Minet, qu’est-ce que tu fais pour les vacances ?

Chaque année, les associations de protection des animaux se mobilisent à l’approche de la période estivale pour lutter contre l’abandon et alerter les citoyens sur les conséquences de ce fléau.

Les initiatives se multiplient aussi pour aider les maitres à s’organiser avant l’été afin de trouver des solutions de garde de leurs animaux de compagnie.

Longtemps la priorité a été de sensibiliser aux responsabilités sans stigmatiser les comportements.

Mais l’augmentation des actes de délaissement suite à la crise sanitaire liée au Covid 19 et aux confinements successifs suivie de la saturation des refuges et autres dispositifs d’accueil ont réveillé les consciences sur ce problème de société.

Anonyme et discret, l’abandon des animaux de compagnie est désormais dénoncé avec force parmi les citoyens.

C’est dans ce triste contexte que la Loi n° 2021-1539 du 30 novembre 2021 visant à lutter contre la maltraitance animale et conforter le lien entre les animaux et les hommes a été adoptée.

En réécrivant la définition des infractions existantes, cette législation est venue renforcer le droit pénal spécial animalier et notamment la pénalisation des auteurs.

Un choix social avisé :

La question de la relation de l’homme à l’animal n’est pas nouvelle : elle s’est posée au fils de siècles allant de l’éviction à la cohabitation, de la croyance à l’affection, de la chasse à la sauvegarde.

Entre liaisons dangereuses et compagnonnage familier, le couple n’a cessé de chercher l’équilibre pour vivre ensemble.

Ce qui est certain, c’est que plus l’homme a étendu son espace vie sur les terres sauvages, plus il a entrepris de maitriser l’animal pour répondre à ses besoins.

Pour ce faire, le dressage et la contention se sont accompagnés bien évidemment de violences et de sévices.

GANDHI disait qu’« on peut juger de la grandeur d’une nation par la façon dont les animaux y sont traités ».

Le rapport du député Loïc DOMBREVAL sur  « le bien-être des animaux de compagnie et des équidés », remis en juin 2020 au Premier ministre et au ministre de l’agriculture reconnait lui qu’il existe un lien entre la maltraitance animale et la maltraitance sur êtres humains.

Sur la base de nombreuses études scientifiques, il retient :

« Il est avéré que les animaux sont souvent les galops d’essai des pervers. Ainsi leur protection est à l’avant-garde de la protection des enfants, des handicapés et des femmes.

(…)

Les diverses enquêtes démontrent des violences ou des troubles comportementaux graduels, c’est-à-dire que la violence sur les animaux est une première étape de violences ou de troubles plus graves.

(…)

La majorité des chiffres tend à démontrer l’importance de protéger les animaux pour éviter les faits de délinquance : 44% des pédophiles et 68% des violeurs avaient commis des actes de cruauté sur des animaux22 ; entre 41 et 57% des hommes violents au sein d’un foyer ont déjà maltraité l’animal de compagnie du ménage23 ; 67% des enfants dont la mère est battue affirment avoir été témoins de violence sur leur animal 24 d’après une étude publiée en 2018.

(…)

En somme, les résultats empiriques internationaux démontrent que le lien entre la cruauté exercée sur les animaux et les violences sur les êtres humains est bien réel. En conséquence, lutter contre la maltraitance animale est primordial pour améliorer leur condition mais peut aussi être une étape cruciale pour réduire différentes formes de violences humaines, les deux étant reliées ».

Cette déplaisante analyse a permis à la Loi du 30 novembre 2021 de compléter le Code de l’Action Sociale et des Familles pour veiller au repérage et à l’orientation des mineurs condamnés pour maltraitance animale ou dont les responsables ont été condamnés pour maltraitance animale (article L221-1).

Un acte antisocial réprimé :

La Loi n° 2015-177 du 16 février 2015 relative à la modernisation et à la simplification du droit et des procédures dans les domaines de la justice et des affaires intérieures a consacré l’article 515-14 du Code Civil selon lequel « les animaux sont des êtres vivants doués de sensibilité ».

L’article L 214-1 du Code rural et de la pêche maritime ajoute que l’animal quel qu’il soit « doit être placé par son propriétaire dans des conditions compatibles avec les impératifs biologiques de son espèce ».

La souffrance est un ressenti qui relève d’une appréciation subjective : elle est donc difficile de la rattacher aux animaux avec certitude.

Mais le stress et le bien-être sont des notions objectives qui peuvent être appréhendés par une analyse du comportement sans la barrière du langage.

Bien avant la Loi du 30 novembre 2021, l’article L 214-3 du Code rural et de la pêche maritime interdisait « d’exercer des mauvais traitements envers les animaux domestiques ainsi qu’envers les animaux sauvages apprivoisés ou tenus en captivité ».

Il en va de même de l’abandon d’un animal domestique prohibé et réprimé par l’article 521-1 du Code Pénal. 

Mais le rapport du député Loïc DOMBREVAL a mis en lumière l’insuffisance du dispositif législatif pour en finir avec les pratiques des maitres délinquants qui se délestent de leur chat, chien ou NAC  comme on jette un objet inutile aux encombrants.

Il a, en effet, dressé le constat suivant :

 « Le nombre de 100 000 chiens et chats abandonnés par an est régulièrement cité. D’après nos calculs détaillés en annexe 9 et synthétisés ci-dessous, ce nombre est sous évalué. Notre estimation démontre que le total des animaux potentiellement abandonnés et/ou potentiellement négligés approche les 300 000.

(…)

Les chiens et les chats sont les membres de la société les plus vulnérables et sont incapables d’exercer par eux-mêmes leurs droits. Leur place s’établit dans la relation qu’ils ont avec l’humain qui assure leurs besoins fondamentaux et qui en est juridiquement responsable.

(…)

Une première des causes de l’abandon d’un animal tient au décalage entre le projet d’avoir un chien ou un chat, parfois le rêve, et la réalité. Ce décalage peut être engendré par une mauvaise information du futur détenteur ou par un achat ou une adoption pas suffisamment raisonnée et murie ».

Il apparait nécessaire de rappeler que l’abandon est assimilé à un acte de maltraitance animale : il  est interdit et sanctionné par les mêmes peines.

Face à sa recrudescence, la Loi nouvelle a donc durci le ton en aggravant les sanctions pénales de deux à trois ans d’emprisonnement et de 30 000 à 45 000 euros d’amende.

La responsabilité était insuffisante jusqu’alors à amener la conscience de la différence existant entre un être vivant et une chose inerte.

La répression semblait indispensable pour que la place de l’animal, son bien-être et ses besoins soient reconnus dans notre société.

L’abandon n’est pas qu’un acte grave et malheureux, il est surtout un comportement antisocial  et un délit pénal.

Quand la Justice se met à nu…

Depuis quelques années, l’institution judiciaire s’inquiète de l’évolution de pratiques qui égratignent les principes de l’indépendance de la justice, de l’état de droit, des droits de la défense et de l’égalité des armes.

La crise sanitaire liée au COVID est venue malheureusement asphyxier un service public de la Justice déjà essoufflé par un manque de moyens humains et matériels.

L’activité des tribunaux et cours dont la mission est de trancher des litiges en droit au nom du peuple souverain, est désormais impacté par ce trouble respiratoire chronique.

L’une des conséquences de cette insuffisance de souffle est la division des acteurs de la Justice, qui, souvent maltraités, sont devenus maltraitants entre eux.

Mais ce mois de juin est marqué par une bouffée d’oxygène : la publication de plusieurs rapports qui après avoir dressé un état des lieux des problématiques actuelles, apportent des solutions et des perspectives d’avenir.

Le rapport 2021 du Conseil Supérieur de la Magistrature :

Le 14 juin 2022, le Conseil Supérieur de la Magistrature a publié son rapport d’activité pour l’année 2021.

Ce document synthétise les travaux menés par cet organe constitutionnel pour la période écoulée en matière notamment de nomination, de déontologie et de discipline des magistrats.

Participant au maintien de la confiance du public dans les institutions juridictionnelles, le Conseil Supérieur de la Magistrature engage une réflexion empathique, pleine d’intelligence dans ce domaine et se montre attentif au ressenti des justiciables.

Les extraits ci-joints de son rapport parlent d’eux-mêmes :

« Il a été souligné ci-dessus que de nombreux justiciables formulent des demandes mal orientées, dont le traitement ne relève pas des pouvoirs du Conseil (demande de conseil juridiques, d’allocation de dommages-intérêts, d’intervention dans des procédures en cours, de poursuites pénales, etc.) ou visent des personnes à l’égard desquelles le Conseil n’est pas matériellement compétent (avocat, huissier de justice, expert judiciaire, notaire, éducateur, conseiller pénitentiaire d’insertion et de probation, conseiller prud’homme, juge administratif, juge consulaire, greffier, délégué du procureur, policier ou gendarme, etc.). Dans un souci pédagogique, une réponse personnalisée est apportée à ces demandes. En 2021, il a été répondu à 1 456 courriers de justiciables auxquels s’ajoutent des appels téléphoniques et des courriels » (Page 77).

« Certains dossiers traités mettent en exergue des pratiques qui, sans revêtir un aspect disciplinaire, mériteraient d’être signalées aux magistrats concernés dès lors qu’elles contribuent à la perte de confiance des justiciables dans la justice.

À titre d’illustration, peuvent être mentionnés : certains propos d’audience qui ont un retentissement particulier pour le justiciable qui ne maîtrise pas nécessairement les termes et les usages judiciaires ; certains comportements interprétés par le justiciable comme une forme de légèreté, de désinvolture ou de parti pris ; certaines motivations lapidaires et/ou stéréotypées donnant l’impression que l’affaire n’a pas été sérieusement examinée ; les manifestations de familiarité, en public, qui pourraient laisser penser à une connivence entre le magistrat, d’une part, et la partie adverse et/ou son avocat, d’autre part. L’utilisation des réseaux sociaux peut également avoir une incidence dans la sphère professionnelle et impose, de ce fait, un surcroît de vigilance, y compris en cas de navigation sur des sites de rencontres.

