Les nouvelles limites du contrôle juridictionnel du Juge des Libertés et de la Détention en matière de rétention administrative

Cela fait trois ans maintenant que la Loi n°2011-672 relative à l’immigration, à l’intégration et à la nationalité du 16 juin 2011 a été adoptée.

Depuis son entrée vigueur, elle a modifiée l’ordre d’intervention du juge administratif et du juge judiciaire dans le contentieux de la rétention administrative.

Ce changement de pratique est de nouveau en lumière suite à un arrêt de la Cour de Justice de l’Union Européenne du 5 juin 2014.

Les limites d’intervention l’un et l’autre juge semblent continuer d’évoluer devant les précisions apportées sur l’interprétation de la législation européenne.

L’état actuel du contrôle de la mesure la moins coercitive :

Le placement en rétention administrative ne ressort d’un choix entre plusieurs alternatives : la privation est l’ultime solution à défaut d’une autre « mesure la moins coercitive ».

Aussi l’arrêté préfectoral décidant le placement doit-il parfaitement motivé le recours à cette mesure sous peine d’être annulé par le juge administratif.

Entre l’assignation à résidence ab initio avec ou sans placement sous surveillance électronique, le CESEDA prévoit plusieurs possibilités de parvenir à l’exécution d’une obligation de quitter le territoire.

Le choix du Préfet ne tient pas de l’opportunité mais des impératifs de nécessité et proportionnalité en vertu de l’article 15 de la directive dite « retour » 2008/115/CE du 16 décembre 2008.

Les Tribunaux administratifs contrôlent l’application de la règle de droit dans le cadre de l’analyse de la légalité de l’arrêté préfectoral.

Si la décision est d’entachée d’irrégularité, ils prononcent alors l’annulation du placement en rétention administrative.

Mais si elle est survie au contentieux de l’excès de pouvoir, la mesure échappe ensuite au juge administratif …

C’est le juge civil qui prend la main au-delà d’une durée de rétention de cinq jours.

Le juge des Libertés et de la Détention a seul compétence pour ordonner la prolongation de la mesure, la refuser ou lui substituer l’assignation à résidence à des conditions limitatives.

Pour autant, il ne tient pas compte des impératifs de nécessité et de proportionnalité dans le contentieux du maintien au CRA au-delà du délai initial.

L’arrêt récent de la Cour de Justice de l’Union Européenne risque cependant de changer l’office du juge civil.

Un nouveau domaine de pleine juridiction :

En 2012, la Cour de Cassation avait rappelé l’importance de la législation européenne dans le contentieux de prolongation de la rétention administrative en retenant :

« qu’il résulte de la combinaison des paragraphes 1, 4 et 5 de l’article 15 de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 du Parlement européen et du Conseil, qui est d’effet direct, que l’assignation à résidence ne peut jamais revêtir un caractère exceptionnel ».

Cass. Civ 1ère 24 octobre 2012 Pourvoi n° 11-27956

L’écho de cet arrêt a cependant été largement contenu et n’a pas contraint le juge des Libertés et de la Détention à redéfinir son champ de compétence.

La Cour de Justice de l’Union Européenne vient bousculer les pratiques suite d’une question préjudicielle d’un tribunal bulgare.

Il convient de rappeler que la directive dite retour 2008/115 préconisent aux juridictions des États membres de « veiller à ce que, en mettant fin au séjour irrégulier de ressortissants de pays tiers, ils respectent une procédure équitable et transparente ».

Ainsi, la législation européenne insiste sur le fait que « le recours à la rétention aux fins d’éloignement devrait être limité et subordonné au respect du principe de proportionnalité en ce qui concerne les moyens utilisés et les objectifs poursuivis. La rétention n’est justifiée que pour préparer le retour ou procéder à l’éloignement et si l’application de mesures moins coercitives ne suffirait pas ».

Dans son analyse et l’interprétation de la directive, la Cour de Justice va plus loin encore :

« Force est ainsi de relever qu’une autorité judiciaire statuant sur la possibilité de prolonger la rétention initiale doit obligatoirement procéder à un contrôle de ladite rétention, même si ce contrôle n’a pas été expressément demandé par l’autorité l’ayant saisie et même si la rétention du ressortissant concerné a déjà fait l’objet d’un réexamen par l’autorité ayant ordonné la rétention initiale ».

L’arrêt du 5 juin 2014 relève donc que le contrôle portant sur la nécessité et la proportionnalité de la mesure privative de liberté s’applique non seulement au placement au CRA mais également à sa prolongation.

En cela, les juges européens suivent le sens de la brise soufflée par Monsieur MACIEJ SZPUNAR, avocat général, lors sa prise de position présentée le 14 mai 2014 qui demande aux juridictions nationales :

– « d’assumer une pleine juridiction » dans le cadre de cette prolongation,
– « de poursuivre activement et de manière continue et non-interrompue » les diligences nécessaires au départ.

Cette interprétation revient à redéfinir le rôle et les pouvoirs du Juge des Libertés et de la Détention en droit français.

En effet, dans le cadre d’une demande de première prolongation de 20 jours, il ne peut plus seulement constater la « violation des formes prescrites par la loi à peine de nullité ou d’inobservation des formalités substantielles » faisant grief pour rendre une ordonnance de son surveillance.

La prolongation de rétention implique un réexamen des conditions de fond ayant servi de fondement à la rétention initiale du ressortissant concerné

Par ailleurs, dans le cadre d’une seconde prolongation de 20 jours supplémentaires, il ne peut plus retenir que la condition tenant « de la perte ou de la destruction des documents de voyage » est remplie en l’absence de passeport ou de pièce d’identité de l’étranger.

Un «manque de coopération» du retenu ayant empêché son éloignement durant le vingt cinq premiers jours de rétention doit être caractérisé.

En conséquence, toute restriction légale limitant son contrôle et notamment celle des articles L552-13 et L 552-7 du CESEDA semblent donc s’opposer aux dispositions de l’article 15 de la directive retour.

Mais il existe une réelle interrogation sur la façon dans cette jurisprudence sera accueillie et mise en œuvre.

2) L’article 15, paragraphes 3 et 6, de la directive 2008/115 doit être interprété en ce sens que le contrôle que doit effectuer l’autorité judiciaire saisie d’une demande de prolongation de la rétention d’un ressortissant d’un pays tiers doit permettre à cette autorité de statuer sur le fond, au cas par cas, sur la prolongation de la rétention du ressortissant concerné, sur la possibilité de substituer à la rétention une mesure moins coercitive ou sur la remise en liberté de ce ressortissant, ladite autorité étant ainsi compétente pour se fonder sur les faits et les preuves produits par l’autorité administrative l’ayant saisie ainsi que sur les faits, les preuves et les observations qui lui sont éventuellement soumis lors de cette procédure.

4) L’article 15, paragraphe 6, sous a), de la directive 2008/115 doit être interprété en ce sens qu’un ressortissant d’un pays tiers qui, dans des circonstances telles que celles en cause au principal, n’a pas obtenu un document d’identité qui aurait permis son éloignement de l’État membre intéressé peut être considéré comme ayant fait preuve d’un «manque de coopération», au sens de cette disposition, uniquement s’il résulte de l’examen du comportement dudit ressortissant au cours de la période de rétention que ce dernier n’a pas coopéré à la mise en œuvre de l’opération d’éloignement et qu’il est probable que cette opération dure plus longtemps que prévu à cause de ce comportement, ce qu’il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier.

CJUE -3ème chbre 5 juin 2014 Affaire C 146/14 PPU

Du mouvement de grève : la fin et les moyens

Le Conseil National des Barreaux réuni le 27 juin dernier à PARIS, a adopté la résolution suivante :

« Après avoir entendu la garde des Sceaux, ministre de la justice, s’exprimer sur la réforme de l’aide juridictionnelle et de son financement et n’apporter aucune réponse satisfaisante aux préoccupations depuis longtemps exprimées par la profession en vue de réformer ce système.

Rappelle que le déficit d’indemnisation des avocats intervenant au titre de l’aide juridictionnelle traduit l’incapacité des pouvoirs publics à garantir l’égal accès de tous au droit et à la justice.
Considère que la solidarité de la profession, déjà largement sollicitée, n’a pas à être encore appelée à se substituer aux carences de la solidarité nationale.
Constate que le gouvernement refuse ainsi de prendre la mesure de la gravité de la situation, préférant s’accommoder d’un système exsangue alors que l’accès au droit et à la justice pour tous constitue une exigence démocratique.

Dans ces conditions, le Conseil National des Barreaux, représentant la profession auprès des pouvoirs publics, appelle l’ensemble des barreaux et des avocats de France :
– à interrompre le lundi 7 juillet 2014 toutes les activités professionnelles,
– à participer à la grande manifestation nationale organisée ce même 7 juillet à Paris (rassemblement à 14h en robe) ».

Après les grèves des 5 juin et 26 juin 2014, la Profession d’Avocat se mobilise de nouveau face aux inquiétudes suscitées par la réforme de l’aide juridictionnelle.

La manifestation de ce jour fait suite à l’intervention de Madame le Garde des Sceaux lors de l’assemblée générale de la Conférence des Bâtonniers le 27 juin dernier.

Répondant à l’invitation des représentants de la Profession, Christiane TAUBIRA a réaffirmé sa volonté de rechercher des solutions afin de réformer l’aide juridictionnelle et son financement.

Elle constate comme tous les professionnels du droit que « cet instrument de solidarité est à bout de souffle ».

Elle considère que les conditions d’admissibilité de l’aide juridictionnelle doivent été remises en cause et que le montant de l’unité de valeur inchangé depuis 2007 doit être revalorisé.

Mais pourtant, la cohérence de son propos s’arrête là.

