Etudiants étrangers et jeunes diplômés : l’évolution de l’autorisation provisoire de séjour et ses conséquences

L’installation dans un pays pour un étranger qui quitte son pays d’origine, ne réside pas toujours du choix de s’éloigner de ses racines.

Persécutions raciales, risques de mort ou oppression de l’Etat contre ses citoyens sont autant de motifs de fuir l’endroit d’où l’on vient pour gagner la sécurité de le l’endroit où l’on va.

L’asile récemment modifié par la loi n°2015-925 du 29 juillet 2015 permet alors d’assurer à l’étranger protection et droit au séjour sur son sol.

 Loin de ces situations de profondes détresses, l’établissement en France peut ressortir d’une volonté liée à la vie privée, aux études ou à l’activité professionnelle.

Père de famille, conjoint de ressortissant français, étranger malade, salarié détaché, chercheur ou membre de la communauté artistique et culturelle, le droit au séjour recouvre une diversité de situations pour se calquer à la multitude de parcours de vie.

La Loi n° 2016-274 du 7 mars 2016 au droit des étrangers en France a apporté de nombreuses modifications à l’état du droit antérieur.

La situation des étudiants étrangers ayant achevé avec succès leur cycle de formation conduisant à l’obtention d’un diplôme français a ainsi été actualisé pour « attirer les mobilités de l’excellence, de la connaissance et du savoir ».

Le dispositif de l’autorisation provisoire de séjour (APS) a donc été élargi afin que la nouvelle rédaction de l’article L 311-11 du CESEDA prenne en considération de la création de la carte de séjour pluriannuelle.

Mais la grande évolution réside dans la possibilité de délivrer une autorisation provisoire de séjour  (APS) aux diplômés ayant un projet de création d’entreprise dans un domaine correspondant à sa formation.

Depuis le 1er novembre 2016, les dispositions de l’article L 311-11 du CESEDA ont été modifiées et prévoient désormais :

 « Une autorisation provisoire de séjour d’une durée de validité de douze mois, non renouvelable, est délivrée à l’étranger ayant obtenu, dans un établissement d’enseignement supérieur habilité au plan national, un diplôme au moins équivalent au grade de master ou figurant sur une liste fixée par décret et qui :

« 1° Soit entend compléter sa formation par une première expérience professionnelle, sans limitation à un seul emploi ou à un seul employeur. Pendant la durée de cette autorisation, son titulaire est autorisé à chercher et à exercer un emploi en relation avec sa formation et assorti d’une rémunération supérieure à un seuil fixé par décret et modulé, le cas échéant, selon le domaine professionnel concerné.

A l’issue de cette période de douze mois, l’intéressé pourvu d’un emploi ou d’une promesse d’embauche satisfaisant aux conditions énoncées au premier alinéa du présent 1° est autorisé à séjourner en France au titre de la carte de séjour pluriannuelle mentionnée aux 1°, 2°, 4° ou 9° de l’article L. 313-20 ou de la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l’article L. 313-10, sans que lui soit opposable la situation de l’emploi ;

2° Soit justifie d’un projet de création d’entreprise dans un domaine correspondant à sa formation.
A l’issue de la période de douze mois mentionnée au premier alinéa du présent article, l’intéressé justifiant de la création et du caractère viable d’une entreprise répondant à la condition énoncée au premier alinéa du présent 2° est autorisé à séjourner en France sous couvert de la carte de séjour pluriannuelle mentionnée au 5° de l’article L. 313-20 ou de la carte de séjour temporaire mentionnée au 3° de l’article L. 313-10.
»

Cette disposition ne concerne pas cependant pas les étudiants algériens dont le droit au séjour en France est régi par les dispositions de l’accord franco-algérien du 27 décembre 1968.

Pour les ressortissant d’autres pays, l’APS de douze mois, non renouvelable, sera délivrée à l’étranger qui :

– soit entend compléter sa formation par une première expérience professionnelle ;
– soit justifie d’un projet de création d’entreprise dans un domaine correspondant à sa formation.

  • Vers l’exercice d’une première activité professionnelle… :

 Selon l’esprit du texte, l’étudiant étranger est autorisé à séjourner en France pour suivre ses études universitaires sous condition de justifier annuellement de leur sérieux et de leur évolution : il a donc vocation à rentrer dans son pays d’origine au terme de sa formation.