Dans de telles circonstances, il est arrivé que les CAR sièges sollicitent les observations du magistrat, même en l’absence de preuve formelle de son comportement, afin d’attirer son attention sur une possible difficulté. Le magistrat était ainsi incité à s’interroger sur ses pratiques professionnelles.

Le Conseil estime qu’il conviendrait d’aller au-delà et qu’un véritable pouvoir de rappel des obligations déontologiques, soumis au même formalisme que l’avertissement, lui soit reconnu » (Page 79).

Les rapports du Conseil consultatif conjoint de la déontologie de la relation magistrat-avocat :

En 2018, la Cour de cassation a initié un projet tendant à réunir les organes représentatifs des magistrats et avocats afin d’œuvrer en faveur d’un rétablissement de liens de confiance et constructifs entre les deux fonctions.

Face à l’évidente dégradation des relations magistrat-avocat, un Conseil consultatif conjoint a été créé par la signature de la charte le 26 juin 2019 par :

  • la Cour de Cassation,
  • le Conseil Supérieur de la Magistrature,
  • les quatre Conférences des chefs de cour et de juridiction,
  •  l’Ordre des avocats aux conseils,
  • le Conseil national des barreaux,
  • la Conférence des bâtonniers de France et d’Outre-mer
  • et l’Ordre des avocats au barreau de Paris.

Le 20 juin 2022, cet organe de déontologie croisée a présenté des préconisations dans trois rapports aux fins de permettre une amélioration des liens professionnels.

Trois groupes de travail se sont mobilisés pour dresser un constat des difficultés et y apporter des réponses pérennes :

Rapport du groupe de travail « Prospectives » :

Ce rapport établit que « de l’avis unanime de tous les professionnels, et même si peu d’incidents sont rapportés officiellement, une dégradation de la relation avocat/magistrat s’est installée depuis plusieurs années dans nos juridictions » (Page 3).

Parmi les raisons des tensions entre les acteurs du droit, la nouvelle organisation de tribunaux et cours est mise en évidence :

« Les palais de justice sont le lieu privilégié de rencontres et d’échanges entre magistrats et avocats.
Dans la majorité des cas, ces échanges se déroulent dans de bonnes conditions.
La construction des nouveaux palais de justice et la rénovation de certains anciens palais a pu contribuer à distendre les liens existant entre ces deux professions.

Bien souvent, l’émergence de difficultés dans la relation entre magistrats et avocats nait de la grande taille des juridictions lesquelles transforment les palais de justice en bunker.
(…)

Dans la plupart des cas, les nouveaux palais de justice n’ont pas conservé en leur sein les locaux dédiés à l’ordre des avocats, contraignant ces derniers à s’établir hors du tribunal et des lieux de convivialité communs. Or, la présence du bâtonnier au cœur du palais était un symbole fort. En réalité, le fait que les ordres d’avocats soient sortis de la maison commune dépasse le symbole puisque cet éloignement physique des deux professions est perçu comme de nature à éroder les liens qui les unissent : les opportunités de dialogue entre les deux corps de métiers s’en trouvent en effet affaiblies » (Page 19).

Rapport du groupe de travail « Usages et bonnes pratiques » :

Ce rapport met en exergue la difficulté de concilier la bonne organisation et la célérité de la Justice avec l’oralité des débats et la solennité de l’audience :

« Une réflexion devrait être engagée sur les devoirs réciproques entre les magistrats et les avocats à l’audience civile : à ce titre, il a été rappelé que si l’avocat ne saurait plaider plus que nécessaire, il doit néanmoins avoir le temps de s’exprimer. Il est élémentaire en effet que le justiciable voie son avocat écouté et respecté dans sa plaidoirie car il s’agit d’une condition de sa compréhension de la justice. Il est des arguments que le justiciable a besoin d’entendre, dans certains dossiers très personnels. Le magistrat doit comprendre la démarche de l’avocat lorsque celui-ci plaide « corps présent.

Si l’avocat doit préparer sa prise de parole, ce qui est un exercice exigeant, le magistrat doit quant à lui se mettre en condition d’écoute active à l’audience » (Page 22).

« L’écoute fait partie du rôle social du juge. Le groupe de travail souhaite en effet rappeler la vertu sociale de l’audience, même lorsqu’elle est cadrée par une procédure écrite, en donnant comme recommandation aux magistrats de ne pas sous-estimer l’importance de l’écoute à l’audience, même si les demandes sont concentrées dans les écritures des parties, et de privilégier toutes formes d’accords, y compris par protocole, sur le temps de parole à l’audience avec le bâtonnier.

La justice doit se donner à voir et à entendre » (Page 23).

Mais l’ensemble des membres du groupe se sont entendus pour « revenir aux principes essentiels de leur profession et de leurs déontologies respectives » dans l’intérêt d’une seule personne :

Au cœur de ces principes déontologiques et professionnels se trouve le justiciable auquel le service public de la justice se doit d’être correctement et efficacement rendu. Ce justiciable, usager du service public de la justice, a été véritablement au cœur des réflexions.
C’est, au fond, pour lui que les membres du groupe de travail ont, avec humilité, tenté ici de poser les premiers jalons d’une « déontologie des relations entre avocats et magistrats
» (Page 33).

Recueil de cas pratiques interrogeant la déontologie des relations entre avocats et magistrats :

Ce rapport réponde à des questions factuelles précises par des réponses concrètes concertées. Une section intitulée Attitudes et propos inadaptés, indélicats, discourtois et pour certains susceptibles de recevoir une qualification pénales compose d’ailleurs ce rapport.

S’il en était besoin, elle illustre les crispations qui existent entre les professionnels du droit au travers de situations concrètes et les tensions dans l’exercice de chacune des fonctions qui se traduisent par des comportements inadaptés à l’audience.

Les travaux menés par le Conseil Supérieur de la Magistrature et par le Conseil consultatif conjoint de la déontologie de la relation magistrat-avocat doivent être salués pour leur sérieux, leur justesse et leur pragmatisme.

Ils favoriseront une évolution positive de la Justice et de ses acteurs dans l’intérêt des justiciables.

L’évolution des lois bioéthiques de 1994 à nos jours

Le droit bioéthique doit sa naissance à l’évolution des sciences de la vie et aux progrès de la recherche biomédicale.

A la fin des années 1970, le soin du malade s’est enrichi de connaissances nouvelles en matière de génétique, de thérapeutiques innovantes concernant les produits du corps humains et d’une compréhension meilleure de la souffrance du patient.

Grâce aux découvertes dans le domaine biologique, la médecine a notamment avancé dans le traitement de la stérilité de l’homme et de la femme en développant des techniques de procréation médicalement assistée.

Mais l’ensemble de ces transformations a très vite ouvert un débat sociétal et suscité de nombreuses questions éthiques.

L’avènement de la médecine prédictive est ainsi apparu aussi inquiétant autant que miraculeux.

Dans l’ombre de la fonction thérapeutique du progrès, la crainte de voir les chercheurs se muer an apprentis sorciers s’est faite jour.

Comme le souligne Dominique THOUVENIN « l’expérimentation médicale n’est plus seule en cause dans la mesure où le développement de technologies nouvelles n’a cessé de transformer la pratique médicale, modifiant les limites traditionnelles de la vie et de la mort » (Les lois n° 94-548 du 1er juillet 1994, n° 94-653 et n° 94-654 du 29 juillet 1994 ou comment construire un droit de la bioéthique – DALLOZ 1995. 149).

C’est dans ce contexte que le Décret n° 83-132 du 23 février 1983 a donné naissance au Comité consultatif national d’éthique pour les sciences de la vie et de la santé.

Son intervention a permis de préparer lentement le terrain du dépôt de trois projets de lois à l’Assemblée Nationale le 25 mars 1992.

  • Les lois bioéthiques de 1994 :

En 1994, à l’issue des débats parlementaires, le législateur a ainsi offert un cadre  légal à la bioéthique au terme de trois lois historiques :

  • La loi n° 94-548 du 1er juillet 1994 relative au traitement des données nominatives ayant pour fin la recherche dans le domaine de la santé et modifiant la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés,
  • La loi n° 94-653 du 29 juillet 1994 relative au respect du corps humain,
  • La loi n° 94-654 du 29 juillet 1994 relative au don et à l’utilisation des éléments et produits du corps humain, à l’assistance médicale à la procréation et au diagnostic prénatal.

 

Ces législations ont permis de poser le principe du respect du corps humain et ses trois  conséquences :

-Le corps humain est inviolable : Art. 16-1 du Code Civil

– Le corps humain est indisponible (hors du commerce) : Art. 16-1 du Code Civil

– Le juge est garant du respect du corps humain

 

Elles recouvrent, en outre, les règles d’organisation de secteurs d’activités médicales en plein développement tels que ceux de l’assistance médicale à la procréation ou de greffes ainsi que des dispositions relevant du domaine de la santé publique ou de la protection des personnes se prêtant à des recherches médicales.

Saisi par le Président de l’Assemblée Nationale ainsi que soixante députés, le Conseil Constitutionnel a eu à se prononcer sur la constitutionnalité des lois.

Il a ainsi retenu que « lesdites lois énoncent un ensemble de principes au nombre desquels figurent la primauté de la personne humaine, le respect de l’être humain dès le commencement de sa vie, l’inviolabilité, l’intégrité et l’absence de caractère patrimonial du corps humain ainsi que l’intégrité de l’espèce humaine ; que les principes ainsi affirmés tendent à assurer le respect du principe constitutionnel de sauvegarde de la dignité de la personne humaine ».