En effet, Madame le Garde des Sceaux n’est pas en mesure de présenter un plan de sauvegarde du système en place, ni même de proposer un projet de réforme globale de l’aide juridictionnelle.

Et c’est bien dans cette absence de perspectives que le bât blesse.

Pour bien comprendre le désaccord qui existe à l’heure actuelle entre les barreaux français et la Chancellerie, il faut revenir aux origines du conflit.

De la concertation à l’arbitraire:

Le système actuel de l’aide juridictionnelle repose sur le principe de la solidarité et nécessite un budget que l’État peine, par la force des circonstances, a trouvé.

L’article 54 de la Loi n°2011-900 du 29 juillet 2011 avait institué un droit de timbre de 35 euros à la charge des justiciables afin de pourvoir au financement de ce régime.

Mais depuis le 1er janvier 2014, cette contribution pour l’aide juridique a disparu, supprimée par l’article 128 de la Loi n°2013-1278 du 29 décembre 2013.

Aucune mesure de remplacement n’ayant été prévue pour pallier la disparition du timbre fiscal, le système de l’Aide Juridictionnelle est alors passé de précaire à périlleux.

Ce manque de prévoyance a suffit à franchir le pas entre l’urgence et l’extrême urgence.

C’est en l’état de cette perte de moyens que les professionnels du droit ont été interrogés chacun à leur tour pour présenter les solutions qu’ils préconisaient afin d’assurer la survie de l’aide juridictionnelle.

Le Rapport de Modernisation de l’action publique publié en novembre 2013 reprend l’ensemble des discussions et en tire une synthèse complète des pistes de diversification du financement alors évoquées :

« – Une majoration légère des droits de mutation dus par les ménages et entreprises lors d’actes occasionnels officiellement enregistrés (rapports Arnaud/Beleval 2009 et AN2011). Les avocats privilégient cette voie (CNB 2012/2013). Les autres professions représentées au Haut Conseil des Professions du Droit la préconisent aussi mais au sein d’un éventail incluant d’autres financements. Le ministère du budget ne souhaite pas majorer un type de droit inclus dans l’énumération des « prélèvements obligatoires » et afférent notamment au marché de l’immobilier. La ministre de la justice a quant à elle indiqué les 17 juin et 23 juillet 2013 qu’elle ne suivrait pas cette formule.

– Une taxation spécifique et limitée du chiffre d’affaires des professionnels du droit (rapport Darrois 2009). Cette voie rencontre une réserve (rapport Arnaud/Beleval 2009) voire une opposition marquée de la part des professions et notamment des avocats, qui évoquent une « double peine » vu la rétribution modeste des missions d’AJ, les contraintes économiques des cabinets soumis à la concurrence, le décalage entre un chiffre d’affaires et le résultat final d’un cabinet. Le ministère du budget ainsi que la ministre de la justice privilégient cependant à ce stade cette piste, au regard notamment de la solidarité qu’elle manifesterait entre toutes les professions du droit et entre professionnels selon qu’ils accomplissent ou pas des missions d’AJ.

– Une contribution particulière des avocats ne contribuant pas (ou contribuant peu) aux missions d’AJ (rapport Sénat 2007). Cette voie est rapprochée par les avocats de la voie précédente et donc traitée avec réserve. Cependant elle s’en distingue fondamentalement: car elle repose sur l’idée traditionnelle d’une sorte de devoir moral des avocats à contribuer à l’aide juridictionnelle et sur l’observation que plus de la moitié d’entre eux ne conduisent pourtant pas de mission à ce titre ; car elle ne propose pas de taxer une assiette donnée (chiffre d’affaires, BNC ou autre) mais de calculer un niveau spécifique de contribution à partir d’un « juste » niveau de rétribution des missions d’AJ, d’une part, du degré de participation effective de chacun à ces missions d’autre part. En tout état de cause le CNB réfute l’idée d’un devoir moral des avocats qui « ne trouve plus sa place au 21ème siècle, les avocats ne vivant plus de leurs rentes mais de leur travail » et ajoute que par ailleurs les produits financiers des CARPA sont localement insuffisants pour couvrir les charges générées par la gestion des dotations (CNB – 26 octobre 2013).

– Une majoration limitée de la taxe spéciale sur les conventions d’assurance de protection juridique (rapport Arnaud/ Beleval 2009). Cette voie est proposée (au sein d’un éventail) par le Haut Conseil des Professions du Droit. Elle repose sur l’idée que tout contrat porte en germe un conflit. Le ministère du budget ne souhaite pas majorer ce droit inclus dans l’énumération des « prélèvements obligatoires » et impactant l’activité d’assurance. Par ailleurs cette voie est présentée comme pouvant paradoxalement nuire à l’assurance de protection juridique encore en développement et en principe prioritaire sur le droit à l’aide juridictionnelle. Cependant l’APJ est présentée comme surtout concernée par des contentieux qui ne recoupent pas le public de l’AJ, ce qui réduit le paradoxe. Elle devrait être approfondie au regard de données précises sur le rapport primes reçues au titre de l’APJ / sinistres indemnisés à ce titre.

– Une extension du principe de mise des frais à la charge de celui qui perd son procès ou est condamné, avec notamment l’institution au civil d’un droit fixe de procédure comparable à ce qui existe au pénal. Initiée lors des travaux MAP par un représentant du CNB, cette voie peut se voir objecter le risque de limiter de fait l’accès à la justice par crainte de la charge si l’on perd. Pour certains en outre, la théorie du droit admet que l’issue d’un procès peut ne pas régler fondamentalement le partage des torts. Cependant cette voie a reçu un accueil favorable ou ouvert de tous les interlocuteurs professionnels, avocats ou magistrats, rencontrés lors des travaux MAP. Elle devrait donc être approfondie.

– Un timbre sur la copie exécutoire délivrée à l’issue du jugement. Cette voie est suggérée (au sein d’un éventail) par le Haut Conseil des Professions du Droit. Elle pourrait se voir opposer un parallèle avec la CPAJ instaurée en 2011 au stade de la formation d’une instance civile. Cependant une différence notable serait que le gagnant serait en fait seul concerné et par ailleurs bénéficiaire du jugement ».

Mais là où le dialogue devait prévaloir, c’est la force que Madame le Ministre de la Justice a préféré.

Elle a entrepris d’imposer la taxation du chiffre d’affaires des Cabinets d’Avocats et des professionnels du droit au mépris du principe de solidarité.

Du pragmatisme à l’inconsidéré :

Face à cette situation, comment les Avocats pourraient-ils demeurer dans « une relation de confiance » avec leur Ministre ?

Tous ceux qui contribuent à l’effort d’accès au droit, restent dans l’incompréhension d’être prochainement contraints de financer l’aide juridique.

Il convient de rappeler que l’aide juridictionnelle n’a cessé de rassembler de plus en plus de bénéficiaires et de voir son budget annuel augmenter depuis l’entrée en vigueur de la Loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Ainsi les chiffres clés de la justice permettent de dresser le tableau suivant sur les 5 dernières années :

Années Justiciables admis à l’aide juridictionnelle: Augmentation 3,3 %

2008 : 886 337 personnes
2009 : 901 630 personnes
2010 : 912 191 personnes
2011 : 882 607 personnes
2012 : 915 563 personnes

Budget de l’aide Juridictionnelle : Augmentation 14,60 %

2008 : 306 760 000 euros
2009 : 308 400 000 euros
2010 : 321 200 000 euros
2011 : 351 100 000 euros
2012 :s 351 700 000 euros

L’aide juridictionnelle est un indicateur incontestable de l’évolution de l’économie de la société et des conditions de vie des justiciables.

Notre Profession défend avec ferveur le principe essentiel d’accès au droit et la liberté fondamentale d’ester en justice.

En cela, il n’y a pas de devoir moral mais une fidélité à notre serment.

C’est pourquoi depuis 1991, les Barreaux se sont attachés à garantir l’intervention d’avocats à l’aide juridictionnelle, à assurer les commissions d’office et à organiser les permanences dans les contentieux de l’urgence.

Chacune de nos missions dans ce cadre ressort d’une volonté d’une justice efficiente et effective pour tous.

En contrepartie de nos diligences, nous ne sommes pas rémunérés par les clients sur la base de nos honoraires mais indemnisés par l’État selon des barèmes limités.

Pour information, l’Inspection Générale des Services Judiciaires a édité un tableau des rétributions des avocats applicables à certaines procédures.

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Le caractère forfaitaire de cette indemnisation exclut la prise en compte de la complexité du dossier, du temps passé, des frais exposés par l’avocat, de sa notoriété et de ses diligences.

Aussi, la taxation des Cabinets d’Avocats reviendra à financer nous-mêmes la rétribution qui nous indemnise lorsque nous prêtons notre concours aux bénéficiaires de l’aide juridictionnelle.

Cet instrument de solidarité sera alors soutenu par les 56 176 auxiliaires de justice de FRANCE .

Pour l’heure, le Ministre écarte toutes taxes impactant l’activité des organismes d’assurance – dont le chiffre d’affaires s’élève en 2013 pour la FRANCE à plus de 189 milliard d’euros – auprès desquels sont souscrits des contrats d’assurance de protection juridique.

Le caractère subsidiaire de l’aide juridictionnelle serait pourtant renforcé par cette contribution des assureurs.

Mais les idées reçues sur les robes noires et leur train de vie de berline de luxe en quotidien de notable semblent bien avoir la peau dure.

Elles laissent assurément présumer de nos capacités contributives.