C’est la raison pour laquelle un titre de séjour lui est délivré dans un but d’apprentissage sans pour autant lui conférer le droit de s’installer durablement sur le territoire français.

Pour autant, à la fin de son cursus, l’étudiant jeune diplômé pourra prétendre au bénéfice d’une autorisation provisoire de séjour de douze mois l’issue de sa formation théorique.

Rappelons-le, l’un des objectifs de la réforme du 7 mars 2016 est de donner priorité aux mobilités internationales de l’excellence.

Comme l’étudiant jeune diplômé est une force vive dont les compétences sont susceptibles d’intéresser l’économie nationale, l’APS va lui permettre de pouvoir faire ses preuves en même temps que ses choix de vie future.

Durant les douze mois, le bénéficiaire de l’autorisation provisoire de séjour pourra chercher et exercer un emploi en relation avec sa formation et avec une rémunération supérieure à un seuil modulé.

En plus de compléter sa formation scolaire ou universitaire par une expérience pratique, la période sous APS peut être considérée comme une aide à la décision car elle peut donner une idée concrète d’un éventuel avenir professionnel sur le marché de l’emploi en France.

Elle pourra malheureusement aussi mettre en exergue les difficultés économiques ou les obstacles à l’embauche.

Dans tous les cas, l’APS offre la possibilité d’exercer une activité professionnelle auprès d’un ou plusieurs employeurs successifs durant un an.

Pour ce faire, les demandeurs doivent être titulaires de diplômes au moins équivalents au master selon la liste fixée par l’arrêté du 12 mai 2011, à savoir :

« L’étranger doit présenter à l’appui de la demande prévue à l’article R. 311-35 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile l’un des diplômes suivants :

 1° Les diplômes conférant le grade de master ; (…)

2° Les titres et diplômes inscrits au niveau I au répertoire national des certifications professionnelles ;

3° Le diplôme de recherche technologique, le doctorat et l’habilitation à diriger des recherches ;

4° Sans préjudice des dispositions relatives à l’exercice de ces professions, le diplôme d’État de docteur en médecine, chirurgie dentaire, pharmacie, le certificat d’études cliniques spéciales mention orthodontie, le diplôme d’études supérieures de chirurgie buccale, l’attestation d’études approfondies en chirurgie dentaire, le diplôme d’études spécialisées de médecine, de pharmacie et de biologie médicale, le diplôme d’études spécialisées complémentaires de médecine et de biologie médicale ;

5° Le diplôme supérieur de comptabilité et de gestion, et le diplôme d’expertise comptable ;

6° Le diplôme de paysagiste DPLG ;

7° Le diplôme national d’œnologue ;

8° Les diplômes de spécialisation et d’approfondissement en architecture ;

9° Le diplôme de l’École nationale supérieure des arts et techniques du théâtre ;

10° Le diplôme de l’École nationale supérieure Louis Lumière ».

Le décret n° 2016-1463 du 28 octobre 2016 est venu ajouter à cette liste préexistante les diplômes de niveau I labellisés par la Conférence des grandes écoles et le diplôme de licence professionnelle (Article D313-16-5 du CESEDA).

Cette période d’un an pourra donc un tremplin à une installation durable sur le territoire française à l’étranger.

En effet, s’il dispose d’un emploi ou d’une promesse d’embauche satisfaisant
aux conditions légales à l’issue de cette année test,  l’étranger pourra solliciter la délivrance d’une carte de séjour pluriannuelle « salarié » d’une durée maximale de quatre ans sur le fondement de l’article L 313-10 du CESEDA.

Il est à noter que « la carte de séjour est délivrée, sans que lui soit opposable la situation de l’emploi, à l’étudiant étranger qui, ayant obtenu un diplôme au moins équivalent au grade de master ou figurant sur une liste fixée par décret dans un établissement d’enseignement supérieur habilité au plan national, souhaite exercer un emploi salarié et présente un contrat de travail, à durée indéterminée ou à durée déterminée, en relation avec sa formation et assorti d’une rémunération supérieure à un seuil déterminé par décret en Conseil d’Etat ».

 Le bénéficie de la non-opposabilité de la situation de l’emploi est donc conditionné au respect d’un seuil de rémunération conforme au niveau d’études et au lien de l’emploi avec les études suivies.