Conseil Constitutionnel 27 juillet 1994 n° 94-343-344

 

  • La loi du 6 aout 2004 :

Originellement, les lois dites bioéthiques de 1994 devaient faire l’objet d’une révision dans les cinq ans les suivants pour s’adapter aux évolutions scientifiques.

Mais ce n’est que dix ans après leur adoption que le législateur a procédé à leur actualisation, fort du travail du Comité consultatif national d’éthique.

 

La loi n°2004-800 relative à la bioéthique du 6 août 2004 est ainsi venue notamment compléter le Code de la Santé Publique en introduisant de nécessaires modifications concernant le don, le prélèvement et la greffe, à savoir :

–  Le prélèvement et la greffe constituent une priorité nationale (L 1231-1 A).

–  Le prélèvement d’organes est une activité médicale (L 1235-3).

–  Tous les établissements de santé, qu’ils soient autorisés à prélever ou non, participent à l’activité de prélèvement d’organes et de tissus en s’intégrant dans des réseaux de prélèvement (L 1233-1).

–  Dans le cadre du consentement présumé (L 1232-1) au prélèvement d’organes, le recueil de la volonté du défunt lorsque le médecin n’en a pas directement connaissance a évolué.

–  L’information des jeunes de 16 à 25 ans sur les modalités de consentement au don d’organes fait l’objet d’une attention particulière (L 1211-3).

–  Le cercle des donneurs vivants d’organes est étendu (L 1231-1).

–  La gestion du fichier des donneurs volontaires de cellules hématopoïétiques entre dans les missions de l’Agence de la biomédecine (L 1418-1).

Cette loi rappelle, tout d’abord, que l’individu est au cœur du système de santé en faisant du consentement la pierre angulaire de ce dernier

Cette loi transpose, par ailleurs, en partie la directive n° 98/44 du 6 juillet 1998 relative à la protection juridique des inventions biotechnologiques.

Cette loi autorise, enfin, limitativement et strictement les recherches et expérimentations sur l’embryon humain « lorsqu’elles sont susceptibles de permettre des progrès thérapeutiques majeurs et à la condition de ne pouvoir être poursuivies par une méthode alternative d’efficacité comparable, en l’état des connaissances scientifiques ».

 

  • La loi du 7 juillet 2011 :

Après 7 ans, la précédente législation a, de nouveau, été modifiée après avoir été précédée par de nombreux travaux, reculant l’échéance fixée au départ à 2009.

La Loi n° 2011-814 du 7 juillet 2011 relative à la bioéthique est l’aboutissement de la clause de révision inscrite dans la loi de 2004.

Son adoption a donné lieu à d’âpres débats sur l’accès à l’assistance médicale à la procréation, l’extension des dons entre vifs d’éléments et produits du corps humain, l’anonymat du don de gamètes, la gestation pour autrui mais également la recherche sur l’embryon humain.

Le rapport final des États généraux de la bioéthique du 1er février 2009 retient ainsi que pour les citoyens ayant répondu à la consultation, l’aide médicale à la procréation est une réponse médicale à l’infertilité naturelle qui doit conduire à en refuser l’accès aux femmes célibataires ou aux couples homosexuels.

 

Au final, la Loi du 7 juillet 2011  tend :

  • à apporter une nouvelle définition des modalités permettant d’autoriser les techniques d’assistance médicale à la procréation,
  • à supprimer la condition de deux ans de vie commune pour les partenaires et concubins, candidats à l’aide médicale à la procréation,
  • à limiter la mise en œuvre le nombre des embryons conçus et conservés dans le cadre de la fécondation in vitro,
  • à améliorer l’information qui doit être délivrée à la femme enceinte dans le cadre du diagnostic prénatal,
  • à élargir le cercle des donneurs vivants en matière de don d’organes et à autoriser le don croisé d’organes.

Comme en 2004, le texte comporte une clause de révision dans son article 47 qui dispose « la présente loi fait l’objet d’un nouvel examen d’ensemble par le Parlement dans un délai maximal de sept ans après son entrée en vigueur ».

L’échéance doit donc intervenir au cours de l’année 2018.

Ainsi, le processus de révision a officiellement été lancé avec l’ouverture par le Comité Consultatif national d’éthique des états généraux de la bioéthique, le 18 janvier 2018, autour des neufs thèmes suivants :

  • Cellules souches et recherche sur l’embryon
  • Examens génétiques et médecine génomique
  • Dons et transplantations d’organes
  • Neurosciences
  • Données de santé
  • Intelligence artificielle et robotisation
  • Santé et environnement
  • Procréation et société
  • Prise en charge de la fin de vie

La consultation nationale s’étant achevée le 30 avril dernier, le Comité consultatif national d’éthique rendra son rapport au mois juin avant que ne s’ouvrent les débats parlementaires de réexamen à l’automne prochain.

L’évolution du droit à l’oubli numérique

En octobre 2014, la protection des données personnelles et le droit à l’oubli numérique étaient évoqués dans ces pages au travers de la jurisprudence de la Cour de Justice de l’Union Européenne.

Deux ans plus tard, l’évolution initiée par la directive européenne du 24 octobre 1995 sur la protection des personnes physiques à l’égard des traitements de données à caractère personnel, se poursuit.

Dans un contexte où le rôle de l’Europe est au cœur du débat, cette situation est une parfaite illustration de l’intervention silencieuse de l’Union Européenne dans la résolution de nos problèmes quotidiens et de l’investissement des Etats membres dans des domaines aussi spécifiques que multiples.

Le Conseil d’Etat revient dans un arrêt du 24 février 2017 sur les obligations auxquelles sont tenus les moteurs de recherche dans le traitement de données à caractère personnel.

  • Le droit à l’oubli numérique, évolution d’une garantie jurisprudentielle :

C’est le 13 mai 2014 que la Cour de Justice de l’Union Européenne a reconnu l’existence du droit à l’oubli numérique.

CJUE 13 mai 2014 Affaire C-131/12

Depuis cette décision précédemment évoquée, l’exploitant d’un moteur de recherche, sur demande de l’intéressé et sous certaines conditions, tenu de supprimer de la liste des résultats obtenus à la suite d’une recherche effectuée par le nom d’une personne les liens vers des pages web publiées par des tiers et contenant des informations relatives à cette personne.

Ce droit est né de l’interprétation de la directive européenne 95/46/CE du 24 octobre 1995 relative à la protection des personnes physiques à l’égard des traitements de données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données.

Il implique l’analyse de l’équilibre entre l’intérêt du moteur de recherche les droits fondamentaux de la personne concernée.

Pour autant, sa portée est limitée à la liste des résultats car le déréférencement n’entraine pas l’effacement de l’information sur le site internet source dont le contenu original restera consultable sur le site.

Ce droit constitue néanmoins une avancée dans la protection des personnes qui n’est pas demeuré sans effet.

Forte de ce droit jurisprudentiel, la Loi du 7 octobre 2016 pour une république numérique a suivi cette évolution.

Ainsi elle a instauré un droit à l’autodétermination informationnelle consacré par son article 54 selon lequel « Toute personne dispose du droit de décider et de contrôler les usages qui sont faits des données à caractère personnel la concernant, dans les conditions fixées par la présente loi ».

Elle a élargi le cadre du droit à l’oubli numérique pour les mineurs aux données personnelles et non plus au seul déréférencement en disposant dans son article 40 :

« I. — Toute personne physique justifiant de son identité peut exiger du responsable d’un traitement que soient, selon les cas, rectifiées, complétées, mises à jour, verrouillées ou effacées les données à caractère personnel la concernant, qui sont inexactes, incomplètes, équivoques, périmées, ou dont la collecte, l’utilisation, la communication ou la conservation est interdite ».

En cela, la Loi du 7 octobre 2016 pour une république numérique a devancé une autre évolution.

Elle a, en effet, anticipé l’entrée en vigueur du règlement européen du 27 avril 2016 sur la protection des données personnelles qui sera applicable en mai 2018 dans tous les pays de l’Union Européenne.

Ce texte intègre le droit à l’effacement pour toute personne mineure ou majeure dans un article 17 au terme duquel il indique que celle-ci « a le droit d’obtenir du responsable du traitement l’effacement, dans les meilleurs délais, de données à caractère personnel la concernant et le responsable du traitement a l’obligation d’effacer ces données à caractère personnel dans les meilleurs délais ».

Mais malgré ces nombreuses avancées, le droit à l’oubli numérique tel que dégagé par la Cour de Justice de l’Union Européenne suscite encore plusieurs interrogations.

  • Le droit à l’oubli numérique, notice d’utilisation :

L’arrêt du 24 février 2017 témoigne des questionnements de le Conseil d’Etat connait dans la mise en œuvre  du droit au déréférencement.

Dans cette affaire, quatre personnes avaient demandé à la société Google le déréférencement de liens vers des contenus les concernant.

Face au refus du moteur de recherche, ils avaient alors saisi la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) de plaintes tendant au déréférencement de résultats obtenus à la suite de recherches effectuée à partir de leurs noms sur le moteur de recherche Google.

Cependant, la commission a clôturé ces plaintes sans y donner suite.

C’est ainsi que le Conseil d’État, saisi par les justiciables mécontents, a eu à connaitre des recours engagés contre les décisions de  la CNIL.