Dans ma réalité, de prétoires en dossiers, de visages en rencontres,

Avocat est une fonction, celle d’auxiliaire de Justice qui fait de nous un acteur essentiel du système judiciaire et un gardien des libertés publiques,

Avocat est un exercice, celui d’une profession libérale réglementée qui inscrit notre mission de conseil dans une déontologie et un contrôle de nos obligations,

Avocat est une activité, celle d’un métier du droit qui nous permet de gagner notre vie et de satisfaire aux charges professionnelles.

L’idée que je me fais du financement de l’aide juridictionnelle par la taxation des cabinets d’avocats, et de son opportunité ne passent pas par mes mots.

Ceux d’un autre raisonnent bien plus quant à la fin et aux moyens d’une telle mesure :

« Et il s’est toujours trouvé des gens pour prétendre que la fin justifie les moyens, que les moyens, au fond, sont sans importance, l’essentiel étant d’atteindre le but fixé.
C’est pourquoi, disent-ils, si vous cherchez à bâtir une société juste, l’important est d’aboutir, et les moyens n’importent guère. Choisissez n’importe quel moyen pourvu que vous atteignez votre but ; ils peuvent être violents, ils peuvent être malhonnêtes, ils peuvent même être injustes. Qu’importe, si le but est juste ! Oui, tout au long de l’histoire, il s’est trouvé des gens pour argumenter ainsi. Mais nous n’aurons pas la paix dans le monde avant que les hommes aient partout reconnu que la fin ne peut être dissociée des moyens, parce que les moyens représentent l’idéal qui se forme, et la fin l’idéal qui s’accomplit. En définitive, on ne peut atteindre des buts justes par des moyens mauvais, parce que les moyens représentent la semence, et la fin représente l’arbre ».

Martin Luther King

 

LES AVOCATS EN GREVE

2014-06-26 08.16.49

Parce que l’accès au Droit est un impératif démocratique, les avocats se mobilisent pour les citoyens.

L’Aide Juridictionnelle, dispositif pris en charge par l’État, concerne plus de 9 millions de personnes en France et permet de donner accès à la justice.

Aujourd’hui l’Aide Juridictionnelle est en danger en dépit des nombreuses alertes lancées depuis des années par les avocats.

Alors que la demande de droit ne cesse de croître, l’État n’a pas su faire évoluer le budget consacré à l’Aide Juridictionnelle.

Les avocats expriment leur colère et appellent la Chancellerie à prendre des mesures à la hauteur des besoins pour réformer l’Aide Juridictionnelle.

Les avocats se battent pour défendre l’accès à la Justice et au Droit pour les citoyens.

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Qu’est-ce qu’être européen aujourd’hui ? Deuxième rendez-vous avec l’Europe : « je suis dans l’Union Européenne »

L’Europe s’est un peu dévoilée au travers de la présentation de l’espace Schengen dans le premier volet de cette série d’articles.

Peut-être cette rencontre vous a-t-elle séduite, laissé dubitatif ou rendu curieux… Ce deuxième rendez-vous vous remplira en tout cas la tête d’étoiles.

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L’Union européenne (UE) se définit comme « un partenariat économique et politique unique entre 28 pays européens qui, ensemble, couvrent la plus grande partie du continent ».

A l’issue de la Première Guerre mondiale, les alliances historiques et opportunistes entre certains pays d’Europe ont été balayées.

Le profond traumatisme de la Seconde Guerre mondiale ravivera certains désirs d’entente entre les peuples.

C’est ainsi que commence l’histoire de la construction européenne en cette seconde moitié du 20ème siècle dans un climat d’incertitude et d’espoir.

1/ De Rome à Maastricht, rien ne s’est fait en un jour : il y a eu de nombreuses étapes d’un traité à l’autre et beaucoup d’hésitations entre confédération et fédération.

Pourtant après les heures sombres de la guerre, une idée s’impose, celle de la coopération économique qui apparait comme une nécessité pour assurer la stabilité politique et la paix.

C’est de cette idée que vont naitre les premières tentatives de rapprochements entre les pays d’Europe occidentale.

Les intérêts communs vont ainsi conduire à la création successive de :
– la Communauté européenne du Charbon et de l’Acier (CECA) en 1951,
– la Communauté européenne de défense (CED) en 1952,
– la Communauté européenne de l’énergie atomique(CEEA) en 1957
– et la Communauté économique européenne (CEE) en 1957.

A son origine, cette dernière organisation réunit six pays autour d’un marché commun né du traité signé à Rome le 25 mars 1957.

Depuis lors, elle s’est muée en un immense marché intérieur regroupant 28 états : l’Allemagne, l’Autriche, la Belgique, la Bulgarie, Chypre, la Croatie, le Danemark, l’Espagne, l’Estonie, la Finlande, la France, la Grèce, la Hongrie, l’Irlande, l’Italie, la Lettonie, la Lituanie, le Luxembourg, Malte, les Pays-Bas, la Pologne, le Portugal, la République tchèque, la Roumanie, le Royaume-Uni, la Slovaquie, la Slovénie et la Suède.

Au fils des ans, les domaines de compétence et d’intervention de cette Europe des communautés se sont étendus par la ratification de plusieurs traités successifs.

L’organisation initiale s’est enrichie d’institutions démocratiques, à savoir :

– le Parlement européen représentant les citoyens européens installé à Strasbourg,
– le Conseil de l’Union européenne représentant les gouvernements des États membres implanté à Bruxelles,
– la Commission européenne représentant les intérêts de l’Union dans son ensemble située à Bruxelles,
– la Cour de Justice de l’Union Européenne siégeant à Luxembourg,
– et la Cour des comptes contrôlant le financement des activités à Luxembourg.

Puis, le 7 février 1992, les communautés encore actives ont fusionné à Maastricht en un ensemble unique : l’Union Européenne.

2/ Pour se garantir une assise forte et une réelle légitimité, l’Union Européenne qui rassemble 505 millions de citoyens, s’appuie sur trois piliers :

– Le premier pilier est communautaire puisqu’il provient des acquis issus de la CEE, CECA et CEEA.

Il s’illustre d’abord par le marché intérieur organisé autour du principe de libre circulation des marchandises, des services, des capitaux et des personnes.

Dans ce cadre, plusieurs pays de l’Union Européenne ont adopté en 1999 un monnaie unique, l’euro, pour laisser derrière eux le franc, le deutschemark ou la lire.

Mais ce pilier est aussi celui qui regroupe les politiques et décisions communes dans des domaines tels que l’agriculture, les transports, la formation ou la santé publique.

Ainsi, les menaces sanitaires sont surveillées et encadrées par un système d’alerte qui a notamment permis de réagir à la pandémie de grippe H1N1 de 2009.

L’acquis communautaire est enfin celui des valeurs fondamentales qui soutiennent l’Union Européenne.

Les États Membres n’ont jamais caché leurs intentions de promouvoir les droits de l’homme au sein de leur partenariat et dans le reste du monde.

Le préambule du Traité sur l’Union Européenne précise ainsi :

« CONFIRMANT leur attachement aux principes de la liberté, de la démocratie et du respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales et de l’État de droit,

DESIREUX d’approfondir la solidarité entre leurs peuples dans le respect de leur histoire, de leur culture et de leurs traditions,- Le deuxième pilier relève de la politique étrangère et de sécurité commune ».

– Le deuxième pilier de l’Union Européenne trouve sa forme dans une politique étrangère et de sécurité commune.

On aura bien sûr compris que si l’idéal de paix a évolué depuis 1957, il demeure actuel.

Aussi la PESC poursuit-elle un objectif de renforcement la sécurité internationale par une coopération systématique concrétisée par des actions et stratégies communes.

Et pour porter encore plus haut la parole de l’Union Européenne, le traité signé à Lisbonne le 13 décembre 2007 a instauré un haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité.

Cependant, la diplomatie rencontre parfois sur son chemin un tenace gouvernant russe et se heurte à sa soif d’impérialisme…

-Le troisième pilier repose sur la coopération policière et judiciaire en matière pénale entre les États membres liée notamment à l’espace Schengen né en 1995.

Précédemment évoqué dans ces pages, cet espace d’échanges nécessite une collaboration matérielle et logistique sous couvert de réciprocité.

Ainsi, les décisions relevant du cadre de cette entraide ne peuvent être prises qu’à l’unanimité des États membres.

Liberté, sécurité et justice doivent, en effet, coexister dans l’espace de l’Union Européenne qui garantit l’équilibre entre ces impératifs

L’Union Européenne apparait donc comme une organisation complexe composant avec la souveraineté des Etats et les objectifs communs.

Très justement, Daniel Faucher disait que « l’Europe est trop grande pour être unie ; Mais elle est trop petite pour être divisée. Son double destin est là ».

Plurielle, pragmatique et probe, elle se fonde sur la géographie d’un continent mais se nourrit de la complémentarité de populations.

Depuis plus de cinquante ans, elle fait parti de notre vie sans même que nous nous en apercevions tant l’évolution a été progressive.

Et elle se poursuit encore le 25 mai 2014 avec les élections pour choisir les représentants au Parlement Européen.

La retenue pour vérifications du droit au séjour, entre nécessité et intérêt public

Le 1er janvier 2013, l’article L. 611-1-1 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est entré en vigueur suite à l’adoption de la loi n° 2012-1560 du 31 décembre 2012, relative à la retenue pour vérification du droit au séjour et modifiant le délit d’aide au séjour irrégulier pour en exclure les actions humanitaires et désintéressées.

Un régime de privation de libertés applicable aux ressortissants étrangers a ainsi vu le jour sous la désignation de « retenue pour vérification du droit au séjour« .

Cette jeune mesure de police administrative tend à retenir une personne étrangère dans les locaux de police ou de gendarmerie le temps nécessaire à la détermination de son droit au séjour sur le territoire français.

Depuis un an, ce préalable au maintien en rétention administrative s’inscrit dans l’ordre juridique, fait ses premiers pas et grandit dans sa pratique.