 

  • ..ou vers la création d’entreprise dans un domaine correspondant à la formation :

– L’APS peut également donner l’envie de créer en France son entreprise pour s’implanter sur le marché porteur et rentable.

Bien sûr la première expérience professionnelle permise par l’APS permettra de se frotter aux réalités économiques pour déterminer si le projet est réalisable.

Le jeune diplômé a donc douze mois d’expérience pour décider de se lancer et  présenter des gages de caractère de rentabilité de son projet.

Si la sa création d’entreprise envisagé est viable, il pourra entreprendre et se lancer dans son entreprise grâce à la délivrance d’une carte de séjour temporaire « entrepreneur/profession libérale ».

Cette première option est, en effet, prévue par l’article L 313-10 du CESEDA qui dispose ainsi :

 « Une carte de séjour temporaire, d’une durée maximale d’un an, autorisant l’exercice d’une activité professionnelle est délivrée à l’étranger :

(…)

3° Pour l’exercice d’une activité non salariée, économiquement viable et dont il tire des moyens d’existence suffisants, dans le respect de la législation en vigueur. Elle porte la mention “ entrepreneur/ profession libérale».

L’article R 313-17 du CESEDA vient compléter ce dispositif en précisant :

« Pour l’application du 3° de l’article L. 313-10, l’étranger qui vient en France pour y exercer une activité professionnelle non soumise à l’autorisation prévue à l’article L. 341-2 du code du travail présente, outre les pièces prévues à l’article R. 313-1, celles justifiant qu’il dispose de ressources d’un niveau au moins équivalent au salaire minimum de croissance correspondant à un emploi à temps plein.

Dans les cas où il envisage d’exercer une activité réglementée, il justifie satisfaire aux conditions d’accès à l’activité en cause ».

Ainsi, ces dispositions posent les conditions suivantes à la délivrance d’une carte de séjour temporaire autorisant l’exercice d’une activité professionnelle :

– La présentation des justificatifs permettant d’évaluer la viabilité économique du projet de création d’entreprise,

– La garantie de moyens de subsistances suffisants tirés de cette activité (ressources d’un niveau au moins équivalent au Smic correspondant à un emploi à temps plein)

– Et le respect des règles professionnelles d’exercice.

Lors de l’instruction de cette demande, le Préfet saisira pour avis le directeur départemental ou, le cas échéant, régional des finances publiques du département dans lequel le jeune diplômé souhaite réaliser son projet.

– En dehors de cette situation, l’article 313-20 du CESEDA vient offrir une seconde option aux jeunes diplômés, créateurs d’entreprise visant à encourager l’initiative, l’innovation et l’audace.

Le passeport talents est une des mesures phares de la Loi du 7 mars 2016 au service de l’attractivité du pays.

La circulaire du 2 novembre 2016 du ministère de l’intérieur pris en application de la Loi du 7 mars 2016 précise ainsi que « la création du titre pluriannuel particulier, « passeport talents », constitue un outil majeur d’attractivité, attendus par les acteurs économiques, universitaires, scientifiques, culturels ou sportifs, tant en France qu’à l’étranger. Dans un monde concurrentiel, cet outil doit nous permettre d’attire en France les talents internationaux ».

Le passeport talents permet la délivrance d’une carte de séjour pluriannuelle portant cette mention, d’une durée maximale de quatre ans « à l’étranger ayant obtenu un diplôme équivalent au grade de master ou pouvant attester d’une expérience professionnelle d’au moins cinq ans d’un niveau comparable et qui, justifiant d’un projet économique réel et sérieux, crée une entreprise en France ».

Outre le diplôme au moins équivalent au master, l’article  R 313-57 du CESEDA fixe des conditions strictes à la délivrance ce fameux sésame « d’excellence » :

  • L’étranger doit produire les pièces justificatives permettant d’évaluer le caractère réel et sérieux de son projet économique,
  • Il doit justifier de disposer de ressources suffisantes pendant son séjour pour subvenir à ses propres besoins et, le cas échéant, à ceux des membres de sa famille, indépendamment de la solidarité nationale
  • Il doit attester d’un investissement d’au moins 30 000 € dans le projet d’entreprise,
  • Il doit justifier du respect de la réglementation en vigueur dans le domaine d’activité en cause.

