre vingt dix ans ne s’écoule de nouveau.

La Loi n°2004-439 du 26 mai 2004 entrera en vigueur le 1er janvier 2005.

Sur cet épisode de notre droit, je souhaite laisser le mot de la fin à l’éminent Doyen Jean Carbonnier qui écrivait sans doute en réfléchissant à cette réforme :

« Les lois du 18 février 1938 et 13 juillet 1965 ont entendu effacer du droit civil « l’éternel féminin ». On remarquera que, tout au contraire, la philosophie contemporaine attire l’attention, d’une manière très aiguë, quoique non pas toujours dans le même esprit, sur l’altérité de la femme. Peut-être ne souligne-t-elle pas assez qu’un des aspects les plus profonds de cette altérité est une sensibilité différente du droit – un moindre besoin de droit, qui est sans doute une grande supériorité».

Droit Civil Tome Premier – J.Carbonnier – Thémis – Presses Universitaires de France 1965

Code Civil Ancien*

Art.229 :

Le mari pourra demander le divorce pour cause d’adultère de sa femme.

Art.230 :

La femme pourra demander le divorce pour cause d’adultère de son mari.

Art.231 :

Les époux pourront réciproquement demande le divorce pour excès, sévices ou injures graves, de l’un envers l’autre.

Art.232 :

La condamnation de l’un des époux à une peine afflictive et infamante sera pour l’autre une cause de divorce.

Les souffrances endurées, prix de la douleur

Le 17/01/11

En novembre 2004, le Président de la deuxième chambre civile de la Cour de Cassation s’est vu confié la mission de créer un groupe de travail afin d’élaborer une nomenclature commune des préjudices corporels.

Un an plus tard, soit le 28 octobre 2005 , Monsieur Jean-Pierre DINTILHAC déposait au Ministre de la Justice un rapport sur l’indemnisation des victimes en phase avec la pratique médico-légale.

Dans cet élan, la loi n°2006-1640 du 21 décembre 2006 de financement de la sécurité sociale de 2007 mettait en place un système de liquidation du dommage corporel permettant de soustraire de l’indemnité due au titre de chaque chef de préjudice, la part éventuellement versée revenant aux tiers-payeurs (organismes de sécurité sociale).

Depuis lors, la nouvelle nomenclature est mise en oeuvre dans les procédures en réparation des préjudices corporels en distinguant les préjudices patrimoniaux des préjudices extra-patrimoniaux.

L’un des postes de préjudices appelé communément pretium doloris s’applique à « toutes les souffrances physiques et psychiques, ainsi que des troubles associés, que doit endurer la victime durant la maladie traumatique, c’est à dire du jour de l’accident à celui de sa consolidation ».

Préjudice temporaire :

Issues de la catégorie des préjudices extra-patrimoniaux, les souffrances endurées s’inscrivent dans la période précédant la consolidation de l’état de la victime.

La définition de Madame LAMBERT-FAIVRE qui est la plus couramment retenue par les juristes présente la consolidation comme « le moment où les lésions se fixent et prennent un caractère permanent, tel qu’un traitement n’est plus nécessaire, si ce n’est pour éviter une aggravation, et qu’il est possible d’apprécier un certain degré d’incapacité permanente réalisant un préjudice définitif ».

Ainsi ce poste de préjudice est exclusivement temporaire puisque la période prise en considération pour son évaluation court du jour de l’accident ou de l’infraction à celui de sa consolidation.

Après cette date, les souffrances physiques et morales relèveront d’un autre poste appelé déficit fonctionnel permanent.

Indemnisation des souffrances endurées :

Comme vous l’aurez compris, ce poste de préjudice est à la fois physique et moral : il intègre aussi bien fois la douleur du corps que le retentissement psychologique.

La nécessité d’un suivi psychologique ou psychiatrique ainsi que les soins prodigués sont donc pris en considération dans la détermination du pretium doloris.