La retenue continue son évolution au rythme de ses applications et des jurisprudences principalement civiles.

Mais aussi précise que soit la lettre de l’article L. 611-1-1 précité, ce texte coercitif ne manque pas de soulever de nombreuses interrogations quant à sa mise en œuvre.

La Cour de Cassation en a affiné son interprétation dans un récent arrêt du 2 avril 2014 dont l’évocation dans cet article permet de revenir sur cette nouvelle forme de contrainte.

La filiation d’une union mixte :

La retenue a été conçue pour combler l’absence laissée par la garde à vue pour infraction au séjour irrégulier.

Elle est le fruit de la loi n° 2012-1560 du 31 décembre 2012, qui consacre l’issue d’un débat jurisprudentiel de deux ans entre Luxembourg et Paris.

Au travers des arrêts « El Dridi » (1) et « Achughbabian » (2), les juges de la Cour de justice de l’Union européenne avaient fixé le principe d’interprétation de la Directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008, relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier, dite Directive « retour », par :

– une opposition à une réglementation d’un Etat membre réprimant le séjour irrégulier par des sanctions pénales, pour autant que celle-ci permet l’emprisonnement d’un ressortissant d’un pays tiers qui, tout en séjournant irrégulièrement sur le territoire dudit État membre et n’étant pas disposé à quitter ce territoire volontairement, n’a pas été soumis aux mesures coercitives visées à l’article 8 de cette Directive et n’a pas, en cas de placement en rétention en vue de la préparation et de la réalisation de son éloignement, vu expirer la durée maximale de cette rétention;

– une acceptation à une telle réglementation, pour autant que celle-ci permette l’emprisonnement d’un ressortissant d’un pays tiers auquel la procédure de retour établie par ladite Directive a été appliquée et qui séjourne irrégulièrement sur ledit territoire sans motif justifié de non-retour.

Fort de cette appréciation, les chambres civiles et criminelles de la Cour de Cassation ont tiré les conséquences du droit européen.

Chacune à leur tour (3), les marraines de l’article L. 611-1-1 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ont affirmé que l’infraction de séjour irrégulier ne pouvait donner lieu à une peine d’emprisonnement et fonder un placement en garde à vue.

La mesure de contrainte applicable exclusivement en cas de flagrance lorsqu’un crime ou un délit est puni de prison, a conservé, cependant, ses prérogatives au titre de l’infraction de maintien en séjour irrégulier.

Née d’une législation française, la retenue pour vérification du droit au séjour se reconnaît donc une paternité européenne dans la Directive « retour ».

Une fratrie issue du Code de Procédure Pénale :

Au terme d’une grossesse de deux ans, l’article L. 611-1-1 précité est entré dans la famille des mesures privatives de liberté.

Depuis lors, les services de police ou de gendarmerie peuvent, sur son fondement, retenir une personne étrangère pour une durée de seize heures non renouvelable.

Ce temps de la retenue s’impute directement sur celle de la vérification d’identité et la garde à vue, demi-sœurs de la mesure.

Mais la première s’inscrit dans le cadre de recherches strictement limitées à l’identité de la personne préalablement à l’examen du droit au séjour : elle peut donc précéder la retenue.

Quant à la seconde, elle ressort de l’existence d’indices de tentative ou de commission d’une infraction découverts à l’occasion des investigations portant de la situation administrative de l’étranger : elle peut ainsi succéder à la retenue.

Par comparaison à cette fratrie, l’examen du droit de circulation ou de séjour s’impose comme l’unique cadre et la seule finalité de la retenue.

C’est la raison pour laquelle l’article L. 611-1 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile tente de conférer à la mesure un caractère coercitif « modéré ».

Il donne à l’étranger les droits dévolus à toute personne privée de liberté même si la retenue se situe en dehors du cadre pénal.

Il complète ces garanties en rappelant les principes dégagés par la jurisprudence dans la mise en œuvre des contrôles d’identité et du recours aux moyens de contrainte.

Il en ajoute de nouvelles en autorisant l’étranger à communiquer lui-même avec les tiers et en lui octroyant le bénéfice d’une pièce distincte dévolue aux gardés à vue.

Mais la retenue pour vérification d’identité demeure issue d’une lignée de mesures privatives de liberté.

L’exercice de l’autorité préfectorale :

La retenue est bercée par les diligences accomplies par les services de police ou de gendarmerie, ainsi que par les décisions du préfet. La circulaire du 18 janvier 2013 (NOR : INTK1300159C) souligne, cependant, que « l’irrégularité qui résulte d’un défaut de titre n’épuise pas à elle seule l’examen du droit au séjour« .

Aussi, la durée de seize heures doit permettre de déterminer non seulement si l’étranger bénéficie d’un titre, mais encore s’il peut y prétendre au regard de sa situation.

Cette recherche s’organise en trois temps précisément définis par la circulaire précitée : celui de l’investigation coordonnée entre préfectures et services de police, celui de l’instruction et de la décision sur une mesure d’éloignement ou la délivrance d’un titre de séjour et celui de la notification des décisions.

Tout commence donc par la consultation du fichier « FNE » (Fichier national des étrangers) regroupant les informations sur la situation du retenu, les mesures d’éloignement, les délivrances de titre de séjour et les demandes en cours.

L’audition de l’étranger assisté, le cas échéant, par un avocat suit cette première vérification afin de préciser les éléments concernant le parcours et la situation actuelle sur le territoire français.

Durant toute la mesure, l’étranger doit être mis en mesure de fournir par tout moyen les pièces et documents requis qu’il soit remis par lui-même, ou communiqué par son consulat ou un tiers.

Mais les seize heures légales peuvent parfois avérer insuffisantes pour procéder à la vérification du droit au séjour.

A titre exceptionnel et « lorsque celle-ci constitue l’unique moyen d’établir la situation de cette personne« , la prise d’empreintes digitales ou de photographies peut intervenir après information préalable du Procureur de la République.

Ce même magistrat qui est avisé de retenue dès l’origine, reçoit, par ailleurs, communication du procès-verbal établi au cours de la mesure.

Pour autant, son rôle semble limité par la concurrence des services préfectoraux dont dépend l’issue de la mesure.

Les juges de la Cour de Cassation ont, d’ailleurs, eu l’occasion de préciser que le défaut de communication du procès-verbal ne porte pas, en soi, atteinte aux droits de l’étranger (4).

Au contraire, le rôle actif du Préfet au cours de la retenue rappelle que cette mesure peut être un préalable au maintien en rétention administrative.

Les valeurs familiales coercitives :

Le contentieux du droit des étrangers ne peut ignorer les enjeux dont il peut être l’objet et les regards qui se tournent vers lui.

Aussi, les circonstances de la naissance de l’article L. 611-1-1 ont suscité des inquiétudes sur le détournement de la retenue pour vérification du droit au séjour.

Cette mesure de police administrative s’est donc très vite revendiquée des principes de nécessité et de proportionnalité propres à toutes contraintes et privations de liberté.

Ils se retrouvent dans les dispositions de l’article 63 du Code de procédure pénale, qui soulignent que les nécessités de l’enquête tiennent la garde à vue (5).

Ils sont également présents à l’article L. 551-1 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, puisque la rétention administrative est, quant à elle, encadrée par le temps strictement nécessaire à l’organisation du départ de l’étranger (6).

Pour affirmer ses objectifs, la retenue n’a pu échapper à l’appréciation du juge, sa finalité risquant d’être malmenée par d’autres intérêts publics.

Les considérations tenant à la gestion des services préfectoraux étaient une évidente menace au respect des garanties de l’article L. 611-1-1 précité.

Par l’arrêt du 2 avril 2014, la Cour de Cassation a donc affirmé que l’étranger ne peut être retenu que pour le temps strictement exigé par l’examen de son droit de circulation ou de séjour et, le cas échéant, le prononcé et la notification des décisions administratives applicables.

Pour autant, les juges de la Haute Cour ont mis un cran d’arrêt à l’interprétation trop large du texte en retenant qu’il n’imposait pas de diligences continues dans le délai légal de seize heures.

En l’espèce, le contrôle d’identité, l’examen de la situation du retenu ainsi que son audition s’étaient déroulés de 16 h 50 à 20 h 30.

La décision préfectorale en attente est intervenue le lendemain matin, sans que la durée de la mesure excède le délai de seize heures.

Difficile, dans ces conditions, pour la Cour de Cassation, d’en déduire un caractère excessif de la durée de la retenue au regard de l’article L. 611-1-1 et d’ignorer le déroulement de cette mesure.

En effet, aucune diligence n’avait été accomplie à la tombée de la nuit… sauf de vaines tentatives des fonctionnaires de police pour contacter l’avocat de permanence.
________________________________________
(1) CJUE, 28 avril 2011, aff. C-61/11 PPU
(2) CJUE, 6 décembre 2011, aff. C-329/11
(3) Cass. crim., 5 juin 2012, n° 11-19.250 ; Cass. civ 1, 5 juillet 2012, FS-P+B+R+I, n° 11-30.371, n° 11-19.250 et n° 11-30.530
(4) Cass. civ. 1, 18 décembre 2013, n° 13-50.010, FS-P+B+I
(5) Cass. civ.1, 25 novembre 2009, n° 08-20.294, F-D
(6) CE 10° s-s., 21 mars 2003, n° 236966, inédit au recueil Lebon

De l’effet boomerang de la QPC sur l’appel de la partie civile en matière correctionnelle

Le 20/02/14

Depuis plus de 5 ans, la question prioritaire de constitutionnalité n’en finit pas de nourrir les saisines du Conseil Constitutionnel, de grossir la jurisprudence des sages et d’alimenter les commentaires d’auteurs .

