L’injonction de payer, recouvrement simplifié de créance

Le 21/02/11 (mis à jour le 22/02/11)

Au terme de ses articles 1405 et suivants , le Code de Procédure Civile institue une procédure simple et peu coûteuse permettant aux particuliers ainsi qu’aux professionnels de recouvrir les sommes qui leur sont dues.

Ce recours au juge conciliant rapidité et efficacité qui est présenté dans le présent billet, est appelé injonction de payer.

Cas d’ouverture de l’injonction de payer :

Les dispositions du Code de Procédure Civile énumèrent limitativement les cas d’ouverture de cette procédure.

– Le premier cas concerne l’existence d’une créance née d’un contrat ou résultant d’une obligation de caractère statutaire telle que les cotisations sociales. La législation impose que le montant de la somme à recouvrir soit déterminé.

Il faut préciser que le créancier pourra également dans ce cadre solliciter le règlement d’une clause pénale sous réserve de réduction par le juge du montant fixé au contrat.

 – Le second cas s’applique à la créance dite cambiaire qui ressort d’une lettre de change, d’un billet à ordre ou d’une cession Dailly conformément à la loi n° 81-1 du 2 janvier 1981 facilitant le crédit aux entreprises.

En dehors de ces cas, l’injonction de payer peut également être sollicitée dans des circonstances plus inattendues.

Ainsi le recouvrement des dommages et intérêts alloués lors d’une mesure de composition pénale ouvre droit à cette procédure comme le précise l’article 41-2 du Code de Procédure Pénale :

« La victime a également la possibilité, au vu de l’ordonnance de validation, lorsque l’auteur des faits s’est engagé à lui verser des dommages et intérêts, d’en demander le recouvrement suivant la procédure d’injonction de payer, conformément aux règles prévues par le code de procédure civile ».

Procédure de saisine simplifiée :

Le créancier saisit le juge de sa demande par requête datée, signée et accompagnée des pièces justificatives.

Dans un souci de simplification, des formulaires CERFA portant mentions des conditions de forme et de fond prescrites ont été édités à destination des justiciables.

Ladite requête sera déposée au greffe de la juridiction du domicile du débiteur dont la compétence diffère selon le montant et la nature de la créance :

– en matière civile :

Il appartient à la juridiction de proximité de se prononcer si le montant ne dépasse pas 4 000 euros, à l’exception des domaines particuliers de la compétence du Tribunal d’Instance.

Si le montant de la créance est supérieur à 4 000 euros ou si celle-ci est relative à un contrat de crédit à la consommation, un contrat de louage d’immeubles ou portant sur l’occupation d’un immeuble, c’est le Tribunal d’Instance qui sera compétent.

– en matière commerciale, seul le Président du Tribunal de Commerce pourra être saisi.

Il faut noter que le créancier peut demander dans sa requête qu’une partie des frais de recouvrement expressément déterminés, soit mise à la charge du débiteur au titre de l’indemnité de l’article 700 du Code de Procédure Civile.

Ordonnance portant injonction de payer :

L’impératif de célérité qui préside à la procédure d’injonction de payer, impose au juge de procéder au contrôle de la recevabilité et du bien-fondé de la requête avant de rendre son ordonnance.

Cette ordonnance portant injonction de payer devra être signifiée par huissier dans un délai de 6 mois aux fins d’information du débiteur : à défaut, elle sera réputée non avenue.

Jusqu’à la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, cette formalité était d’autant plus importante qu’elle influait sur le droit d’ester en justice.

En effet, la Cour de cassation jugeait, sur le fondement de l’ancien article 2244 du Code Civil, que la requête en injonction de payer n’avait pas d’effet interruptif de la prescription : seule la signification de l’ordonnance d’injonction produisait un tel effet.

Cass Civ. 1ère 10 juillet 1990 Pourvoi 89-13345

Cass Civ. 2eme 11 décembre 2008 Pourvoi 07-16260

L’adoption du nouvel article 2241 du Code Civil semble changer la donne puisque le texte n’exige plus une citation en justice ou un acte signifié pour s’empêcher de prescrire.

Une demande en justice est désormais suffisante.

Cette discussion interpelle sur la nature et l’effet de l’ordonnance portant injonction de payer qui varie selon les suites de l’affaire.

Exécution de l’ordonnance ou opposition :

Le principe du contradictoire qui s’impose en procédure civile, fait naître un droit d’opposition permettant au débiteur de contester l’ordonnance portant injonction de payer.

Ce dernier dispose ainsi d’un délai d’un mois à compter de la signification pour saisir le Tribunal ayant statué par déclaration au greffe ou courrier recommandé AR auquel seront jointes la copie de l’ordonnance et toutes les pièces utiles au recours.

Lorsque l’ordonnance portant injonction de payer est rendue, le créancier peut donc se retrouver dans deux situations :

– Dans la première hypothèse, le débiteur ne forme pas opposition dans le délai imparti.

Le créancier saisira donc de nouveau le juge afin qu’il appose la formule exécutoire sur l’ordonnance.

Ce n’est que lorsqu’elle sera revêtue de cette formule que ladite ordonnance produira tous les effets d’un jugement contradictoire ayant autorité de chose jugée.

Dans un arrêt du 13 septembre 2007, la Cour de Cassation a rappelé qu’une ordonnance portant injonction de payer n’est une décision de justice qu’en l’absence d’opposition dans le mois de sa signification.

Si elle n’est pas signifiée, son exécution est impossible.

Cass. Civ. 2eme 13 septembre 2007 Pourvoi 06-14730

– Dans la seconde hypothèse, le débiteur saisit le Tribunal de son opposition qui ouvre alors une instance contentieuse.

Le juge entendra les arguments de chacune des parties avant de statuer sur la créance et son exigibilité.

A l’issue des débats, le jugement rendu sur opposition se substituera à l’ordonnance d’injonction de payer qu’il anéantit.

Cass Civ. 1ère 25 juin 2009 Pourvoi 08-18363

On l’aura compris la procédure singulière d’injonction de payer est très efficace pour peu que le débiteur ne forme pas opposition.

Ce dernier ne pourra alors exercer aucune voie de recours à l’exception du pourvoi en cassation limité à la contestation des conditions d’apposition sur l’ordonnance de la formule exécutoire.

Cass. Civ. 2eme 3 avril 2003 Pourvoi 00-19905