Ceux-ci concernaient des quatre situations différentes de déréférencement :

–        Un photomontage satirique mis en ligne, sous pseudonyme, le 18 février 2011 sur Youtube, la mettant en scène au côté du maire de la commune dont elle était directrice de cabinet et évoquant de manière explicite la relation intime qui les lierait ainsi que l’incidence de cette relation sur son propre parcours politique (Requête n°391000),

–        un article du quotidien Libération du 9 septembre 2008, reproduit sur le site du Centre contre les manipulations mentales (CCMM), relatif au suicide d’une adepte de l’Eglise de scientologie en décembre 2006 (Requête n°393769),

–        des articles, principalement de presse, relatifs à l’information judiciaire ouverte au mois de juin 1995 sur le financement du parti républicain (PR) dans le cadre de laquelle, avec plusieurs hommes d’affaires et personnalités politiques, il a été mis en examen, (Requête n°399999),

–        et deux articles publiés dans Nice Matin et le Figaro rendant compte de l’audience correctionnelle au cours de laquelle il a été condamné à une peine de sept ans d’emprisonnement et à une peine complémentaire de dix ans de suivi socio-judiciaire pour des faits d’agressions sexuelles sur mineurs de quinze ans (Requête n°401258).

Le Conseil retient que « lorsque les conditions (…) sont satisfaites, l’exploitant d’un moteur de recherche mettant en œuvre son traitement en France doit faire droit aux demandes qui lui sont présentées tendant au déréférencement de liens, c’est-à-dire à la suppression de la liste de résultats, affichée à la suite d’une recherche effectuée à partir du nom du demandeur, des liens vers des pages web, publiées par des tiers et contenant des informations le concernant ».

Mais la mise en œuvre du droit au déréférencement soulève ici plusieurs difficultés sérieuses relatives à la portée de la directive européenne  du 24 octobre 1995 sur la protection des personnes physiques à l’égard des traitements de données à caractère personnel.

La question se pose notamment de savoir si l’interdiction faite aux responsables de traitement de traiter certaines données serait applicable à l’exploitant d’un moteur de recherche en tant que responsable du traitement.

Avant de statuer sur ces affaires, le Conseil d’État a donc décidé de saisir cette cour de plusieurs questions préjudicielles concernent les obligations de déréférencement pesant sur l’exploitant d’un moteur de recherche dans l’hypothèse où les pages web qu’il traite contiennent des informations sensibles dont la collecte et le traitement est illicite ou très encadré.

Conseil d’État 24 février 2017 Décision n° 391000

Il faudra attendre encore quelques mois avant que les contours du droit à l’oubli numérique et sa mise en œuvre soient précisément dessinés.

D’ici-là, le règlement européen du 27 avril 2016 sera peut-être entré en vigueur : cette réforme globale permettra à l’Europe de s’adapter aux nouvelles réalités du numérique grâce à une législation unique.

2017, le Divorce par consentement mutuel sans recours à une homologation du juge

Au printemps dernier, les discussions sur le projet de loi sur la justice du XXIe siècle a fait parler de lui suite à la réforme envisagée du divorce par consentement mutuel dit amiable.

Le Ministre de la Justice, Jean-Jacques URVOAS déposait le 4 mai 2016, en toute discrétion, un amendement N°CL186 tendant à déjudiciariser la dissolution du mariage auprès de la commission des lois de ladite assemblée.

Le 12 octobre dernier, la loi a été adoptée à l’issue de longs débats : elle permet ainsi au divorce par consentement mutuel de prendre une nouvelle forme sans juge, ni juridiction.

Bien que le texte ne soit pas encore promulgué, la réforme entrera en vigueur le 1er janvier 2017.

Dès cette date, les pratiques juridiques s’en trouveront modifiées au bénéfice du justiciable qui n’aura plus à souffrir des délais d’audiencement du Juge aux Affaires Familiales.

Mais comment s’organisera donc cette procédure innovante dont l’objectif est de simplifier le divorce amiable pour des époux et de libérer le Juge de la charge de l’homologation de leurs accords ?

  • Le nouveau formalisme du divorce par consentement mutuel :

L’article 50 de Loi de modernisation de la justice du XXIe siècle pose le principe que « les époux peuvent consentir mutuellement à leur divorce par acte sous signature privée contresigné par avocats, déposé au rang des minutes d’un notaire ».

A compter du 1er janvier 2017, la convention de divorce ne sera donc plus soumise à l’homologation du Juge aux Affaires Familiales : elle échappera au contrôle juridictionnel.

Elle sera cependant encadrée par l’intervention du notaire qui l’enregistrera afin de lui donner date certaine et force exécutoire avant qu’il ne soit procédé aux démarches de transcription sur les actes d’état civil.

Mais le Notaire ne sera pas rédacteur de l’acte mais simplement réceptionnaire de celui-ci, déposé au rang de ses minutes.

Sa  prestation devrait être soumise à un droit fixe s’élevant à la somme de 50,00 euros.

Le Notaire sera également en charge du contrôle du respect des exigences formelles et de la parfaite application du délai de réflexion imposé aux parties par l’article 229-4 du Code Civil.

La convention de divorce doit, en effet, comporter à peine de nullité un certain nombre de mention expressément visées :  les nom, prénoms, profession, résidence, nationalité, date et lieu de naissance de chacun des époux, la date et le lieu de mariage, ainsi que les mêmes indications, le cas échéant, pour chacun de leurs enfants.

L’accord doit aussi prévoir les modalités du règlement complet des effets du divorce et notamment l’éventuel versement d’une prestation compensatoire à l’un ou l’autre des époux.

La convention de divorce déjudiciarisé ne se différencie guère de celle du divorce judiciaire puisque chaque question que suscite la dissolution du mariage y sera abordée et réglée par l’accord des parties.

Comme c’est le cas actuellement, la convention prévoira donc l’état liquidatif du régime matrimonial : à l’issue des discussions et des paraphes, le sort de l’ensemble des biens du couple sera définitivement fixé.

Quant à la situation des enfants, elle sera également  déterminée tant sur les modalités de résidence et/ou de l’exercice du droit de visite et d’hébergement des enfants que sur la fixation de la pension alimentaire.

Rappelons qu’en application de l’article 373-2-9 du Code Civil, le principe de la résidence des enfants mineurs en cas de séparation est celui de la résidence alternée.

  • Le rôle de l’avocat dans le nouveau divorce par consentement mutuel :

Privé de juge, le divorce par consentement mutuel par acte sous signature privée est accompagné par deux auxiliaires de justice.

L’Avocat qui jusqu’alors était metteur en scène de la procédure de divorce par consentement mutuel, en devient  également l’auteur et le script.

Tout au long du processus, il sera en charge d’accompagner, d’informer et de conseiller les époux dans la mise en œuvre de leur volonté de divorcer.

Mais si aujourd’hui  les époux entendent divorcer par consentement mutuel et font établir une convention en ce sens, ils peuvent n’être représentés que par un seul et unique avocat.

Demain, un tel choix ne sera bientôt plus possible.

A compter du 1er janvier 2017, le nouvel 229-1 du Code Civil imposera à chacun des conjoints d’être assisté par un avocat, son avocat.

La simplification de la procédure de divorce ni gracieuse ni contentieuse ne doit pas faire oublier que chaque effets de la  rupture est discuté avant d’être consentie.

Les intérêts de chacun des époux doivent donc protégés pour permettre aux échanges de se dérouler sans risque de pression.

Ainsi, lorsque les parties se seront accordées, les deux avocats seront chargés de procéder à la rédaction de la convention de divorce qui  prendra la forme d’un acte sous seing privé contresigné par eux.

L’article 1374 du Code Civil issu de la récente ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 dispose « l’acte sous signature privée contresigné par les avocats de chacune des parties (…)  fait foi de l’écriture et de la signature des parties, tant à leur égard qu’à celui de leurs héritiers ou ayants cause ».

Une fois la rédaction achevée, l’avocat adressera à son client le projet de convention par lettre recommandée avec accusé de réception.

De cette diligence, naitra le délai de réflexion imposé aux parties par l’article 229-4 du Code Civil prescrit à peine de nullité : cette démarche est aussi indispensable qu’elle est fortement sanctionnée.

Elle va permettre aux époux de disposer de quinze jours à compter de la réception de la convention pour la relire, l’étudier, l’appréhender, parfois la digérer et en accepter les termes avec sérénité  et sans empressement.

Ce n’est qu’à l’expiration de ce délai que les conjoints pourront signer le dernier acte de leur union, celui qui y met fin.

  • Les cas d’exclusions du nouveau divorce par consentement mutuel :

Malgré la simplification, le divorce par consentement mutuel par acte sous signature privée contresigné par avocats n’est  pas à la portée de tous les couples qui se quittent : il ne peut donc  intervenir dans toutes les situations.

Dans sa rédaction,  le nouvel article 229-2 du Code Civil prévoit deux cas dans lesquels le recours au juge demeure un principe immuable :

Tout d’abord, tel est le cas lorsque le mineur, informé par ses parents de son droit à être entendu par le juge demande son audition par celui-ci.

Selon l’article 388-1 du Code Civil, « dans toute procédure le concernant, le mineur capable de discernement peut, sans préjudice des dispositions prévoyant son intervention ou son consentement, être entendu par le juge ou, lorsque son intérêt le commande, par la personne désignée par le juge à cet effet. Cette audition est de droit lorsque le mineur en fait la demande ».

Le législateur a placé sa confiance dans les parents pour assurer l’exécution de l’obligation d’information du mineur de cette prérogative, et non plus dans le juge.

La convention de divorce devra porter mention que cette information a été donnée et que l’enfant ne souhaite pas faire usage de cette faculté.

Lors des débats parlementaires, le Défenseur des Droits n’avait pourtant pas manqué de souligner l’absence de garanties assurant l’effectivité du droit pour l’enfant à être entendu par le juge.

Mais malgré les critiques que l’amendement du 4 mai 2016 suscitait, le divorce par consentement mutuel par acte sous signature privée n’exclura pas les couples dont l’union a donné naissance à des enfants.