Mais, pendant des décennies, ce caractère moral du préjudice n’était pas admis par certaines juridictions empêchant une indemnisation de la souffrance dans son intégralité.

Jusqu’en 1961, le Conseil d’Etat considérait ainsi que « les larmes ne se monnayent pas » et refusait de réparer le dommage ressortant de la douleur morale, et plus particulièrement l’affliction causée par la perte d’un être cher.

Conseil d’Etat 24 novembre 1961 LETISSERAND

 Aujourd’hui, les préjudices notamment sexuels, esthétiques et d’agrément couvrent bien plus que la douleur physique pour s’attacher aux troubles dans les conditions d’existence subis du fait de l’accident ou de l’infraction.

Facteurs d’évaluation :

Les préjudices corporels sont évalués grâce à l’intervention d’un médecin désigné ou non par une juridiction selon le caractère gracieux ou contentieux de la procédure d’indemnisation.

Dans son examen de l’état du patient, l’expert intègre plusieurs critères pour l’évaluation des souffrances endurées, à savoir :

– le nombre de blessures et leur gravité,

– le contexte de l’accident ou de l’infraction, ses circonstances et les suites immédiates,

– le nombre d’interventions chirurgicales et la durée des hospitalisations,

– le nombre de séances de rééducations ou d’autres soins.

Le pretium doloris est ensuite quantifié sur une échelle de 0 à 7 correspondant aux différents degrés du ressenti physique et moral :

Pretium doloris très léger 1

Pretium doloris léger 2

Pretium doloris modéré 3

Pretium doloris moyen 4

Pretium doloris assez important 5

Pretium doloris important 6

Pretium doloris très important 7

Aussi, malgré l’adoption d’une nomenclature commune des préjudices corporels, l’évaluation différera de Lille à Limoges.

La clause exonératoire de garantie des vices cachés dans les ventes immobilières

Le 10/01/11

La garantie des vices cachés est une promesse de fiabilité qui engage le vendeur et protège l’acquéreur dans le cadre de ventes de toutes natures.

La chose, objet du contrat, se doit d’être exempte de tout vice la rendant impropre à l’usage auquel on la destine.

C’est ainsi que la présence de vices cachés doit être distinguée de l’absence de conformité du bien :

 – l’une relevant d’une analyse objective se rapportant à la destination et à l’usage normal de la chose,

– l’autre ressortant d’un critère subjectif consécutif à l’accord entre les parties sur une ou plusieurs caractéristiques de la chose.

Par ailleurs, l’absence de conformité de la chose livrée se résout en dommages et intérêts alors que les conséquences de la mise en oeuvre de la garantie des vices cachés sont toutes autres.

 En effet, à défaut de respecter son obligation légale, le vendeur sera tenu responsable des défectuosités et devra au choix de l’acquéreur :

 – reprendre le bien et en restituer le prix,

– ou supporter une diminution du prix.

Au terme des articles 1641 et suivants du Code Civil , chaque vendeur doit donc garantir :

– Les défauts propres du bien vendu,

– Qui étaient cachés ou non apparents au moment de la vente et antérieurs à celle-ci,

– Diminuant tellement son usage que l’acheteur ne l’aurait pas acquise si il en avait eu connaissance.

Cependant, l’acquéreur peut se heurter à une dérogation de ces dispositions qui ne sont pas d’ordre public.

Tel est le cas dans de nombreuses ventes immobilières où le vendeur peut insérer dans l’acte de cession une clause de non-garantie.

Au terme de cette stipulation, l’acquéreur accepte de prendre le bien vendu dans l’état où il se trouve au jour de l’entrée en jouissance sans aucune garantie de la part du vendeur pour raison de ses vices mêmes cachés.

Mais dans de telles circonstances, l’article 1643 du Code Civil ne décharge pas entièrement de sa responsabilité le vendeur qui reste tenu des vices qu’il connaissait avant la vente.