L’autorité instruisant le dossier saisira pour avis le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi compétent dans le département dans lequel l’étranger envisage de créer son entreprise qui vérifiera la compatibilité de l’activité en cause avec la sécurité, la salubrité et la tranquillité publiques ainsi que, le cas échéant, l’absence de condamnation ou de décision emportant en France, l’interdiction d’exercer une activité commerciale.

Comme le souligne la circulaire du 2 novembre 2016, « la création d’une carte de séjour « passeport talent » (…) identifie dans un titre unique, de manière lisible et cohérente, les catégories d’étrangers talentueux dont l’expérience et la qualification doivent être reconnues ainsi que les différentes facilités qui leur sont accordées ».

Entre salarié étranger et entrepreneur étranger, l’autorisation provisoire de séjour élargit l’horizon des jeunes diplômés.

Cependant, il faudra s’armer de patience de savoir si ce nouveau dispositif répondra aux attentes des prétendants à l’installation mais également de l’Etat et des acteurs de l’économie.

De la rétention administrative à la rétention administrative : retour sur les amendements au projet de loi relatif au droit des étrangers adoptés le 26 janvier 2016

Depuis le 20 juillet dernier, les débats sont en cours sur le projet de loi relatif au droit des étrangers en France.

De l’assemblée nationale au sénat, le processus législatif a suivi son cours en 2015 dans le contexte d’une actualité tendue et troublée par le séisme terroriste.

Le 26 janvier 2016, le texte a été adopté en nouvelle lecture à l’assemblée nationale par la commission des lois après de nouveaux amendements.

C’est ainsi que l’article 1ER A adopté au Sénat prévoyant la possibilité pour le Parlement de déterminer le nombre des étrangers admis à s’installer durablement en France par période de trois ans a été supprimé.

L’amendement N°CL100 présenté par Monsieur BINET, rapporteur, a évité l’instauration d’un système de quotas déterminés par le Parlement pour chacune des catégories de séjour à l’exception de l’asile.

A son retour à l’assemblée nationale, la rétention administrative telle que prévue dans le projet de loi relatif au droit des étrangers en France a elle aussi été retouchée.

La question qui se pose est de savoir si cette mesure privative de liberté sera –encore- réformée après la Loi n°2011-672 du 16 juin 2011.

  • Vers une modification de l’ordre d’intervention des deux ordres juridictionnels :

Il y a quatre ans, le Juge des Libertés et la Détention s’était fait évincer de sa place de primo intervenant dan le contentieux de la rétention administrative.

Jusqu’alors, il n’était amené à statuer juste avant la fin du délai de cinq jours de la rétention administrative initiale aux fins de prolongation de la mesure.

Le Juge Administratif procédait au contrôle de la légalité du placement dans le cadre d’un recours pour excès de pouvoir avant que le Juge Civil vérifie la protection de la liberté individuelle sur saisine de Monsieur le Préfet.

Le Contrôleur Général des Lieux de Privation de Liberté n’avait jamais caché son opposition à cette organisation, directe conséquence de l’allongement de la rétention administrative.

Dans son rapport d’activité 2012, il relevait que « 2012 est la première année complète d’application de la loi du 16 juin 2011 (relative à l’immigration, à l’intégration et à la nationalité) qui modifie et amplifie les possibilités de recours à l’assignation à résidence (puisque désormais la rétention n’est possible que lorsque d’autres mesures sont inefficientes) et parallèlement, allonge la durée de la rétention, qui passe de 32 jours (au maximum) à 45 jours (au maximum) : une durée administrative de 5 jours au plus, suivie de deux périodes de 20 jours autorisées par le juge judiciaire ».

Dans ses rapports suivants, il n’a cessé de prôner le retour de la rétention administrative à une durée de 32 jours au total au lieu des 45.

Il a enfin été entendu…ou plutôt à moitié écouté.

Messieurs BINET, CORONADO et MOLAC ont déposé deux amendements N°CL37 et N°CL155 tendant modifié l’article 19 du projet de loi relatif au droit des étrangers en France limitant à quarante-huit heures la durée du placement en rétention décidé par l’autorité administrative.

La commission des lois a adopté ces deux modifications permettant de rétablir la rédaction du texte adoptée en première lecture par l’Assemblée nationale.