Pour autant, l’audition du mineur capable de discernement, indicateur d’un éventuel mal être de l’enfant, imposera un retour à la dissolution judiciaire du mariage bien qu’amiable.

 

Ensuite, tel est le cas lorsque l’un des époux, assisté dans son quotidien et/ou sa gestion,  se trouve placé sous un régime de protection.

Il convient de préciser qu’en application de l’article 249-4 du Code Civil, « lorsque l’un des époux se trouve placé sous l’un des régimes de protection prévus au chapitre II du titre XI du présent livre, aucune demande en divorce par consentement mutuel ou pour acceptation du principe de la rupture du mariage ne peut être présentée ».

Cette cause d’exclusion concernant les majeurs protégés ne pouvait dès lors que s’imposer.

Dans tous les cas, il apparait que l’une et l’autre de ces situations répond au principe de protection des personnes vulnérables.

Qu’il s’agisse des mineurs frappés d’incapacité ou des incapables majeurs placés sous sauvegarde de justice, curatelle ou tutelle, le divorce de leurs parents ou le leur sera judiciaire ou ne sera pas.

Quant aux époux qui s’accordent en cours de procédure sur la dissolution du mariage et ses effets, le législateur a prévu une passerelle pour sortir du palais.

Comme pour le divorce par consentement mutuel judiciaire, les époux peuvent, à tout moment divorcer par consentement mutuel par acte sous signature privée contresigné par avocats, déposé au rang des minutes d’un notaire.

Dans quelques semaines, la réforme entrera en application et dans quelques mois, le divorce amiable sans juge sera le principe

Il convient de souligner que le Législateur a répondu par la simplification à une demande des couples fondé sur le constat statistique qu’en 2010, 54 % des divorces prononcés en France étaient des consentements mutuels.

Un mandat d’arrêt européen pour une question prioritaire de constitutionnalité et une question préjudicielle

Le 12/04/13

Les articles de ce blog reviennent régulièrement sur les interactions entre le droit français et le droit européen ainsi que leur nécessaire complémentarité dans l’intérêt du justiciable.

L’arrêt récent rendu par le Conseil Constitutionnel le 4 avril dernier est une nouvelle illustration de cette cohabitation des normes dans un domaine de la coopération policière et judiciaire en matière pénale.

Il porte sur le mandat d’arrêt européen défini par l’article 695-11 de notre Code de Procédure Pénale comme la « décision judiciaire émise par un Etat membre de l’Union européenne, appelé Etat membre d’émission, en vue de l’arrestation et de la remise par un autre Etat membre, appelé Etat membre d’exécution, d’une personne recherchée pour l’exercice de poursuites pénales ou pour l’exécution d’une peine ou d’une mesure de sûreté privative de liberté ».

Cette procédure résulte de la décision-cadre du Conseil de l’Union européenne du 13 juin 2002 transposé en droit français par la Loi n° 2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité.

Par principe, le mandat d’arrêt européen dans l’ensemble des territoires des États membres de l’Union européenne.

La France a déclaré, cependant, que ce régime n’était pas applicable aux demandes de remise reçues par la France concernant des faits commis avant le 1er novembre 1993, date d’entrée en vigueur du Traité de Maastricht.

Ainsi les faits commis avant cette date relève de l’extradition tandis que ceux commis après ce, sont l’objet de la procédure du mandat d’arrêt européen.

L’exécution des mandats d’arrêt européens étrangers émis les pays de l’Union est confiée dans notre droit au parquet général et à la chambre de l’instruction.

Ainsi lorsqu’une personne frappée d’un tel mandat et appréhendée sur le territoire français, elle est présentée au procureur général sous quarante huit heures.

Celui-ci l’avise alors de l’existence et du contenu du mandat ainsi que de la faculté de consentir ou de s’opposer à sa remise à l’Etat de l’Union Européenne en attente de l’exécution du mandat.

Le procureur général peut ordonner son incarcération à défaut de garanties de représentation suffisantes.

Puis il saisit sans délai la Chambre de l’Instruction de la procédure afin qu’elle se prononce sur la remise à l’Etat de l’Union Européenne en attente et exécution du mandat.

La personne recherchée est alors convoquée à une audience publique qui se tient dans un délai de cinq jours ouvrables à compter de la date de sa présentation au procureur général.

S’il est fait droit à sa remise, elle sera transférée aux autorités étrangères dans les 10 jours suivant la date de la décision définitive de la chambre de l’instruction.

Mais si la personne recherchée s’est opposée à sa remise lors du débat contradictoire, elle peut former un pourvoi en cassation à l’encontre de la décision l’autorisant son transfert dans un délai de trois jours francs.

A titre particulier, la Chambre de l’Instruction est également compétente dans le cadre de la poursuite d’autres infractions et de la remise à un autre État membre.

En application de l’article 695-46 du Code de Procédure Pénale, elle peut ainsi être saisie «de toute demande émanant des autorités compétentes de l’Etat membre d’émission en vue de consentir à des poursuites ou à la mise à exécution d’une peine ou d’une mesure de sûreté prononcées pour d’autres infractions que celles ayant motivé la remise et commises antérieurement à celle-ci ».

Elle peut, par ailleurs, être amenée à statuer, « après la remise de la personne recherchée, sur toute demande des autorités compétentes de l’Etat membre d’émission en vue de consentir à la remise de la personne recherchée à un autre Etat membre en vue de l’exercice de poursuites ou de l’exécution d’une peine ou d’une mesure de sûreté privatives de liberté pour un fait quelconque antérieur à la remise et différent de l’infraction qui a motivé cette mesure ».

Or dans ces deux cas, ni la législation française, ni relevé la décision-cadre du 13 juin 2002 ne prévoit de recours contre la décision de la Chambre de l’Instruction.

C’est donc cette absence de recours qui est à l’origine de l’arrêt du Conseil Constitutionnel en date du 4 avril 2013.

Saisi le 27 février 2013 sur question prioritaire de constitutionnalité par la Cour de Cassation, le Conseil a décidé de s’en remettre à la Cour de justice de l’Union Européenne.

Au terme de leur analyse, les sages ont relevé la décision-cadre du 13 juin 2002 transposée en droit français par la Loi du 9 mars 2004 ne comportait pas de dispositions relatives à un recours contre la décision tendant à étendre les effets du mandat d’arrêt européen ou d’autoriser la remise de la personne à un État tiers.

Le Conseil Constitutionnel s’est, de ce fait, retrouvé dans l’impossibilité de se déterminera sur la conformité de l’article 695-46 du Code de Procédure Pénale à la Constitution.

C’est ainsi qu’il a transmis une question préjudicielle pour la première fois à la Haute Cour afin d’obtenir son éclairage sur l’absence de recours de la décision de la Chambre de l’Instruction prévue à l’article 695-46 du Code de Procédure Pénale.

Conseil Constitutionnel 4 avril 2013 n° 2013-314P QPC 

Il appartient désormais à la Cour de Justice de l’Union Européenne d’interpréter les dispositions de la décision-cadre et de se prononcer sur l’éventuelle atteinte portée au principe d’égalité devant la justice et au droit à un recours juridictionnel effectif.

La procédure de renvoi préjudiciel a permis aux juges français d’interroger les juges européens sur l’application du droit dans l’ensemble de l’Union européenne aux fins d’uniformité.

Mais malgré le recours à la procédure d’urgence devant la Cour de Justice de l’Union Européenne dans l’attente, la personne soumise au mandat d’arrêt européen est détenue…et la décision suspendue.

Petite évolution du « plaider-coupable », grande révolution de l’instance correctionnelle

Le 31/03/12

De tous les domaines juridiques, le Droit Pénal est sans doute celui qui a subi les plus grandes évolutions ces vingt dernières années.

La multiplication des articles du Code de Procédure Pénale est là pour en témoigner.

Aussi les formes du procès classiquement connues en la matière ont été modifiées par soucis d’adaptation sociale, de convenance politique ou en réponse à des événements dramatiques.

Aujourd’hui, il n’est donc plus question uniquement d’instances correctionnelles sur convocation , mais d’alternatives aux poursuites ou de procédures simplifiées.

Le langage du juriste s’est enrichi des termes ordonnance pénale, comparution immédiate, composition pénale et comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité.

Cette dernière formule née de la Loi n° 2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité vise à écarter le débat sur le fond du dossier et à privilégier une sanction acceptée sur proposition du Procureur de la République.

Jusqu’à récemment, le « plaider-coupable » n’était accessible qu’aux prévenus poursuivis pour des délits punis à titre principal d’une peine d’amende ou d’une peine d’emprisonnement d’une durée inférieure ou égale à cinq ans.

La Loi n°2011-1862 du 13 décembre 2011 relative à la répartition des contentieux et à l’allègement de certaines procédures juridictionnelles a élargi ce cadre.

Désormais l’article 495-7 du Code de Procédure Pénale dispose :

« Pour tous les délits, à l’exception de ceux mentionnés à l’article 495-16 et des délits d’atteintes volontaires et involontaires à l’intégrité des personnes et d’agressions sexuelles prévus aux articles 222-9 à 222-31-2 du code pénal lorsqu’ils sont punis d’une peine d’emprisonnement d’une durée supérieure à cinq ans, le procureur de la République peut, d’office ou à la demande de l’intéressé ou de son avocat, recourir à la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité conformément aux dispositions de la présente section à l’égard de toute personne convoquée à cette fin ou déférée devant lui en application de l’article 393 du présent code, lorsque cette personne reconnaît les faits qui lui sont reprochés ».

Cette réforme soulève de nombreuses interrogations qu’il convient de présenter en même temps que la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité.