Dans un arrêt du 21 mars 2001, la Cour de Cassation a donc eu l’occasion de préciser que l’existence de vices cachés doit être retenue et la clause de non-garantie écartée lorsque le vendeur avait été de mauvaise foi en n’avertissant pas les acquéreurs du vice affectant la chose.

Cass Civ 3ème 21 mars 2001 Pourvoi n° 99-13017

Dans un arrêt plus récent de 2009, la haute cour rappelle que le bénéfice d’une clause élusive de la garantie des vices cachés est réservé au vendeur de bonne foi.

Cass Civ. 3e, 16 déc. 2009 Pourvoi n° 09-10.540

Mais encore faut-il prouver la mauvaise foi quand la bonne foi est toujours présumée…

Afin de déterminer si le vendeur avait eu connaissance du vice lors de la cession, une mesure d’expertise peut être sollicitée conformément à une jurisprudence du 11 mars 2003.

Cass Civ 3ème 11 mars 2003 Pourvoi n°01-12152

Le vendeur ne sera alors tenu à la garantie du bien que s’il est démontré qu’il avait connaissance des vices cachés au jour de la vente.

Cette action devra être intentée dans un délai de deux ans à compter de l’entrée en jouissance sous peine de prescription.

 

Le Service d’Aide au Recouvrement des Victimes d’Infractions (SARVI), premier bilan de fonctionnement

Le 03/01/11

Le procès pénal est un mécanisme complexe dans lequel se trouvent en présence plusieurs intérêts :

– Ceux de la société présentée par le ministère public,

– Ceux de l’auteur de l’infraction devenu prévenu,

– Et ceux de la victime devenue partie civile.

C’est qu’une même affaire est créatrice de deux instances distinctes appelées « action publique » et « action civile » ayant toutes deux pour origine la faute pénale.

Celles-ci cohabitent en arborant chacune un but propre, l’une sanctionner et l’autre réparer.

Au prononcé du jugement, cette vie commune cesse définitivement lorsque le prévenu devient pour l’une condamné et pour l’autre civilement responsable.

L’application des peines est le seul lieu de rencontre où elles peuvent être amenées à se côtoyer de nouveau.

La victime qui évoluait sur le cadre parfaitement fléché du procès pénal, doit alors sortir des sentiers battus pour obtenir l’exécution de sa décision de justice.

Mais sur les chemins non balisés du recouvrement, celle-ci n’est pas seule : elle est accompagnée de deux auxiliaires de justice, l’Huissier et l’Avocat, d’une commission, la Commission d’Indemnisation des Victimes d’Infractions (CIVI), et d’un service d’aide, le Service d’Aide au Recouvrement des Victimes d’Infractions (SARVI).

Le rôle du SARVI :

Fruit de la loi du 1er juillet 2008, le SARVI a été créé afin d’indemniser la victime et/ ou de l’aider à recouvrer les sommes dues en exécution du jugement pénal.

Non sans une certaine conscience de la réalité, le Législateur a considéré que la réparation financière est souvent le premier pas vers la reconstruction de la victime et le second vers la réinsertion du condamné.

En qualité de fonds de garantie, le SARVI permet donc une indemnisation effective dans les conditions suivantes : Si le Tribunal a accordé à la victime des dommages et intérêts inférieurs ou égaux à 1.000 euros, cet organisme paiera l’intégralité de cette somme. Si il lui a alloué une somme supérieure à 1.000 euros, le SARVI :

 – lui versera à titre d’avance 30 % du montant total compris entre 1.000 euros et 3.000 euros,

– se chargera à sa place d’obtenir le reliquat et les pénalités contre le condamné.

En qualité d’organisme de recours, la SARVI est aussi chargé de récupérer les indemnisations allouées aux victimes auprès des responsables.

Les objectifs affirmés sont de « responsabiliser l’auteur du dommage, ne pas laisser une impression d’impunité vis à vis de la victime et contribuer au financement du Fonds de Garantie ».