 

En cultivant la légalité, elle fait parfois germer de nouvelles législations dans tous les domaines du droit.

 

 

La réforme du 23 juillet 2008 a ainsi permis aux justiciables de revenir sur les lois déjà entrées en vigueur pour les soumettre à un contrôle de conformité à la Constitution.

 

Les Sages du Conseil jusqu’alors cantonnés à intervenir à la naissance des textes sont amenés désormais à intervenir tout au long de la vie d’une législation.

 

 

Le 8 novembre 2013, ils ont ainsi opéré leur contrôle à la suite d’une saisine de la Cour de Cassation survenue dans des circonstances toutes particulières.

 

La question prioritaire de constitutionnalité qui leur était posée, tenait à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit de l’article 497 du Code de Procédure Pénale.

 

Celui-ci dispose que lorsqu’un jugement a été rendu par un Tribunal Correctionnel :

 

« La faculté d’appeler appartient :

1° Au prévenu ;

2° A la personne civilement responsable quant aux intérêts civils seulement ;

3° A la partie civile, quant à ses intérêts civils seulement ;

4° Au procureur de la République ;

5° Aux administrations publiques, dans les cas où celles-ci exercent l’action publique ;

6° Au procureur général près la cour d’appel ».

 

 

Ce texte limite donc le droit d’appel de la partie civile aux seuls intérêts civils, à l’exclusion des dispositions pénales.

 

De ce fait, il est impossible à la victime d’une infraction de contester de sa seule initiative une décision de relaxe.

 

Seul le Procureur de la République est en position d’interjeter appel du jugement qui renvoie le prévenu des fins de poursuites.

 

 

Cette question de l’appel limité de la partie civile n’était cependant pas nouvelle car elle avait déjà donné lieu à deux jurisprudences de la Cour de Cassation, interpelée par une question prioritaire de constitutionnalité.

 

 

En 2010, l’appréciation des juges avait conduit à écarter le moyen tiré de l’atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution, à savoir le droit d’accès au juge, les droits de la défense et le droit à l’égalité devant la justice.

 

La Cour de Cassation avait refusé la saisine du Conseil Constitutionnel en relevant :

 

« Mais attendu que la question, ne portant pas sur l’interprétation d’une disposition constitutionnelle dont le Conseil constitutionnel n’aurait pas encore eu l’occasion de faire application, n’est pas nouvelle.

 

Et attendu que la question posée ne présente pas un caractère sérieux dès lors que la cour d’appel, saisie par le seul recours de la partie civile, si elle ne peut prononcer de peine à l’encontre du prévenu définitivement relaxé, l’action publique n’étant exercée que par le ministère public ou les fonctionnaires auxquels elle est confiée par la loi, est tenue de rechercher si les faits déférés constituent une infraction pénale avant de se prononcer sur les demandes de réparation de la partie civile ».

Cass. Crim.16 juillet 2010 Pourvoi n° 10-81659

 

 

Deux ans plus tard, les juges de la même chambre criminelle avaient, de nouveau, à connaitre la question de constitutionnalité de l’article 497 du Code de Procédure Pénale.

 

Ils avaient réaffirmé leur opposition à la saisine du Conseil Constitutionnelle en affinant leur réponse :

 

« Attendu que la question, ne portant pas sur l’interprétation d’une disposition constitutionnelle dont le Conseil constitutionnel n’aurait pas encore eu l’ occasion de faire application, n’est pas nouvelle ;

 

Et attendu que la question posée ne présente pas, à l’évidence, un caractère sérieux dès lors que la cour d’appel, saisie par le seul recours de la partie civile, laquelle n’est pas placée dans une situation identique à celle du prévenu ou à celle du ministère public, si elle ne peut statuer que sur les intérêts civils et n’a pas la faculté de prononcer de peine à l’encontre du prévenu définitivement relaxé, l’action publique n’étant exercée que par le ministère public ou les fonctionnaires auxquels elle est confiée par la loi, est tenue de rechercher si les faits, objet de la prévention, caractérisent une faute conférant à la victime le droit d’obtenir du prévenu définitivement relaxé réparation du préjudice en découlant ».

Cass. Crim. 26 septembre 2012 Pourvoi n° 12-84796

 

 

 

Mais on dit « Jamais deux sans trois »…

 

L’énergie du désespoir de la relaxe a donc conduit un justiciable à frapper une troisième fois aux portes du palais de justice de PARIS.

 

Et par accident que le 5 novembre 2013, la Cour de Cassation s’est trouvé contrainte de renvoyer au Conseil Constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité portant sur l’article 497 du Code de Procédure Pénale.

 

 

C’est à l’article 23-7 de l’ordonnance du 7 novembre 1958 qu’on doit la levée du refus de la saisine des Sages, article selon lequel :

 

« Si le Conseil d’État ou la Cour de cassation ne s’est pas prononcé dans les délais prévus aux articles 23-4 et 23-5, la question est transmise au Conseil constitutionnel ».

 

 

 

En effet, la Cour de Cassation a laissé expirer le délai de trois mois qui lui était imparti pour examiner la question prioritaire de constitutionnalité.

 

Par manque de célérité ou par surabondance de contraintes, la saisine du Conseil Constitutionnel s’est finalement imposée.

 

 

Pour autant, la Cour de Cassation ne s’est pas retrouvée désavouée par les Sages qui, tout en reprenant son analyse juridique, ont mis définitivement fin à l’effet boomerang de la QPC de l’article 497 du Code de Procédure Pénale.

 

Enfin interrogé, le Conseil Constitutionnel retient :

 

« Considérant, d’une part, que la partie civile n’est pas dans une situation identique à celle de la personne poursuivie ou à celle du ministère public ; qu’il en est notamment ainsi, s’agissant de la personne poursuivie, au regard de l’exercice des droits de la défense et, s’agissant du ministère public, au regard du pouvoir d’exercer l’action publique ; que, par suite, l’interdiction faite à la partie civile d’appeler seule d’un jugement correctionnel dans ses dispositions statuant au fond sur l’action publique, ne méconnaît pas le principe d’égalité devant la justice ; que, d’autre part, la partie civile a la faculté de relever appel quant à ses intérêts civils ; qu’en ce cas, selon la portée donnée par la Cour de cassation au 3° de l’article 497 du code de procédure pénale, elle est en droit, nonobstant la relaxe du prévenu en première instance, de reprendre, contre lui, devant la juridiction pénale d’appel, sa demande en réparation du dommage que lui ont personnellement causé les faits à l’origine de la poursuite ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du droit à un recours effectif manque en fait ».

Décision n° 2013-363 QPC du 31 janvier 2014

 

« C’est pas ma faute ! » Réponse au rapport de septembre 2013 sur les dépenses de contentieux du ministère de l’Intérieur

Le 29/01/14

A la demande des ministres de l’Intérieur et de l’Économie notamment, Monsieur François LANGLOIS et Madame Chloé MIRAU de l’Inspection Générale de l’Administration se sont vu chargés d’une mission relative à l’évolution et à la maîtrise des dépenses de contentieux du ministère de l’Intérieur.

 

Ils ont ainsi procédé à une analyse de la gestion globale des dépenses accompagnée de propositions tendant à une réforme du pilotage des crédits axées autour des postes relevant:

 

– de l’indemnisation pour refus de concours de la force publique,

– du contentieux des étrangers,

– de la protection fonctionnelle

– et des dossiers d’accidents de la circulation.

 

 

Leur rapport de septembre 2013 traduit cependant une méconnaissance des législations actuelles dans les domaines présentés, des préoccupations des justiciables et du fonctionnement même de l’appareil judiciaire.

 

Le souci d’économie clairement affiché aboutit également à malmener la Profession d’Avocat dans sa fonction d’auxiliaire de Justice.

 

L’esprit de ce rapport peut ainsi se résumer en une citation de Blaise PASCAL :

 

« L’affection ou la haine changent la justice de face. Et combien un avocat bien payé par avance trouve-t-il plus juste la cause qu’il plaide! Combien son geste hardi le fait-il paraître meilleur aux juges, dupés par cette apparence! ».

 

 

En prenant une motion dénonçant « les attaques répétées contre la profession d’avocat, pourtant indispensable au respect de l’Etat de droit », plusieurs barreaux ont réagi successivement:

 

– tout d’abord, les Conseils de l’Ordre du VAL DE MARNE et de LA SEINE SAINT DENIS réunis le 9 janvier 2014

– suivis par le Conseil de l’Ordre de PARIS réuni le 10 janvier 2014,

– renforcés par les Conseils de l’Ordre de STRASBOURG et de NANTES réunis les 20 et 21 janvier 2014,

– Et enfin le Conseil de l’Ordre de LYON réuni le 22 janvier 2014.

 

 

Une mise au point m’est apparue indispensable pour répondre aux affirmations qui se défont de la réalité au profit de la vérité budgétaire.

 

Compte tenu l’activité qui est la mienne, seul l’axe du contentieux des étrangers sera abordé.

 

 

 

Affirmation :

 

« Le contentieux des étrangers est en forte croissance (+25% en trois ans), du fait d’une juridictionnalisation difficilement soutenable à terme par les préfectures. Le dynamisme des avocats, certains par conviction d’autres seulement mobilisés par la facilité du gain, contribue d’autant plus à l’augmentation de la dépense que les juges prennent peu en compte la situation budgétaire de l’Etat et que la réduction des moyens alloués aux préfectures limite leur capacité de défense (Page 6).

 

(…)

 

Les préfectures et juges administratifs rencontrés par la mission font état de stratégies juridictionnelles toujours renouvelées de la part des avocats. Ils testent régulièrement de nouveaux moyens, qui obtiennent parfois la faveur du juge de première instance, générant pendant plusieurs mois une masse de contentieux, difficiles à gérer pour les préfectures, à la fois sur le plan de la charge de travail et de la doctrine juridique (Page 43) ».

