Le 13/03/13
C’est avec plaisir que j’accueille de nouveau dans ses pages une publication de Myriam DELONCA, Avocat au Barreau de Lyon.
Je la remercie vivement pour son intervention et son point de vue avisé en droit du travail.
Forte de son succès, la rupture conventionnelle est à l’origine de l’homologation de plus d’un million de résiliation de contrat de travail depuis son entrée en vigueur en 2008.
Au sens littéral, elle peut se définir comme un accord amiable permettant de rompre la convention liant l’employeur et le salarié dans le cadre de l’exécution d’une activité professionnelle.
La rupture conventionnelle répond aux exigences d’une procédure spécifique sans nécessité de motifs de licenciement, encadrée par deux entretiens et organisée sous le contrôle de l’Inspection du Travail.
C’est ainsi que dans un souci de protection des parties, cette procédure est soumise à l’homologation des services de l’Inspection du Travail (DIRRECTE).
Au-delà des enjeux sociaux, la rupture conventionnelle est au centre d’intérêts pécuniaires car elle ouvre droit au versement d’une indemnité également spécifique.
Son montant ne peut pas être inférieur à l’indemnité légale de licenciement ou à l’indemnité conventionnelle et peut faire l’objet de négociations avec l’employeur.
Il s’agit alors d’une indemnité supplémentaire qui peut être versée lors de la rupture conventionnelle ou dans un deuxième temps lors d’une éventuelle transaction postérieure et qui est calculée sur la base des 12 derniers mois ou des trois derniers mois (y compris les gratifications).
Rappelons que l’indemnité légale de licenciement est de un cinquième de mois de salaire par année d’ancienneté, auquel s’ajoutent deux quinzièmes de mois par année au-delà de 10 ans d’ancienneté.
Mais la convention collective applicable au contrat de travail peut parfois proposée un calcul d’indemnité plus avantageux.
Vous aurez donc compris que si la rupture conventionnelle est plus simple et plus souple qu’un licenciement, elle ne doit pas être usitée à la légère car des écueils persistent aussi bien pour le salarié que pour l’employeur.
Aussi, voici les réponses qui peuvent être apportées aux questions courantes qui se posent au salarié et à l’employeur pour la mise en oeuvre de cette procédure.
La rupture conventionnelle, une bonne option pour un salarié ?
Dans la pratique, la rupture conventionnelle est parfois utilisée par un salarié qui envisage de démissionner afin de percevoir plus rapidement l’allocation chômage.
En effet, une démission conduit à un délai de carence de 4 mois lors de la perception de l’allocation « chômage ».
Bien sûr, cette pratique vide de son sens la rupture conventionnelle.
C’est ainsi que la rupture conventionnelle peut être refusée par l’employeur car cette dernière a un coût comme cela a été précisé.
La rupture conventionnelle et l’indemnité de préavis :
Il est important de souligner que lors d’une rupture conventionnelle, aucune indemnité de préavis n’est versée.
Cette perte ne doit pas être négligée : elle peut, en effet, être conséquente sachant, à titre d’exemple, qu’elle correspond à 3 mois de salaire brut pour les salariés.
La rupture conventionnelle pendant les congés :
Dans le cadre d’une suspension du contrat de travail comme les congés payés, le congé parental d’éducation, les congés sans solde, il est possible d’envisager une rupture conventionnelle.
En revanche, lors d’un congé pour maternité, d’un accident de travail ou d’une maladie professionnelle, il conviendra de respecter les périodes de protection prévu par le code du travail avant d’envisager une rupture conventionnelle.
Egalement en cas de maternité, la salariée bénéficie d’une protection particulière prévue par le Code du Travail.
L’indemnité de rupture conventionnelle et sa taxation :
L’indemnité perçue lors d’une rupture conventionnelle, est exonérée uniquement à hauteur de deux fois la rémunération annuelle brute perçue au cours de l’année civile précédant la rupture du contrat de travail.
Pour autant, elle n’est pas nécessairement exonérée de cotisations sociales et peut être soumise à la CSG CRDS selon des règles précises d’exonération prenant en compte l’indemnité spécifique de rupture conventionnelle, l’indemnité versée (si supplémentaire) et le plafond de la sécurité sociale.
Le formulaire de procédure précise donc que les montants sont bruts à défaut de négociation précisant la prise en charge du montant.
Compte tenu de la technicité, il semble indispensable de solliciter l’avis d’un expert et de prendre conseil sur le calcul de ce montant.
La mise à la retraite ou une rupture conventionnelle ?
Si le salarié peut bénéficier d’une pension de retraite de base , peu importe qu’il soit à taux plein ou non, l’intégralité de l’indemnité spécifique de rupture conventionnelle sera soumise à la CSG CRDS (8% environ ) sans exonération.
De plus, il est important de distinguer la mise à la retraite par l’employeur et la demande de départ à la retraite par le salarié.
Les conditions de départ ne donnent pas lieu au versement d’indemnités identiques en fonction des conventions collectives.
L’indemnité de mise à la retraite est parfois supérieure à l’indemnité de départ à la retraite.
La vigilance est donc de mise…
La rupture conventionnelle, une bonne option pour l’employeur ?
Le forfait social mis en place par la loi de finances 2013 doit être pris en compte.
En effet pour l’employeur, aux charges sociales applicables sur le montant de l’indemnité (en fonction des exonérations selon le plafond de la sécurité sociale), s’ajoute désormais un forfait social de 20% (Article L 137-15 et suivants du Code de la sécurité sociale ).
En dehors de ce forfait, l’employeur sera amené à s’interroger sur les mêmes points que dans une procédure de licenciement.
La première illustration concerne la situation du salarié protégé, la demande de rupture conventionnelle étant soumise à l’homologation de l’inspection du travail selon un formulaire spécifique.
Le second exemple s’applique à la clause de non-concurrence pouvant donner lieu à renoncement ou versement de l’indemnité prévue.
La date de rupture du contrat de travail :
Alors que l’article L 1237-13 du Code du Travail dispose que la convention de rupture fixe la date de rupture du contrat de travail, le formulaire prévoit une date envisagée.
Il est donc indispensable de convenir par écrit la date de rupture effective du contrat de travail d’un commun accord entre le salarié et l’employeur.
La prise des congés payés non soldés pourra être prise en compte dans la détermination de cette date.
L’accord transactionnel postérieur à la rupture conventionnelle :
Il est utile de rappeler que la rupture conventionnelle malgré son caractère consensuel se distingue de la transaction.
Par définition, la rupture conventionnelle ne règle que la rupture du contrat.
Aussi le salarié est-il libre d’attaquer son employeur au titre de l’exécution du contrat postérieurement à la signature de la rupture conventionnelle.
Tel est le cas lorsqu’il existe un litige portant sur la rémunération variable ou encore les congés payés.
Au fil de cette présentation, il ressort de cet éclairage que tout est affaire de dialogue entre salarié et employeur.
Avant toute chose, la rupture conventionnelle ne peut être imposée par l’une ou l’autre des parties pour mettre fin au contrat de travail.
Alors il faudrait envisager un autre moyen de rupture…
Myriam DELONCA
Avocat au barreau de LYON
myriamdelonca@gmail.com