C’est ainsi qu’après avoir indemnisé totalement ou partiellement la victime, le SARVI est subrogé dans ses droits à l’égard du condamné et peut se retourner contre ce dernier pour recouvrer la créance et les pénalités.

Relances, plan de remboursement, voies d’exécution sont les moyens d’action de cet « Huissier » des parties civiles.

 Le traitement des demandes:

A la différence des CIVI qui sont des commissions instituées dans chaque Tribunal de Grande Instance, le SARVI est un organe national.

L’organisme de garantie et de recours est donc unique, son siège parisien accueillant les demandes de la France entière.

Elles sont présentées à l’aide d’un formulaire qui dument complété, doit être adressé par courrier accompagné des pièces justificatives :

 – de la créance,

 – de l’identité du demandeur

 – et des éléments permettant le recouvrement à l’encontre du responsable.

Chacune de ces demandes est traitée à distance sur pièces, sans entretien avec la victime, ni contact directe.

C’est dans ce cadre que le rôle de l’Avocat en qualité de mandataire et référent est essentiel.

Son intervention permettra d’obtenir plus facilement les pièces de procédure indispensables à la constitution du dossier telles que la copie exécutoire de la décision pénale appelée aussi la grosse et les certificats établissant le caractère définitif de celle-ci.

A défaut de pouvoir saisir le SARVI lorsque la décision de justice est antérieure au 1er octobre 2008, il reviendra à ce même Avocat de procéder au recouvrement par tous autres moyens : voies d’exécution, information du Juge d’Application des Peines ou demande d’affectation des sommes perçues par le détenu à l’indemnisation…

Les délais de règlement :

Rappelons que le SARVI ne peut être saisi que 2 mois à compter de la date à laquelle la décision de justice est devenue définitive et au plus tard un an à compter de cette même date.

Qu’il s’agisse de l’indemnisation totale ou partielle, la Loi prévoit que le versement interviendra dans un délai de 2 mois à réception du dossier.

Dans les faits, la victime devra souvent patienter avant d’obtenir le règlement ou l’avance attendue car soit la constitution du dossier, soit le délai de traitement sera retardé :

Tout d’abord, il faut compter avec le temps nécessaire au Greffe de la Juridiction qui s’est prononcé sur l’indemnisation pour transmettre la décision.

A Lyon, les délais varient selon la chambre correctionnelle qui a statué entre 2 mois pour la 14ème chambre, qui statue en matière de Comparutions immédiates, et 12 mois pour la 7ème chambre.

Ensuite, la victime devra faire face à une éventuelle contestation de la décision soit que le condamné ai fait appel ou soit qu’il ait formé un pourvoi en cassation.

Si d’aventure, le jugement était rendu par défaut, s’ajouterait alors le délai de signification et d’opposition.

A l’issue de ce parcours, il restera à obtenir le certificat de non-appel, de non-pourvoi ou de non-opposition selon la célérité de la juridiction pénale.

Enfin, l’importance des demandes présentées au SARVI a augmenté le délai d’instruction de l’organisme et porté l’échéance du règlement de 2 à 3 mois.

 L’information :

Si l’existence du SARVI demeurait confidentielle, il va de soi que les victimes d’infraction resteraient dans l’ignorance de ses missions de fonds de garantie et d’organisme de recours.

C’est pourquoi, elles bénéficient d’une information sur les possibilités de saisine à l’issue de l’audience par le Bureau de l’Exécution des Peines.

Par ailleurs, on retrouve désormais dans les décisions pénales un avis concernant cette procédure comme il suit :

« Rappelle au condamné la possibilité pour la partie civile, non éligible à la Commission d’Indemnisation des Victimes d’Infractions (CIVI), de saisir le Service d’Aide au Recouvrement des dommages et intérêts pour les Victimes d’Infractions ( SARVI) s’il ne procède pas au paiement des dommages intérêts et des frais d’exécution auxquels il a été condamné dans le délai de 2 mois courant à compter du jour où la décision est devenue définitive.