Du côté des magistrats, le constat parait simple à première vue.

Le législateur a souhaité faire primer la rapidité du traitement judiciaire afin de réduire les rôles (liste des affaires audiencées) des Tribunaux Correctionnels.

Le Procureur peut donc traiter tous les délits par le « plaider-coupable » à l’exception des délits de presse, des homicides involontaires, des délits politiques, des délits relevant de poursuites spéciales et des atteintes volontaires et involontaires à l’intégrité des personnes et agressions sexuelles les plus graves.

Si les faits sont reconnus et si les antécédents judiciaires sont limités, les dossiers délictuels peuvent donc être orientés vers cette procédure.

Mais la simplicité mise en avant pour valoriser la forme de cette instance créée nécessairement un déséquilibre.

Les pouvoirs des magistrats du parquet ont en effet été augmentés au détriment de ceux des magistrats du siège.

C’est ainsi que le Procureur la République va proposer une peine au prévenu qui, si elle est acceptée, devra être homologuée à l’audience publique se tenant dans le prolongement.

Le juge ne pourra alors que valider ou rejeter la proposition sans autre pouvoir d’appréciation ni sur le fond, ni sur la forme.

Ce système entraîne donc une nouvelle définition des rôles de chaque magistrat dans une procédure qui jusqu’alors ne s’appliquait qu’à certains délits.

On peut justement se demander si la rapidité rimera avec célérité à l’avenir.

Du côté des avocats, c’est la place du conseil qui s’inscrit dans une réflexion plus large de la fonction d’auxiliaire de justice.

Le prévenu ne peut renoncer à son droit d’être assisté par un avocat dont la présence est obligatoire lors de la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité.

Mais comme il l’a été précisé précédemment, l’aveux procédural et la culpabilité admise écartent toute discussion sur le fond du dossier.

Seul demeure donc le débat sur la peine et sa personnalisation.

Dans ce cadre, l’avocat conseille utilement son client sur l’opportunité d’accepter la procédure de « plaider-coupable » ainsi que sur la proposition du Procureur de la République au regard des éléments du dossier.

Il intervient aussi au travers de ses observations pour permettre une parfaite adaptation de la sanction à la situation du prévenu.

Mais le rôle de contrôle qui lui est dévolu par les articles 495-7 et suivants du Code de Procédure Pénale, ne s’exerce qu’au bénéfice de son client.

L’avocat reste le défenseur des libertés individuels et non le garant du respect de la procédure et sa légalité.

Ainsi son assistance ne saurait gommer les irrégularités du dossier, ni cautionner les choix du parquet comme c’est le cas pour sa présence en garde à vue.

D’autant que lorsqu’un débat sur les intérêts civils vient à s’ouvrir devant le juge de l’homologation, l’avocat retrouve toute sa latitude d’action, à condition toutefois que la juridiction soit enclin à accorder provision, expertise et renvoi sur intérêts civils.

Du côté des justiciables, d’autres problèmes se posent encore sur le plan pratique dans cette procédure qui peut ne pas apparaître aussi simplifiée.

Pour la partie civile, la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité ne modifie aucunement son droit à réparation qu’elle peut faire valoir devant le juge homologateur.

Si elle n’a pu exercer ce droit, elle pourra demander au Procureur de la République de faire citer le prévenu à une audience correctionnelle statuant sur les seuls intérêts civils.

Le prévenu quant à lui se trouve dans une situation différente de celle que l’on connaît devant le Tribunal Correctionnel.

Tout d’abord, il n’a pas le choix de se défendre seul dans cette instance, un avocat choisi ou commis lui étant obligatoirement dévolu.

L’article 495-8 du Code de Procédure Pénale impose ainsi la présence du conseil lors des déclarations et de la proposition de peine et précise que « l’intéressé étant informé que les frais seront à sa charge sauf s’il remplit les conditions d’accès à l’aide juridictionnelle ».

L’économie de l’avocat est donc interdite dans le cadre des comparutions sur reconnaissance préalable de culpabilité.

Ensuite, les aménagements de peine ab initio concernant les peines inférieures ou égales à un an d’emprisonnement sont difficilement compatibles avec le système du « plaider-coupable ».

Le Juge d’Application des Peines aura donc en charge de convoquer le condamné qui ne sera fixé sur une éventuelle semi-liberté ou un placement sous surveillance électronique qu’à cette occasion.

Dans cet intervalle, l’attente laissera place à quelques doutes.

Ce tableau des comparutions sur reconnaissance préalable de culpabilité et leur nouvelle organisation au regard de la Loi n°2011-1862 du 13 décembre 2011 ne pourra se dessiner plus précisément et dans toutes ses nuances qu’avec l’usage et la pratique.

En attendant, il appelle une grande vigilance dans l’exercice de la profession d’avocat et ouvre une discussion sur l’avenir du traitement des délits.

En effet, peut-on encore parler d’égalité des armes lorsque le Procureur de la République conserve entre ses mains l’opportunité des poursuites et l’opportunité des procédures ?

La présomption d’innocence, garantie pénale et civile

Le 09/10/11

Depuis quelques jours, les bruissements de journaux et les échos des reportages ont porté les regards sur les institutions policières lyonnaises.

Entre information et médiatisation, c’est l’occasion de rappeler que l’exposition des personnes jetées au coeur de l’actualité judiciaire doit toujours être maniée avec prudence.

Même si « l’innocence a parfois l’apparence du crime»*, le respect du à sa présomption s’impose quelque soit les circonstances et les acteurs des événements qui sont sous le feu des médias.

Selon ce principe, seule la preuve de la commission d’une infraction et l’abolition du doute font naître la certitude de la culpabilité.

A défaut, celui dont l’innocence est sauve, bénéficiera d’un acquittement ou d’une relaxe.

Aussi, la rumeur publique et l’encre des journaux ne peuvent faire oublier que le mis en cause ne doit pas être présenté comme coupable par les autorités jusqu’à sa condamnation définitive.

Cette conséquence directe de la présomption d’innocence a été soulignée par la Cour Européenne des Droits de l’Homme il y a quelques mois.

CEDH 24 mai 2011 Requête 53466/07 Konstas c/ Grèce 

Dans l’air du temps, le sujet du jour revient donc sur ce principe fondamental du Droit Pénal à valeur constitutionnelle qui constitue un droit subjectif garanti et protégé par le Code Civil.

Un principe fondamental du Droit Pénal à valeur constitutionnelle : 

On doit la première référence à la présomption d’innocence dans notre droit actuel à l’article 9 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789 qui proclame :

« Tout homme étant présumé innocent jusqu’à ce qu’il ait été déclaré coupable, s’il est jugé indispensable de l’arrêter, toute rigueur qui ne serait pas nécessaire pour s’assurer de sa personne, doit être sévèrement réprimée par la Loi ».

Cependant, ce ne sera qu’en 1981 que le Conseil Constitutionnel reconnaîtra sa valeur constitutionnelle lors du contrôle de constitutionnalité de la loi renforçant la sécurité et protégeant la liberté des personnes

Conseil Constitutionnel 20 janvier 1981 n° 80-127 

Malgré ces quelques traces, il faudra attendre la loi no 93-2 du 4 janvier 1993 portant réforme de la procédure pénale pour que ce principe fondamental apparaisse explicitement dans le Code de Procédure Pénale au travers de ses articles 177-1 et 212-1.

Ces dispositions consacrent la présomption d’innocence au travers de sa mise en application lorsque le juge instruction ou la Chambre de l’accusation rendent une ordonnance de non-lieu à l’issue des investigations.

Il s’en suit la publication intégrale ou partielle de cette décision ou l’insertion d’un communiqué informant le public des motifs et du dispositif de celle-ci, dans un ou plusieurs journaux, écrits périodiques ou services de communication audiovisuelle désignés.

Sept ans plus tard, la Loi n°2000-516 du 15 juin 2000 renforçant la protection de la présomption d’innocence et les droits des victimes intègrera finalement ce principe dans un article préliminaire (III) disposant :

« Toute personne suspectée ou poursuivie est présumée innocente tant que sa culpabilité n’a pas été établie. Les atteintes à sa présomption d’innocence sont prévenues, réparées et réprimées dans les conditions prévues par la loi».

Dans le même temps, celui-ci fera son apparition dans le serment prêté par les jurés des Cours d’Assises promettant de se « rappeler que l’accusé est présumé innocent et que le doute doit lui profiter » au terme de l’article 304 du même code.

Ces quelques mots rappellent que c’est la preuve de la culpabilité qui annihile l’innocence et écarte la présomption dans le même temps que le doute.

Mais il arrive que la charge de la preuve soit renversée.

Ainsi, lorsque les procès-verbaux constatent les infractions à la réglementation sur le stationnement payant des véhicules qui font foi jusqu’à preuve contraire, c’est au prévenu qu’il revient d’apporter la preuve du fonctionnement défectueux de l’appareil horodateur.

Cass. Crim. 15 février 2000 Pourvoi 99-83971 

En même temps qu’elle a entraîné une protection accrue de la présomption d’innocence, la légalisation de 2000 a amené une reconnaissance du droit à indemnisation.

La réparation des frais non payés par l’Etat et exposés par le mis en cause lorsqu’une juridiction a prononcé un non-lieu, une relaxe ou un acquittement à son encontre est donc évoquée à l’article 800-2 du Code de Procédure Pénale.

En 2011, la Loi n°2011-392 relative à la garde à vue viendra encore enrichir le dispositif en appliquant le principe aux mesures privatives de libertés « strictement limitées aux nécessités de la procédure ».

Un droit subjectif garanti et protégé par le Code Civil : 

Avant qu’elle n’apparaisse dans le Code de Procédure Pénale, le Code Civil a fait de la présomption d’innocence un droit subjectif garanti et protégé par son article 9-1.