 

 

Réponse :

 

Depuis plusieurs années, l’Europe a impulsé un virage au droit des étrangers que l’État n’a pas su négocier.

 

Cette évidente évolution s’est effacée du rapport de septembre 2013 au profit d’une vision bien éloignée, imposant un petit rappel.

 

 

En matière de rétention administrative, l’adoption de la Loi n°2011-672 du 16 juin 2011 a modifié l’ordre antérieur d’intervention des deux ordres juridictionnels pour donner la priorité au juge administratif.

 

Avant cette loi, le juge administratif était, en effet, amené à procéder au contrôle de légalité des arrêtés de placement en rétention uniquement si le juge judiciaire prolongeait le maintien de cette mesure au-delà de 48 heures.

 

Il statue désormais préalablement à la saisine du Juge des Libertés et de la Détention et connait donc une expansion du nombre de saisines.

 

Cette nouvelle organisation du contentieux de la rétention administrative n’a bien sûr pas été sans incidence sur l’activité des Tribunaux Administratifs.

 

 

Par ailleurs, la Directive « retour » directement invocable par les justiciables a donné lieu à plusieurs recours en annulation en raison de l’illégalité des décisions prises par les Préfets en méconnaissance de ce texte entre décembre 2010 et juin 2011.

 

Il convient de rappeler que la Loi n°2011-672 du 16 juin 2011 a assuré la transposition de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil avec retard.

 

L’État n’a pas respecté le délai – qui a expiré au 25 décembre 2010- laissé aux États membres pour intégrer les principes de cette directive en droit français.

 

Depuis lors, le Code de l’Entrée et du Séjour des Étrangers et du Droit d’Asile s’est enrichi de nouvelles règles dont l’interprétation requiert encore l’intervention du Juge Administratif.

 

 

Enfin, au-delà là de ces reformes, les Préfets ont contribué eux-mêmes à l’augmentation du contentieux des étrangers faisant l’objet d’une décision d’éloignement et placés en rétention administrative pour deux raisons :

 

– le recours trop rare à l’alternative de l’assignation à résidence prévue à l’article L561-2 du CESEDA,

– l’absence trop récurrente de délai départ volontaire assortissant les obligations de quitter le territoire sur le fondement de l’article L 511-1 II du même code.

 

 

Affirmation :

 

« Surtout, le dispositif d’aide juridictionnelle, instauré par la loi n°91 – 467 de 1991 pour éviter que les frais de justice ne soient un frein à l’accès au juge, lève tout obstacle à la multiplication des procédures. Quelle que soit l’issue de ces dernières, l’avocat est certain de bénéficier d’une rémunération minimale payée par l’Etat. Le risque lié à l’insolvabilité du client ne se pose pas (Page 43).

 

(…)

 

Certains avocats se sont spécialisés dans ce contentieux avec des motivations politiques ou humanistes, en lien avec le monde associatif qui soutient les étrangers. Par contre, il semblerait que d’autres avocats voient dans le contentieux des étrangers, contentieux plutôt simple techniquement et répétitif, une source lucrative de revenus. Plusieurs interlocuteurs de la mission, y compris des magistrats administratifs, lui ont ainsi indiqué avoir régulièrement constaté que des requérants ignoraient être conseillés par un avocat (Page 45) ».

 

 

Réponse :

 

A la lecture des conclusions de Monsieur François LANGLOIS et Madame Chloé MIRAU, les objectifs de l’intervention des avocats en droit des étrangers ne peuvent que surprendre.

 

Leurs motivations apparaissent bien vénales, empreintes de cupidité sans considération des intérêts des justiciables.

 

Est-ce à dire que les auxiliaires de Justice auraient perdu de vue leur fonction et leur rôle de défenseurs des droits ?

 

Les données fournies par le Rapport de diagnostic de novembre 2013 portant sur la modernisation de l’action publique (MAP) et l’évaluation de la gestion de l’aide juridictionnelle vont pourtant à l’encontre de cette vision :

 

« En 2012, plus d’un million de justiciables ont bénéficié d’une attribution d’AJ. 25.000 avocats ont assuré au moins une mission à ce titre dans le cadre juridictionnel et 17.000 hors juridiction (ex : en garde à vue). Les principaux postes de dépense d’AJ sont les suivants : contentieux familiaux (30%) ; contentieux pénaux (24%) ; garde à vue (14%) ; assistance éducative (5%) ».

 

 

Cette étude dresse, par ailleurs, le constat suivant :

 

« Le rapport des avocats à l’AJ est complexe en raison, aujourd’hui, de la diversité de cette profession, de son caractère évolutif, et des enjeux de l’AJ pour elle non univoques : destinataires finaux de l’AJ en tant que somme monétaire, les avocats s’en disent parfois aussi victimes à cause de son montant selon eux trop faible au regard du « point mort » d’un cabinet, c’est-à-dire du niveau de rémunération en dessous duquel l’exploitation d’un cabinet devient déficitaire. Plus largement la profession voit dans l’AJ « une ressource mais non un revenu parce qu’elle ne permet pas de payer les charges du cabinet et encore moins la rémunération du travail intellectuel » (CNB – 26 octobre 2013) ».

 

 

Enfin, le rapport de diagnostic de novembre 2013 explique :

 

« On observe enfin que l’AJ due dans le cadre des contentieux administratifs est budgétairement imputée à la mission Justice – programme Justice judiciaire, alors que la justice administrative ne relève plus aujourd’hui de la mission Justice mais de la mission Conseil et contrôle de l’Etat.

Cette dispersion du pilotage (encore s’en tient-on aux structures principalement concernées) peut préjudicier à la lisibilité du système par ses acteurs de terrain et à la cohérence des démarches ».

 

 

Le fonctionnement du système de l’aide juridictionnelle semble donc échapper aux rédacteurs du rapport sur l’évolution et la maitrise des dépenses de contentieux à la charge du ministère de l’Intérieur.

 

 

Dans ces circonstances, les observations sur la technicité du contentieux ne peuvent que se dispenser de tout développement.

 

Le renvoi aux articles de ce blog dans cette matière est bien suffisant.

 

 

Affirmation :

 

« Actuellement, il n’existe aucun dispositif qui permet de garantir que l’avocat ne bénéficie pas simultanément du versement de l’aide juridictionnelle et de la somme allouée par la juridiction (qui suppose que l’avocat a renoncé par écrit à l’aide juridictionnelle). C’est pourquoi, le service de l’action juridique et du contentieux (SAJC) de la préfecture de police (PP) envisage-t-il de demander désormais aux avocats de produire un justificatif émanant du bureau des affaires judiciaires attestant de l’effectivité de ce renoncement (Page 47) ».

 

 

Réponse :

 

Aucun avocat n’ignore la formule consacrée qui se retrouve communément dans les requêtes et mémoires présentés devant le Tribunal Administratif.

 

Au visa de la législation en vigueur, elle tend à :

 

« CONDAMNER le Préfet de….à verser au conseil de Mr/Mme… la somme de … euros au titre des dispositions des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991, et subsidiairement de l’article L 761-1 du Code de Justice Administrative ».

 

 

Cette formule couramment usitée prend tout son sens à la lecture de l’article 108 du Décret n°91-1266 du 19 décembre 1991 récemment modifié qui dispose :

 

« Lorsque l’avocat du bénéficiaire de l’aide juridictionnelle a recouvré la somme allouée sur le fondement de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991 dans le délai de douze mois à compter du jour où la décision est passée en force de chose jugée, il en avise sans délai le greffier ou le secrétaire de la juridiction qui a rendu la décision ainsi que la caisse des règlements pécuniaires dont il relève. Lorsqu’il renonce dans ce même délai à recouvrer cette somme ou qu’il n’en recouvre qu’une partie et que la fraction recouvrée n’excède pas la part contributive de l’Etat, il demande au greffe ou au secrétaire de la juridiction la délivrance d’une attestation de mission laquelle mentionne, le cas échéant, le montant des sommes recouvrées. A l’expiration du délai précité, l’avocat qui n’a pas sollicité la délivrance d’une attestation de mission, est réputé avoir renoncé à la part contributive de l’état ».

 

 

La défiance envers la Profession d’Avocat qui se dégage du rapport de l’Inspection Générale de l’Administration, ne se satisfait donc pas du contrôle des greffes des juridictions administratives et des CARPA imposé par ce texte.

 

Elle méconnait aussi les dispositions de l’article 1.3 du Règlement Intérieur National de la profession d’avocat (RIN) selon lesquelles :

 

« L’avocat exerce ses fonctions avec dignité, conscience, indépendance, probité et humanité, dans le respect des termes de son serment ».

 

Elle ignore surtout la qualité d’auxiliaire de justice de l’Avocat, la déontologie qu’elle lui impose et tous les corollaires qui s’y rattachent.

 

 

 

A regret, la tendance évoquée par Monsieur le Bâtonnier Christian Charrière-Bournazel, Ancien Président du Conseil National des Barreaux se confirme.

 

Ne disait-il pas dans son éditorial du 15 février 2013 que « par définition, le libéral serait malsain tandis que le fonctionnaire serait pur».

 

Dans le cas de la mission relative à l’évolution et à la maîtrise des dépenses de contentieux du ministère de l’Intérieur, cette vision est inquiétante.

 

 

Au final, le souci d’économie – qui concerne chaque contribuable – a limité le regard des rédacteurs du rapport de septembre 2013 à d’apparentes assertions.

 

Dans le contentieux des étrangers, il faut aussi se placer en amont, là où la décision attaquée est prise, où le litige nait, où les perspectives de juridictionnalisation trouvent leur origine.