Dans ce cas, le montant des dommages et intérêts et des sommes dues en application de l’article 475-1 du code de procédure pénale sera augmenté d’une pénalité de 30 % ».

A surplus, l’Avocat complétera cette information et se chargera, le cas échéant, de la saisine.

L’instauration SARVI marque donc une évolution remarquable dans la valorisation et l’indemnisation des victimes, parties au procès pénal.

Pour autant, les difficultés persistantes rencontrées par les parties civiles dans l’exécution des décisions de condamnation encouragent certains à vouloir pénaliser la soustraction volontaire et la mauvaise foi du paiement de dommages et intérêts.

Car si le SARVI remplit indiscutablement son objectif de réparation effective du préjudice subi par les victimes, il reste à savoir s’il parviendra à responsabiliser l’auteur du dommage.

La Loi pénitentiaire du 24 novembre 2009 améliorant l’exécution des peines renforcera sans aucun doute le rôle des sanctions pécuniaires et des pénalités et permettra d’appuyer dans ce sens.

Les seules victimes qui conserveront alors une impression d’impunité, seront les personnes morales pour lesquelles la saisine du SARVI est impossible.

L’origine des Lois : le septennat et la loi du 20 novembre 1873

Le 27/12/10

Durant ces vacances de fin d’année, j’inaugure une série d’articles historiques intitulée l’origine des Lois.

Les règles et les législations qui fondent une société, sont toujours le fruit des circonstances sociales et politiques ainsi que l’image des craintes et des espoirs d’une population.

Elles s’inscrivent dans l’esprit de leur époque pour disparaître ou muer selon les changements de régimes et d’idées.

 

C’est en effet l’essence même du Droit en tant que science humaine d’évoluer au rythme de la société.

Dans cette perspective, ce premier billet est consacré à la loi du 20 novembre 1873 instaurant le septennat du mandat présidentiel.

 

Le 1er septembre 1870, s’achève la bataille de Sedan, dernier épisode de la guerre entre la France et l’empire d’Allemagne, qui marque la déchéance de Napoléon III et la fin du second empire.

A l’issue de cette défaite, l’Empereur reste prisonnier en Allemagne laissant le pays sans gouvernant.

C’est dans ce contexte agité qu’un gouvernement provisoire se constitue le 4 septembre 1870 et proclame l’avènement de la République.

 

La France toujours en guerre est dans l’attente d’une paix qui sera initiée le 28 janvier 1871 par la signature d’un armistice de quatre semaines.

Bismark lui laisse alors le temps d’élire une assemblée nationale pour entériner un traité de paix.

 

Le 8 février 1871, les élections générales sont marquées par une majorité de députés favorables à l’arrêt des combats mais également à la monarchie.

Cependant, ces députés sont divisés entre les deux prétendants au trône :

– le Comte de Chambord, petit-fils de Charles X, quinquagénaire peu enclin aux compromis et rejetant le drapeau tricolore au profit du drapeau blanc, symbole de la royauté,

– le Comte de Paris, petit-fils de Louis-Philippe 1er, père de famille trentenaire, plus modéré et acceptant l’étendard républicain.

Aussi, Adolphe Thiers, député sous la monarchie de Juillet puis sous le second empire est-il provisoirement désigné le 17 février 1871 chef du gouvernement exécutif de la République française avec l’espérance qu’un choix de régimes et gouvernants s’imposera bientôt.

 

Mais les mois qui suivent n’apporteront aucune solution au problème de succession : le manifeste du Comte de Chambord du 6 juillet 1871 exigeant la renonciation au drapeau tricolore renforcera au contraire les distensions.

C’est ainsi que les députés votent le 31 août 1871 la première loi constitutionnelle et proclame la République avec Adolphe Thiers pour Président.

 

Deux ans plus tard, le Président qui avait écrasé la Commune de Paris entre le 18 mars et le 27 mai 1871, est contraint de démissionner.