La Loi n° 93-2 du 4 janvier 1993 portant réforme de la procédure pénale a ainsi affirmé que :

« Chacun a droit au respect de la présomption d’innocence.

Lorsqu’une personne est, avant toute condamnation, présentée publiquement comme étant coupable de faits faisant l’objet d’une enquête ou d’une instruction judiciaire, le juge peut, même en référé, sans préjudice de la réparation du dommage subi, prescrire toutes mesures, telles que l’insertion d’une rectification ou la diffusion d’un communiqué, aux fins de faire cesser l’atteinte à la présomption d’innocence, et ce aux frais de la personne, physique ou morale, responsable de cette atteinte ».

Par ailleurs, elle a complété et ajouté des dispositions aux Lois du 29 juillet 1881 sur le Droit de la Presse et du 29 juillet 1982 sur la communication audiovisuelle.

Ces modifications ont permis d’organiser les moyens de réprimer les atteintes au principe et d’indemniser ses conséquences dommageables.

Le mis en cause peut de ce fait protéger sa réputation au travers de la garantie de son droit à l’image notamment illustrée par l’article 803 du Code de Procédure Pénale précisant que :

« Nul ne peut être soumis au port des menottes ou des entraves que s’il est considéré soit comme dangereux pour autrui ou pour lui-même, soit comme susceptible de tenter de prendre la fuite.

Dans ces deux hypothèses, toutes mesures utiles doivent être prises, dans les conditions compatibles avec les exigences de sécurité, pour éviter qu’une personne menottée ou entravée soit photographiée ou fasse l’objet d’un enregistrement audiovisuel ».

Mais la mise en oeuvre de cette protection est limitée à une obligation de moyens, c’est-à-dire une promesse non une réalisation.

Aussi en cas de méconnaissance de la présomption d’innocence, le mis en cause bénéficiera d’un droit à réparation pécuniaire ou en nature.

Il convient de préciser que l’indemnisation fondée sur l’article 9-1 du Code Civil est indépendante de la responsabilité délictuelle.

De ce fait, une diffamation relevant de la Loi du 29 juillet 1881 ne peut être sanctionnée sur le fondement de l’article1382 du Code Civil

Cass. Civ 1ère. 6 mai 2010 Pourvoi 09-67624 

Par ailleurs, le respect du principe doit être concilié avec le droit à l’information et la liberté de la presse.

C’est ainsi que la Cour de Cassation a eu l’occasion de préciser que l’atteinte à la présomption d’innocence consiste à présenter publiquement comme coupable, avant condamnation, une personne poursuivie pénalement.

Un article suggérant la culpabilité d’une personne mise en examen pour meurtre et ne contenant pas de conclusions définitives manifestant un préjugé tenant pour acquise la culpabilité ne constitue pas une telle atteinte.

Cass. Civ 1ère. 19 octobre 1999 Pourvoi 97-15802 

A ces garanties nationales, il faut bien sûr ajouter les conventions internationales qui proclament et protégent la présomption d’innocence.

Dans son article 11, la Déclaration universelle des Droits de l’Homme de 1948 énonce ainsi que « toute personne accusée d’un acte délictueux est présumée innocente jusqu’à ce que sa culpabilité ait été légalement établie au cours d’un procès public où toutes les garanties nécessaires à la défense lui auront été assurées ».

Plus tard, la Cour Européenne des Droits de l’Homme en a déduit que la personne poursuivie n’a pas à collaborer à la recherche de la vérité, qu’elle peut donc se taire et ne pas contribuer à sa propre incrimination.

CEDH 25 février 1933 Requête no10588/83 Funke c/ France 

Il en découlera le droit au silence applicable à la mesure de garde à vue et lors de l’interrogatoire de première comparution devant le Juge d’Instruction.

*Louis VIGEE

Regard sur la loi du 10 août 2011 : la réforme de la justice des mineurs (Deuxième Partie)

Le 25/09/11

La présentation de La loi n°2011-939 du 10 août 2011 se poursuit sous la plume de Clémentine GIBOUDEAU .

Après l’accroissement de la participation des citoyens à la justice, la deuxième partie de cet article vous propose de se pencher sur la réforme de la justice des mineurs. 

II- La réforme de la justice pénale des mineurs : vers une déspécialisation ? 

A- Un objectif de répression : 

Alors même qu’une réforme d’ensemble est à l’étude depuis plusieurs années, l’Ordonnance du 2 février 1945 relative à l’enfance délinquante se trouve modifiée en profondeur par l’introduction de diverses dispositions qui ébranlent les principes fondamentaux de la justice pénale des mineurs.

Les plus généraux d’entre eux sont le principe de l’atténuation de la responsabilité pénale des mineurs et la recherche de leur relèvement éducatif et moral.

Ces principes, qui fondent l’existence même de la spécificité de la justice des mineurs, ont été élevés au rang des principes fondamentaux reconnus par les lois de la République par le Conseil Constitutionnel le 29 août 2002.

Or, la principale innovation mise en place par la loi du 10 août 2011 est la création d’un Tribunal Correctionnel pour mineurs (TCM), formation spécialisée du Tribunal Correctionnel composé d’un juge des enfants et de deux autres magistrats.

Le TCM est compétent sous les conditions cumulatives suivantes :

– pour les mineurs âgés de plus de 16 ans, ainsi que leurs co-auteurs et complices majeurs

– pour les délits punis d’une peine d’emprisonnement égale ou supérieure à 3 ans

– commis en état de récidive légale

Cette nouvelle juridiction vient bouleverser les fondements de la justice pénale des mineurs, notamment sur deux points :

 la dérogation à la majorité pénale :

La Convention internationale des droits de l’enfant de 1989, ratifiée par la France, prévoit pourtant que les enfants doivent bénéficier d’une justice spécifique jusqu’à 18 ans.

– une atteinte à la spécialisation des juridictions et des magistrats :

L’Ordonnance du 2 février 1945 prévoit cependant que les juridictions de droit commun ne sont pas compétentes, les mineurs ne pouvant être jugés que devant des tribunaux pour enfants ou des cours d’assises des mineurs.

La composition de ce Tribunal correctionnel pour mineurs ne semble pas garantir cette spécialisation car un seul juge des enfants siège aux côtés de deux magistrats non spécialisés.

Cela est d’autant plus vrai pour les délits relevant du Tribunal Correctionnel dans sa formation citoyenne, pour lesquels deux citoyens-assesseurs siègeront au côté de ces magistrats…

On peut alors craindre une déspécialisation de la justice des mineurs, glissant progressivement et dangereusement vers celle des majeurs.

Pour autant, le Conseil Constitutionnel, malgré des décisions précédentes contraires, a validé ces dispositions, sous réserve que la phase d’instruction par le juge des enfants soit préservée.

B- La question de la personnalisation de la peine du mineur renforcée : 

Dans la lignée de la Loi n° 2007-1198 du 10 août 2007 renforçant la lutte contre la récidive des majeurs et des mineurs et la Loi n° 2011-267 du 14 mars 2011 d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure (1), cette réforme affirme un objectif de répression.

Sous couvert d’une politique de prévention de la récidive, la création du Tribunal Correctionnel pour Mineurs traduit, on l’aura compris, une volonté de répression accrue de la délinquance juvénile.

On précisera d’ailleurs que le Conseil Constitutionnel a validé la possibilité de recourir à la « présentation immédiate » devant le Tribunal Pour Enfants, procédure fortement comparable à la comparution immédiate des majeurs.

Ce mode de saisine remet évidemment en cause la phase préparatoire au jugement, pourtant fondamental dans la justice des mineurs, pour laquelle la primauté de l’éducatif est la règle.

Saluons toutefois la censure de l’assignation à résidence avec surveillance électronique des mineurs de 13 à 16 ans, jugée, à raison, trop sévère en tant qu’alternative au contrôle judiciaire.

Mais le principe de la personnalisation de la peine reste bien présent puisque certaines dispositions permettent d’apporter une meilleure connaissance du mineur, de son histoire et de sa personnalité.

Cette découverte passe d’abord par la mise en place d’un dossier unique des délinquants mineurs.

Celui-ci regroupera des informations concernant leur personnalité, leur situation sociale et familiale.

Placé sous le contrôle du procureur de la République et du juge des enfants, son accès par les parties restera relativement ouvert.

Bien que certaines questions se posent en termes de divulgations d’informations parfois sensibles et confidentielles, ce dossier permettra d’avoir une vision d’ensemble du mineur et de son parcours.

Ensuite, le législateur s’est orienté vers une implication renforcée des parents dans la procédure pénale.

Les représentants légaux seront en effet informés des principales décisions concernant les mineurs.

Parallèlement, s’ils ne répondent pas aux convocations, ils pourront être contraints par la force publique à comparaître aux audiences dans l’intérêt de l’enfant.

La loi du 10 août 2011 a donc emprunté le chemin de la sanction et de la responsabilisation des mineurs délinquants et de leurs parents.

Les deux volets de cette loi qui viennent d’être exposés, suscitent de multiples interrogations quant à leur mise en oeuvre.

Malgré les prévisions de l’étude d’impact réalisée par le gouvernement, cette double réforme semble difficilement applicable tant du point de vue financier que pratique.

Les raisons en sont les suivantes :

– le projet de participation des citoyens est évalué à 20 millions d’euro alors que la justice dispose déjà de moyens financiers et humains très limités ;

– la formation, d’ailleurs très légère, qui sera dispensée à ces futurs citoyens-assesseurs implique de facto que du personnel de justice offre de son temps ;

– les audiences du TCFC vont s’en trouver considérablement allongées, les citoyens-assesseurs étant totalement étrangers aux notions juridiques et au fonctionnement de la justice. Cette réforme se proposait pourtant d’accélérer le rythme de la justice pénale ;

– de même concernant la comparution des mineurs pour laquelle le mot d’ordre devient la rapidité, qui implique nécessairement plus de magistrats et de personnels spécialisés.