 

Le traitement des dossiers d’étrangers dans le respect de la légalité et les moyens de fonctionnement des Préfectures ne peuvent donc être ignorés.

 

Ce n’est alors que bon sens de dire qu’ « on voit la paille dans l’œil de son voisin, mais pas la poutre dans le sien ».

 

 

 

A lire : Rapport de septembre 2013

 MOTION_BARREAU_LYON_22-01-2014

Qu’est-ce qu’être européen aujourd’hui ? Premier rendez-vous avec l’Europe : « je suis dans l’espace Schengen »

Le 22/01/14

Le 25 mai 2014, les français sont appelés à voter aux prochaines élections européennes pour choisir leurs représentants au Parlement Européen.

 

Pour certains, l’Europe est une évidence ; mais pour d’autres, elle apparait encore comme une inconnue aux traits incertains.

 

 

C’est ainsi que la levée au 31 décembre 2013 des restrictions pour exercer une activité professionnelle en tant que salarié ou indépendant applicables aux ressortissants roumains et bulgares depuis 2007 a ravivé les inquiétudes nées avec la signature du Traité de MAASTRICHT.

 

La vivacité des craintes ne semble pouvoir être adoucie qu’en répondant à une question : « Qu’est-ce qu’être européen aujourd’hui ? ».

 

 

Je vous propose de faire plus ample connaissance avec cette Europe de toutes les attentes en découvrant trois des caractères principaux qui la définissent :

 

– l’espace Schengen,

 

– l’Union Européenne,

 

– Et la zone euros.

 

 

A l’issue de cette rencontre, il n’appartiendra qu’à vous de vous sentir proche d’elle ou non…

 

 

 

 

 

 

 

Créé par l’accord du même nom signé le 14 juin 1985, l’espace Schengen est né le 26 mars 1995 de l’union du Benelux (Belgique, Pays-Bas et Luxembourg), de l’Allemagne (ex-RFA) et de la France.

 

Les Etats signataires affirmaient solennellement la finalité de leur engagement tendant à la libre circulation des personnes et des biens :

 

« CONSCIENTS que l’union sans cesse plus étroite des peuples des États membres des Communautés européennes doit trouver son expression dans le libre franchissement des frontières intérieures par tous les ressortissants des États membres et dans la libre circulation des marchandises et des services,

 

SOUCIEUX d’affermir la solidarité entre leurs peuples en levant les obstacles à la libre circulation aux frontières communes entre les États de l’Union économique Benelux, la République fédérale d’Allemagne et la République française ».

 

De leur union, est donc né un espace d’échanges composé des territoires des cinq Etats.

 

 

 

1/ Au fur à mesure des années, l’espace Schengen a regroupé de nouveaux membres jusqu’à rassembler 26 pays européens :

 

– 22 sont des États membres de l’Union Européenne : la Belgique, la République tchèque, le Danemark, l’Allemagne, l’Estonie, la Grèce, l’Espagne, la France, l’Italie, la Lettonie, la Lituanie, le Luxembourg, la Hongrie, Malte, les Pays-Bas, l’Autriche, la Pologne, le Portugal, la Slovénie, la Slovaquie, la Finlande et la Suède.

 

– 4 sont des États associés : Norvège, Islande, Suisse et Liechtenstein.

 

S’ajoute à cela une forme d’alliance entre les Etats signataires et l’Irlande ainsi que la Grande-Bretagne permettant à ces deux pays de participer à tout ou partie à l’acquis Schengen.

 

 

Au coeur de ce vaste espace, la coopération entre les pays s’impose sans qu’aucun membre ne renonce à sa souveraineté et donc à son territoire.

 

Les contrôles aux frontières intérieures sont ainsi supprimés alors que les contrôles aux frontières extérieures sont renforcés.

 

 

Mais afin de concilier liberté et sécurité, il a été nécessaire de mettre en place le Système d’Information Schengen (SIS).

 

Cet outil permet aux autorités nationales responsables des contrôles aux frontières et aux autorités douanières et de police chargées des contrôles au sein de l’espace Schengen de faire circuler des signalements concernant :

 

– des personnes recherchées ou portées disparues,

– des véhicules ou documents volés.

 

 

Cette base de données n’est pas un cas isolé en Europe, comparable au système d’information sur les visas (VIS), au système regroupant les données biométriques sur les demandes d’asile (EURODAC) ou au système d’Information hébergé par Europol (SIE).

 

 

Cependant, si le SIS apporte des garanties de sécurité à la libre circulation, il est à l’origine d’un contentieux lié à l’inscription et à la suppression des signalements.

 

Son application pour le contrôle des flux migratoires et le signalement pour non-admission des migrants est ainsi controversée et rallie autant de détracteurs que de soutiens.

 

Il faut souligner que face au géant SIS, c’est notre petite CNIL (Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés) qui est responsable du contrôle des données au niveau national et qui gère la procédure du droit d’accès indirect.

 

Le système SIS opérationnel depuis 1995 connait actuellement un nouveau développement avec son remplacement par SIS II.

 

 

C’est là l’évolution de l’accord initial Schengen et de la coopération entre Etats.

 

 

 

 

 

2/ Au fur à mesure des années, l’espace Schengen s’est aussi enrichi de règles communes définies autour de trois axes majeurs :

 

– Le premier axe repose sur l’harmonisation des conditions d’entrée et des visas pour les courts séjours.

 

Dans ce cadre, un code communautaire relatif au régime de franchissement des frontières par les personnes, appelé « Code Frontières Schengen », a été instauré par le Règlement (CE) n°562/2006 du 15 mars 2006.

 

On y retrouve les conditions d’entrée de l’article L211-1 du Code de l’Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d’Asile.

 

 

Mais la Directive (CE) 2008/115 dite « Retour » relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier est elle-aussi née de l’évolution Schengen.

 

Celle-ci a déjà fait couler beaucoup d’encres dans les pages de ce blog .

 

 

 

– Le deuxième axe tend à l’amélioration de la coopération policière et douanière que nécessitent les contrôles aux frontières extérieures de l’espace Schengen.

 

Ainsi la création de FRONTEX (Agence européenne pour la gestion de la coopération opérationnelle aux frontières extérieures des Etats membres de l’Union européenne) par le Règlement (CE) n°2007/2004 du 26 octobre 2004 répond ainsi à cet objectif.

 

Son action s’est retrouvée récemment au centre de débats à la suite des drames répétés qui se sont produits au large de l’île de LAMPEDUZA.

 

 

 

– Le troisième axe passe par le renforcement de la coopération judiciaire dans lequel le Système d’Information Schengen s’inscrit.

 

Le mandat d’arrêt européen codifié aux articles 695-11 et suivants du Code de Procédure Pénale est le fruit de cette coopération et issue d’une Décision-cadre 2002/584/JAI du 13 juin 2002.

 

La procédure d’extradition s’efface donc dans l’espace Schengen au bénéfice de cette procédure concernant l’arrestation dans un Etat des personnes recherchées dans un autre Etat suivie de leurs remises.

 

 

Pour autant, le plus grand apport dans la coopération judiciaire réside sans nul doute dans l’adoption du Règlement (CE) no343/2003 dit DUBLIN du 18 février 2003.

 

Ce texte a permis d’encadrer le traitement des demandes d’asile présentées dans l’un des États membres par un ressortissant d’un pays tiers.

 

 

 

La législation française a donc intégré l’acquis Schengen oscillant entre politique de contrôle, liberté des échanges et conditions d’accueil des migrants.

 

Aujourd’hui, l’espace couvert par les territoires des 28 États signataires, associés et « réservistes » se dirige vers une nouvelle expansion.

 

La Bulgarie, la Roumanie, Chypre et la Croatie sont, en effet, en attente de leur intégration.

 

Mais avant d’être admis, chaque nouveau pays doit satisfaire à certaines conditions dans les domaines des frontières aériennes, des visas, de la coopération policière et de la protection des données personnelles.

 

 

 

Si le traité d’Amsterdam signé le 2 octobre 1997 a prévu l’incorporation de l’accord de Schengen aux autres traités de l’Union Européenne, les deux associations sont distinctes.

 

 

 

 

A lire : http://europa.eu/legislation_summaries/other/l33183_fr.htm

 

Ce qu’il faut savoir sur la succession d’avocats dans un dossier

Le 08/01/14

Le libre choix de l’avocat est un principe fondamental de l’exercice de notre Profession liée à la relation de confiance qui unit le client à son conseil.

 

Lorsqu’il accepte de défendre les intérêts d’un justiciable, l’avocat suit un dossier jusqu’à l’événement mettant fin à son intervention.

 

Dans une procédure judiciaire, celle-ci commence par la saisine du client pour s’achever par la décision du juge ou son exécution.

 

 

C’est ainsi que selon l’article 13 du Décret n°2005-790 du 12 juillet 2005, « l’avocat conduit jusqu’à son terme l’affaire dont il est chargé, sauf si son client l’en décharge ou s’il décide de ne pas poursuivre sa mission ».

 

Il arrive donc parfois que plusieurs avocats se succèdent dans la gestion d’un même dossier ce qui entraine l’application conjuguées des dispositions propres à la Profession.

 

 

Je vous propose de nous intéresser à ces différentes règles qui permettent de protéger les intérêts du client tout en garantissant la sérénité de ses conseils successifs.

 

 

Les relations entre les avocats :

 

Les rapports entre les conseils successifs d’un même client relèvent d’une bonne entente et d’un respect mutuel.

 

Cordialité et délicatesse s’imposent aux avocats qui appartiennent à une profession réglementée relevant d’une organisation ordinale.

 

 

Pour autant, le changement de conseil n’est pas sans soulever des difficultés d’ordre pratique que le Règlement Intérieur National de la profession d’avocat tente de solutionner.