L’Assemblée Nationale menée par le Duc de Broglie voit renaitre sa chance d’instaurer une monarchie modérée.

 

Mais l’opposition entre le légitime successeur au trône, le Comte de Chambord, partisan d’une monarchie traditionaliste, et son cousin, le Comte de Paris, prétendant orléaniste, perdure.

Les députés décident donc de voter la prolongation du régime provisoire en confiant un mandat septennal personnel de président de la république au Maréchal de Mac-Mahon, acquis à leur cause monarchique.

En sept ans, ils espèrent que le comte de Chambord décèdera pour céder sa place au comte de Paris et régler définitivement la succession au trône de France.

Ils inventent ainsi la régence républicaine fondée sur l’espérance de vie d’un légitime monarque intransigeant.

Hélas pour eux, l’adoption des lois constitutionnelles du 30 janvier 1875 marquera la fin de tous leurs espoirs de restauration et la naissance de la Troisième République.

Ce régime né dans l’instabilité et accepté par une assemblée monarchique se maintiendra jusqu’en 1940 et disparaîtra dans la confusion de l’occupation allemande.

 

Après 65 ans d’existence, il constitue la plus longue république que la France ait connu et le berceau des principes républicains à valeur constitutionnelle fondant notre constitution actuelle.

Le septennat disparaitra quant à lui avec l’adoption de la Loi constitutionnelle n° 2000-964 du 2 octobre 2000 .

 

Ce qu’il faut savoir sur le dépôt de garantie des logements privés non meublés

Le 20/12/10

Les Baux d’habitation des logements privés non meublés sont encadrés par la Loi n°89-462 du 6 juillet 1989 précisant les droits et obligations respectifs du preneur et du bailleur.

Au terme de son article 22, cette législation évoque la possibilité d’instaurer le versement d’un dépôt de garantie* à la charge du preneur* dans le contrat de location.

Cette consignation est un moyen pour le bailleur de se prémunir contre d’éventuels défauts de paiement ou toute autre inexécution de ses obligations par le locataire, au même titre que le cautionnement ou l’assurance garantissant les risques locatifs.

 Je vous propose d’évoquer de ce qu’il faut savoir sur le dépôt de garantie à travers cette synthèse.

Qu’est-ce que le dépôt de garantie ? 

Comme son nom l’indique, cette somme d’argent doit être déposée entre les mains du bailleur ou son mandataire aux fins de garantir le règlement des loyers, charges, frais éventuels de remise en état du logement et accessoires.

Ce dépôt n’est pas une avance sur loyer et ne doit pas se substituer au règlement de celui-ci car le preneur manquerait alors à ses obligations contractuelles.

Le bailleur peut donc imposer cette consignation à son locataire ou l’en dispenser, tout comme il choisit les modalités de règlement du loyer.

Mais si le bail stipule que le loyer est payable d’avance pour une période supérieure à deux mois, aucun dépôt de garantie ne sera exigible.

Quel est le montant du dépôt ?

Conformément à la législation en vigueur depuis le 25 mars 2009, le dépôt de garantie «ne peut être supérieur à un mois de loyer en principal ».

Ce montant est fixé de manière intangible pour toute la durée du bail et ses renouvellements.

Il ne peut donc souffrir aucune révision, à l’inverse des garanties prévues dans les baux commerciaux et professionnels prévoyant souvent une réévaluation annuelle ou triennale.

Quand le dépôt doit-il être versé et restitué ? 

Le dépôt de garantie est versé au bailleur ou son mandataire au moment de la signature du bail. A la fin du bail, il doit être restitué au preneur dans un délai de 2 mois à compter de la remise des clés.

Il est intéressant de noter que le dépôt de garantie ne porte pas intérêt au bénéfice du locataire durant le bail.

Cependant, il produit des intérêts au taux légal, soit 0,65 % pour l’année 2010, à défaut de restitution à l’expiration du délai de deux mois précité.