Il faut préciser qu’une fois encore les acteurs de la justice ont été laissés de côté dans l’élaboration du projet législatif.

Les magistrats, avocats et organisations de protection de l’enfance, notamment l’Unicef, ont pourtant réclamé la mise en place d’une concertation générale avant de modifier pour la 35e fois l’ordonnance du 2 février 1945.

Au final et au-delà des difficultés d’application, on constate que cette loi est l’illustration d’une stigmatisation de la délinquance juvénile par le biais d’une surmédiatisation.

Les statistiques affichent pourtant un taux de réponse pénale plus élevé pour les mineurs que pour les majeurs de même qu’une augmentation de la délinquance des mineurs proportionnellement moins conséquente que celle des majeurs.

Par ailleurs, la plus grande participation des citoyens au procès pénal n’apportera pas nécessairement aux justiciables la confiance en la justice tant réclamée.

Ce serait oublier que la légitimité d’une décision de justice ne dépend pas de la composition de la juridiction mais de la compétence, de l’indépendance et de l’impartialité des juges.

L’avancée ne peut passer que par la transparence, l’accessibilité, la fluidité et la cohérence du service public de la justice … et par des moyens financiers et humains.

Regard sur la loi du 10 août 2011 : l’accroissement de la participation des citoyens à la justice (Première Partie)

Le 18/09/11

C’est un autre regard sur le Droit que je vous propose de découvrir aujourd’hui au travers d’une présentation de La loi n°2011-939 du 10 août 2011 en deux parties consacrées :

– l’une à l’accroissement de la participation des citoyens à la justice,

– l’autre à la réforme de la justice des mineurs.

Je cède donc ma place de rédacteur à Clémentine GIBOUDEAU qui nous a accompagné durant ses quelques semaines de stage au cours desquelles elle a démontré des qualités qui caractérisent un juriste avisé et feront d’elle un avocat éclairé.

Le 13 avril dernier, le garde des sceaux, Michel Mercier, a présenté en conseil des ministres un projet de loi portant sur la participation des citoyens au fonctionnement de la justice pénale et au jugement des mineurs.

Ce texte visait deux objectifs :

– rapprocher les citoyens de la justice en élargissant leur champ de participation au jugement des délits en correctionnel, répondant ainsi au voeu du Président de la République,

 améliorer l’efficacité de la procédure de jugement des mineurs, en permettant des réponses pénales plus rapides et mieux adaptées à leur personnalité.

Dès la présentation de ce projet, de nombreuses contestations se sont élevées face aux modifications envisagées, tant de la part de l’opposition que du Conseil National des Barreaux, et des syndicats de la Magistrature.

Mais si le contenu du texte faisait débat, le choix de la procédure d’adoption était tout aussi critiquable.

Afin que la loi soit rapidement votée, le Gouvernement a décidé d’engager la procédure accélérée d’adoption de la loi.

Par le recours à l’article 45 de la Constitution, le projet n’a donc été soumis qu’à une seule lecture par chacune des assemblées du Parlement.

Le gouvernement a ainsi voulu légiférer dans l’urgence par le biais d’une loi démagogique, préférant un travail parlementaire « au rabais » plutôt que la naissance d’une véritable discussion sur la justice pénale.

A la suite du vote, le Conseil Constitutionnel s’est penché sur la conformité à la Constitution de cette réforme législative.

Les Sages se sont notamment prononcés sur l’indépendance du Juge des Enfants dans leur arrêt du 4 août 2011.

C’est ainsi que la Loi n°2011-939 sur la participation des citoyens au fonctionnement de la justice pénale et le jugement des mineurs a été promulguée le 10 août 2011.

Le Code de Procédure Pénale, le Code de l’Organisation Judiciaire et l’Ordonnance du 2 février 1945 relative à l’enfance délinquante se trouvent désormais modifiés sur plusieurs points.

I- L’accroissement de la participation des citoyens au fonctionnement de la justice pénale : 

A- La participation limitée et encadrée des citoyens : 

L’idée de rapprocher les citoyens de la justice n’est pas récente.

Il existe déjà des juridictions échevinales en matière civile et pénale telles que le conseil de prud’hommes ou la cour d’assise.

La loi nouvelle affiche pour objectif d’élargir le champ de participation des citoyens en créant une nouvelle formation au sein du Tribunal Correctionnel : le Tribunal Correctionnel dans sa formation citoyenne (TCFC).

Celui-ci sera composé de deux citoyens-assesseurs siégeant au côté de trois magistrats professionnels et compétent pour juger certains délits dits sensibles « portant une atteinte grave à la cohésion sociale » :

– les atteintes volontaires et involontaires à la personne humaine ainsi que les destructions, dégradations et détériorations dangereuses, passibles d’une peine d’emprisonnement d’une durée égale ou supérieure à 5 ans,

– les vols avec violence.

La composition mixte de cette juridiction a soulevé un problème de compétence notamment à l’origine de la saisine du Conseil Constitutionnel.

En effet, les normes constitutionnelles garantissent le droit à un tribunal indépendant, impartial et répondant à des exigences de capacité.

Or, le jugement des délits fait appel à des notions juridiques et extra-juridiques complexes : la gravité, l’intention, la récidive, le préjudice pour ne citer qu’elles.

La question s’est posée de savoir si des citoyens « novices » pouvaient présenter les qualités et la capacité nécessaires pour siéger dans une juridiction de jugement pénale.

Selon le Conseil Constitutionnel, la Constitution ne s’oppose pas à ce qu’une juridiction pénale, au sein de laquelle siègent des juges non professionnels, prononce des peines privatives de liberté.

Des réserves ont cependant été émises sur ces « juges justiciables », dont la proportion doit rester minoritaire et qui doivent présenter certaines garanties.

La loi n’impose pas de compétences juridiques ou d’expérience particulière, cependant les citoyens-assesseurs devront être « à même de se prononcer de façon éclairée sur les matières soumises à leur appréciation ».

Par voie de conséquence, les Sages ont censuré les dispositions relatives à la participation des citoyens concernant :

– les infractions au Code de l’environnement ;

– les délits contre la nation, l’Etat et la paix publique.

Ces derniers ont été jugés « d’une nature telle que leur examen nécessite des compétences juridiques spéciales qui font obstacle à ce que des personnes tirées au sort y participent ».

Pour autant, la technicité ne semble pas moins présente pour les infractions d’homicides ou de blessures involontaires que pour le délit d’usurpation d’identité !

La question de la compétence demeure en matière d’application des peines requérant, me semble-t-il, d’autant plus de compétences techniques.

B- Le rôle des citoyens : 

Ces citoyens-assesseurs seront sélectionnés parmi les personnes inscrites sur la liste annuelle du jury d’assises établie après tirage au sort sur les listes électorales.

Un tri sera donc réalisé en fonction de certains critères notamment l’impartialité, l’aptitude, la moralité ou la probité.

On peut d’ailleurs s’interroger sur les modalités relativement subjectives de cette sélection qui risque d’être peu représentative de la mixité sociale…

Ainsi désignés, les citoyens-assesseurs du Tribunal Correctionnel et de la chambre des appels correctionnels pourront poser des questions aux parties et participer au délibéré.

Pour autant, ils n’interviendront dans les décisions du tribunal que sur la qualification des faits, la culpabilité du prévenu et la peine.

Toutes les autres questions relèveront exclusivement de la compétence des magistrats, satisfaisant ainsi à l’exigence constitutionnelle de capacité.

De la même façon, la Loi du 10 août 2011 prévoit la participation de citoyens-assesseurs au sein du Tribunal de l’application des peines et de la chambre de l’application des peines de la Cour d’Appel.

Comme en matière de jugement, des limitations ont également été posées en matière d’application des peines.

L’intervention des citoyens-assesseurs concernera les décisions relatives aux aménagements de peine tels que la fin de la libération conditionnelle ou le régime de la semi-liberté.

Le Conseil Constitutionnel a, là-encore, émis une réserve d’interprétation concernant cette participation : il a précisé que les citoyens ne pourraient se prononcer sur des questions techniques telles que l’examen des conditions de recevabilité ou des incidents de procédure.

Par ailleurs, si la loi du 10 août 2011 a permis aux citoyens d’entrer dans la composition de certaines juridictions, elle a aussi modifié la procédure devant des juridictions dans lesquels ils étaient déjà présents.

Paradoxalement à ce qui précède, la réforme législative a également eu pour but de simplifier la procédure devant la cour d’assises, notamment en diminuant la participation des jurés.

En effet, les jurés au nombre de 9 sont limités à 6 en première instance et passent de 12 à 9 en appel : les règles de la majorité qualifiée s’en trouvent donc modifiées.

Elles sont cependant compensées selon les Sages du Conseil Constitutionnel par l’obligation de motiver les verdicts d’assises, nouvellement imposée par cette même loi.

Avant d’aborder le second volet de la Loi, il est important de préciser que la portée des dispositions relatives à la création du TCFC doit être relativisée.

En effet, le législateur entend recourir à l’expérimentation et a choisi les Cours d’Appel de Dijon et de Toulouse pour mettre en oeuvre ces nouvelles dispositions dès le 1er janvier 2012.

Cette expérimentation, fortement critiquable en ce qu’elle méconnaît le principe d’égalité devant la loi dans un domaine où les libertés fondamentales sont en jeu, pourra être étendue à une dizaine de Cours d’appel avant d’être généralisée à partir du 1er janvier 2014.

A SUIVRE…