 

Ainsi le texte commande au nouvel avocat d’obtenir du client les informations concernant le précédent conseil en charge du dossier et de prendre attache auprès de lui sans délai.

 

En tout état de cause, l’article 9 prévoit que :

 

« Sauf accord préalable du bâtonnier, l’avocat qui accepte de succéder à un confrère ne peut défendre les intérêts du client contre son prédécesseur ».

 

 

De son côté, l’avocat dessaisi doit communiquer à son successeur les pièces en sa possession et « ne disposant d’aucun droit de rétention, doit transmettre sans délai tous les éléments nécessaires à l’entière connaissance du dossier ».

 

Le client n’a donc pas à souffrir dans la gestion de son affaire du remplacement de son premier conseil pour un suivant.

 

 

On ne rappellera donc jamais assez que « tous rapports entre avocats s’exercent dans un esprit de confraternité, de correction et de courtoisie » comme le souligne le Règlement intérieur du Barreau de Lyon à l’article LY 3.2.1.1.

 

 

Le règlement des honoraires de l’avocat dessaisi :

 

Un excès de naïveté pourrait pousser à écarter les aspects financiers et les conséquences pécuniaires qu’entraine un changement d’avocats.

 

Une telle approche reviendrait à nier que la rémunération d’un avocat est parfois à l’origine de la rupture avec son client :

 

– Soit que le client conteste le montant des honoraires qui lui sont réclamés et décide de cesser la collaboration,

– Soit que l’avocat interrompe sa mission avant de se décharger du dossier suite à une absence de règlement de ses prestations.

 

Bien que la transparence permette la plupart du temps d’éviter de telles déconvenues, il arrive que la finance fasse loi dans les rapports entre le mandant et son mandataire.

 

 

Là encore, le Règlement Intérieur National de la profession d’avocat dans son article 9 précise les démarches à suivre pour repartir sur de nouvelles bases.

 

Aussi est-il prévu que :

 

« L’avocat qui accepte de succéder à un confrère doit, avant toute diligence, le prévenir par écrit et s’enquérir des sommes pouvant lui rester dues.

(…)

Le nouvel avocat s’efforce d’obtenir de son client qu’il règle les sommes restant éventuellement dues à un confrère précédemment saisi du dossier. S’il reçoit du client un paiement alors que des sommes restent dues à son prédécesseur, il en informe le bâtonnier ».

 

 

En cas de difficultés, il appartiendra au Bâtonnier de régler le problème car le dessaisissement d’un pour un autre ne doit se faire au détriment pécuniaire d’aucun des deux.

 

Il n’est d’ailleurs pas rare qu’une procédure de contestation des honoraires de l’ancien conseil soit initiée concomitamment au changement d’avocats ou s’en suive.

 

 

Les clients doivent demeurés conscients de la portée des engagements qu’ils prennent envers leur avocat et des conséquences indirectes de la rupture.

 

En effet, les conventions d’honoraires au forfait que certains Ordres présentent en modèle, stipulent parfois les clauses suivantes :

 

« En cas de rupture anticipée par le client du mandat confié à l’avocat celui-ci percevra l’intégralité du forfait prévu lequel deviendra immédiatement exigible, le solde éventuellement dû jusqu’au terme du présent contrat étant acquis à titre de clause pénale.

En cas de rupture anticipée par l’avocat, les honoraires dus seront évalués au temps passé sans jamais pouvoir dépasser la moitié du forfait prévu, le surplus éventuellement dû étant acquis au client à titre de clause pénale ».

 

 

La succession d’avocats et l’aide juridictionnelle :

 

Lorsque le client est admissible à l’aide juridictionnelle partielle ou totale, la question financière ne disparait pas pour autant en cas de changement de conseil.

 

D’autant que tous les avocats n’acceptent pas d’intervenir dans un dossier au titre d’une prise en charge de l’Etat.

 

Entre indemnité publique et règlement d’honoraires, les intérêts pécuniaires en jeu ne sont évidemment pas les mêmes…

 

 

Les rapports financiers entre avocats « à l’AJ» sont donc organisés par l’article 19 du Décret n°2005-790 du 12 juillet 2005 relatif aux règles de déontologie de la profession d’avocat.

 

Le Règlement Intérieur National de la profession d’avocat reprend ces dispositions dans son article 9.3 précisant que :

 

« L’avocat qui succède à un confrère intervenant au titre de l’aide juridictionnelle ne peut réclamer des honoraires que si son client a expressément renoncé au bénéfice de celle-ci. Il informe auparavant son client des conséquences de cette renonciation. En outre, il informe de son intervention son confrère précédemment mandaté, le bureau d’aide juridictionnelle et le bâtonnier ».

 

Dans le cas où deux avocats intervenant à l’aide juridictionnelle se succèdent dans un dossier, ils devront se partager une seule et même indemnisation correspondant à une seule et même procédure : Il n’y aura alors pas de nouvelle décision du Bureau d’Aide Juridictionnelle mais une simple modification.

 

 

Conformément à l‘article 103 du Décret n°91-1266 du 19 décembre 1991 , le partage d’aide juridictionnelle suite à la succession d’avocats s’organisera ainsi :

 

« Lorsqu’un avocat désigné ou choisi au titre de l’aide juridictionnelle est, en cours de procédure, remplacé au même titre pour raison légitime par un autre avocat, il n’est dû qu’une seule contribution de l’Etat. Cette contribution est versée au second avocat, à charge pour lui de la partager avec le premier dans une proportion qui, à défaut d’accord, est fixée par le bâtonnier.

Dans le cas où les avocats n’appartiennent pas au même barreau, la décision est prise conjointement par les bâtonniers des barreaux intéressés.

Les mêmes règles sont applicables lorsque le remplacement a lieu au cours de pourparlers transactionnels ».

 

Le bureau d’Aide Juridictionnelle et le Bâtonnier s’imposent donc en garant de l’affectation et du règlement des fonds publics.

 

 

 

Il ressort de ce qui précède que le libre choix de l’avocat implique un droit au changement parfaitement organisé.

 

Les textes régissant ce cas de figure permettent ainsi de concilier tous les intérêts en présence en évitant les abus.

 

Le seul profit que le client peut retirer de la succession d’avocats, c’est le bénéfice d’une défense conforme à ses attentes et une collaboration en toute confiance.

 

 

En tout état de cause, il doit avoir conscience que son conseil n’est tenu à son égard qu’à un devoir de conseil et à une obligation d’information durant toute la durée de son intervention.

 

L’avocat n’est soumis à aucune obligation de résultat dans le cadre d’une procédure judiciaire dont l’issue dépend du pouvoir d’appréciation des juges du fonds.

 

 

Portée de la table de référence des pensions alimentaires et office du juge

Le 28/10/13

Dans le cadre d’une procédure de divorce ou de fixation de la contribution à l’entretien et l’éducation d’enfant, le Juge aux Affaires Familiales doit se pencher sur la situation économique des parents.

 

C’est ainsi qu’il évalue leurs capacités financières au vu des ressources et des charges de chacun afin de déterminer le quantum de la pension qui sera versée par le père ou la mère au titre des aliments.

 

 

L’article 371-2 du Code Civil dispose, en effet, que :

 

« Chacun des parents contribue à l’entretien et à l’éducation des enfants à proportion de ses ressources, de celles de l’autre parent, ainsi que des besoins de l’enfant.

Cette obligation ne cesse pas de plein droit lorsque l’enfant est majeur ».

 

 

Pour faciliter cette analyse et homogénéiser les pratiques locales, le ministère de la Justice a établi une table de référence indicative pour la fixation de la contribution à l’entretien et l’éducation des enfants (CEEE) après la séparation des parents.

 

Cet outil de travail diffusé en annexe de la circulaire CIV/06/10 du 12 avril 2010 présente une grille d’évaluation tenant compte des modalités d’accueil de l’enfant (résidence alternée, droit de visite et d’hébergement simple ou élargi).

 

 

Cependant, si l’utilité de ce support n’est pas discutable, il ne peut lui être attribué qu’une portée toute relative.

 

Le Juge peut être guidé par la table de référence mais n’est jamais dispensé d’apprécier :

 

– les besoins de l’enfant eu égard à son âge, à ses habitudes de vie et aux soins qui lui sont indispensables,

– les capacités contributives du débiteur en tenant compte de ses charges, de sa situation personnelle et de la nature de ses ressources.

 

 

Les juges de la Cour de Cassation ont fermement rappelé ce principe en sanctionnant la décision d’une cour d’appel fixant le montant d’une pension alimentaire en se fondant sur la table de référence :

 

« Attendu que, pour condamner M. X… à verser une contribution à l’entretien et à l’éducation de l’enfant, l’arrêt énonce, d’une part, que la table de référence “indexée” à la circulaire du 12 avril 2010 propose de retenir pour un débiteur, père d’un enfant, disposant d’un revenu imposable de n… euros par mois et exerçant un droit d’accueil “classique” une contribution mensuelle de n… euros, d’autre part, que l’exercice d’un droit d’accueil restreint augmente, de façon non négligeable, les charges du parent au domicile duquel l’enfant réside ;

Qu’en fondant sa décision sur une table de référence, fût-elle annexée à une circulaire, la cour d’appel, à laquelle il incombait de fixer le montant de la contribution litigieuse en considération des seules facultés contributives des parents de l’enfant et des besoins de celui-ci, a violé, par fausse application, le texte susvisé »

Cass. Civ. 1ère 23 octobre 2013 Pourvoi n°12-25301

 

 

En cela, cette jurisprudence est parfaitement conforme à la circulaire CIV/06/10 du 12 avril 2010 qui présente la table annexée comme une référence indicative et non un barème obligatoire.