La Cour de Cassation a eu l’occasion de préciser dans un arrêt du 8 décembre 2009 qu’«aucune disposition légale ne fait obligation au bailleur de justifier dans ce délai de deux mois des sommes qu’il entend déduire du montant du dépôt de garantie ».

Cass Civ 3ème 8 décembre 2009 Pourvoi n° 08-20340 

 Quelles sommes peuvent être imputées sur le dépôt de garantie ?

C’est évidemment la question de la restitution du dépôt de garantie qui nous amène à évoquer l’arrêté de compte entre les parties au contrat.

En effet, le bailleur peut retenir sur le dépôt de garantie une certaine somme en compensation de l’inexécution par le preneur de ses obligations.

Outre le règlement des loyers et charges, l’article 7 de la Loi du 6 juillet 1989 rappelle que le preneur :

– répond des dégradations et pertes qui surviennent pendant la durée du contrat dans les locaux dont il a la jouissance exclusive, à moins qu’il ne prouve qu’elles ont eu lieu par cas de force majeure, par la faute du bailleur ou par le fait d’un tiers qu’il n’a pas introduit dans le logement,

 – prend à sa charge l’entretien courant du logement, des équipements mentionnés au contrat et les menues réparations ainsi que l’ensemble des réparations locatives définies par décret en Conseil d’Etat, sauf si elles sont occasionnées par vétusté, malfaçon, vice de construction, cas fortuit ou force majeure.

L’état des lieux dressé contradictoirement le jour de la sortie permettra de déterminer les dégradations ayant pour origine soit l’usure normale du logement, soit le défaut de diligences du preneur.

Suite à la remise des clés, un arrêté de compte sera établi pour déterminer les sommes restant dues au propriétaire telles que la régularisation des loyers et des charges dus ou les frais de remise en état imputables au locataire.

Il faut cependant préciser qu’il appartient au bailleur de communiquer au preneur les justificatifs pour procéder aux déductions liés aux travaux de remise en état.

 Selon la Cour de Cassation, le bailleur n’a pas à présenter de factures car son indemnisation n’est pas subordonnée à l’exécution des réparations locatives.

Cass Civ 3ème 3 avril 2001 pourvoi n° 99-13668 

Cass Civ 3ème 2 octobre 2007 pourvoi n°06-18142 

Cependant, il doit justifier les sommes qu’il entend conserver, notamment par des devis professionnels ayant même force probatoire que les factures.

Que faire en cas de litige ? 

Il n’est pas rare que des difficultés surviennent entre bailleurs et preneurs lors de la restitution du dépôt de garantie ou de l’arrêté des comptes.

Afin de régler leurs litiges, l’une ou l’autre des parties peut alors saisir :

– soit la commission départementale de conciliation,

– soit la juridiction civile du lieu où est situé le logement.

En application de l’article R231-4 du Code de l’Organisation Judiciaire, c’est la juridiction de proximité qui sera compétente pour connaître, en dernier ressort, jusqu’à la valeur de 4 000 euros, des actions relatives à la restitution du dépôt de garantie.

* dépôt de garantie : il est souvent appelé caution. Mais la caution désigne la personne qui s’engage à garantir l’exécution d’un contrat par l’une des parties au profit de l’autre.

* preneur : synonyme de locataire.

Classement sans suite et droits des victimes

Le 06/12/10

Longtemps, la procédure pénale a concentré son attention sur l’auteur de l’infraction et la répression de ses actes.

Ce n’est que dans la première moitié du 20ème siècle que les criminologues se sont intéressés à la victime et à son rôle dans le phénomène criminel.

Au fur et mesure des ans, celle-ci est alors devenue actrice du procès pénal jusqu’à ce que la Loi n°2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité renforce et consolide ses droits.

Aujourd’hui comme le précise Robert CARIO « D’un point de vue éthique, toute personne victime possède une triple série de droits : à la reconnaissance, à l’accompagnement et à réparation ». Répertoire Dalloz – Procédure Pénale

Cette évolution trouve pourtant ses limites dans ses interactions avec le ministère public disposant de l’opportunité des poursuites.

Car en présence d’une infraction, c’est le Procureur de la République qui apprécie s’il y a lieu de déclencher l’action publique, de classer sans suite ou de recourir à l’alternative aux poursuites.

Et il choisit non seulement la destination mais aussi le chemin qu’il considère le plus adapté pour s’y rendre (COPJ, Comparution immédiate, Comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité…).

L’insuffisance de preuves ou de caractérisation de l’infraction, la méconnaissance de l’auteur des faits, le comportement du plaignant ou la faible importance du préjudice sont autant de raisons qui conduisent le Procureur de la République à ne pas poursuivre.

Dans ces circonstances, il prend alors une décision de classement sans suite sur laquelle il pourra éventuellement revenir plus tard à défaut de prescription ou d’extinction de l’action publique.

Face à cette mesure administrative non sans conséquence, la victime de l’infraction dispose de droits garantis par le Code de Procédure Pénale.

Droit d’information de la victime :

Le premier droit découle des dispositions de l’article 40-2 dudit code au terme duquel le Procureur est tenu d’aviser les plaignants et les victimes de sa décision de classer sans suite.

Le magistrat du Parquet ne doit pas se limiter à prévenir de l’absence de poursuites pénales, il doit en outre indiquer les raisons juridiques ou d’opportunité de sa décision.

Dans les faits cependant, la pratique sur cette information et sur les motivations varie d’une juridiction à l’autre sans que la constitution de partie civile n’ait la moindre influence sur cette information.

Par ailleurs, le contrôle sur l’exécution de cette obligation reste limité, d’autant que dans ces circonstances, la saisine du Juge délégué aux victimes n’est pas ouverte…

Droit de recours hiérarchique de la victime :

Mais le deuxième droit prévu aux dispositions de l’article 40-3 du Code de Procédure Pénale ne laisse pas la victime sans ressource.

La Loi lui confère la possibilité d’exercer un recours auprès du Procureur Général (représentant du ministère public auprès de la Cour d’Appel) contre la décision de classement sans suite.

 Encore faut-il qu’elle soit à l’origine de la dénonciation des faits pour lesquels aucune poursuite n’a été initiée.

Saisi de ce recours, le Procureur Général se fait remettre le dossier afin à son tour d’apprécier l’opportunité d’une suite pénale.

 S’il infirme la décision du Procureur de la République, il pourra enjoindre ce dernier d’engager des poursuites.

Droit à l’instruction de la victime :

 La victime dans l’attente d’une réponse judiciaire dispose également du droit de déposer plainte avec constitution de partie civile auprès du Doyen des juges d’instructions selon l’article 85 du Code de Procédure Pénale.

Mais afin d’éviter tout recours abusif, elle sera tenue de consigner des frais de justice fixé par le doyen des juges d’instruction en tenant compte de ses ressources.

Le magistrat ainsi saisi ordonnera l’ouverture d’une instruction judiciaire qu’il confiera à un juge d’instruction.

Comme à l’accoutumée, des investigations complétant l’enquête de police ou de gendarmerie initiale seront menées dans le cadre de ce dossier instruit à charge et à décharge.

A l’issue, le juge d’instruction nommé prononcera soit le renvoi de l’affaire devant la juridiction pénale, soit un non lieu.

Au fils des législations, la place de la victime dans le procès pénal a donc évolué et lui a conféré de nouveaux droits du dépôt de plainte jusqu’au suivi de l’exécution de la peine.

De l’indemnisation à l’information, on ne peut que constater une meilleure prise en compte de ses intérêts.

Surtout si le traitement judiciaire ne résout pas tout, il permet cependant d’agir sur la souffrance par la reconnaissance d’un statut à la victime.