Le juge des Libertés et de la Détention devrait dès lors être saisi à l’expiration de la période de quarante-huit heures, et non plus après cinq jours pour autoriser la prolongation de la rétention.

Il redeviendrait le premier juge à faire face aux retenus.

Les causes de ce changement résideraient dans une volonté d’éviter de couvrir les irrégularités de procédure tenant aux contrôles illégaux, à l’absence d’interprète durant la garde à vue, la privation de liberté abusive les entraves à l’accès au médecin ou à l’avocat.

Dans son rapport de mai 2013, Matthias FEKL considérait que la situation actuelle « contrevient à l’évidence aux exigences de l’État de droit, au regard de la nécessité d’assurer une protection effective de la liberté individuelle ».

  • L’orée d’un nouveau séquençage de la rétention administrative :

Au vu de ce qui précède, on pourrait légitiment se dire que la réduction de la rétention administrative initiale prise par le Préfet ne peut conduire qu’à une diminution de la durée globale de la mesure, prolongations comprises.

Mais ce serait bien naïf de penser que les préconisations du Contrôleur Général des Lieux de Privation de Liberté et du rapport « Sécuriser les parcours des ressortissants étrangers en France » seraient suivies dans leur intégralité.

Cela reviendrait à ne laisser la puissance publique disposer que d’un délai de trente-deux jours pour éloigner un étranger, objet d’une mesure d’éloignement.

Alors que l’amendement N°CL156 prévoit une solution plus « adaptée » aux moyens à disposition de l’administration pour organiser son départ.

Et voilà comme l’article 19 bis A est rétabli dans la rédaction précédente voté en première lecture par l’Assemblée nationale.

Il tend à instaurer un nouveau séquençage de la rétention administrative en trois phases d’une durée respective de deux, vingt-huit et quinze jours.

Si la première et la troisième phase sont plus courtes de celle du système actuel, la deuxième est quant à elle plus longue.

La prolongation est augmentée de cinq jours supplémentaires, soit 1/4 de son temps pour 25 % de privation de liberté en plus sans contrôle judiciaire.

Il est difficile de ne pas voir dans cette nouvelle découpe du temps de la rétention administrative un opportunisme destiné à favoriser la mise en œuvre de l’éloignement.

Dans la prolongation, les consulats auront plus de temps pour délivrer les laisser-passé, l’OFPRA aura plus de temps pour se prononcer sur les demandes d’asile formulées au CRA, les préfectures auront plus de temps pour faire un routing … et les étrangers auront plus de temps en détention lors de la deuxième phase.

C’est qu’au final, la durée maximale de rétention de quarante-cinq jours n’est pas modifiée.

Le projet de loi relatif au droit des étrangers en France n’a pas fini de surprendre et d’interroger tant sur sa cohérence que sur on objectif.

Il est pour l’heure renvoyé à l’examen de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale.

Les discussions en séance publique reprendront le mardi 16 février 2016.

Des exigences de finalité et de temps dans la seconde prolongation de la rétention administrative

Le contentieux de la rétention administrative est un nœud de compétences entre le juge administratif et le juge civil. Légalité et liberté font de l’exécution des mesures d’éloignement un sujet de débat intarissable pour les praticiens du droit des étrangers. Certains voient dans cette dualité une inutile complexité procédurale tandis que d’autres valorisent cette parfaite illustration du rôle complémentaire des deux ordres juridictionnels.

Depuis l’entrée en vigueur de la Loi n°2011-672 du 16 juin 2011, tant le juge administratif que le juge civil cherchent de nouvelles marques à leur domaine d’intervention comme en témoignent les récentes jurisprudences du Conseil d’État et de la Cour de Cassation.

Le premier juge, déjà pleinement investi par la directive retour, ne s’est pas vraiment montré frileux à se saisir de cette évolution. Le second, au contraire, semble s’être retranché derrière la modification de son ordre d’intervention pour ancrer son contrôle dans un cadre plus restrictif que légaliste.

Mais les libertés publiques que le contentieux de la rétention administrative met en discussion, suscitent toutes les précautions et les vigilances des plus hautes juridictions.
En septembre dernier, la Cour de Cassation venait à sanctionner les juges d’appel pour avoir ordonné la prolongation d’une rétention administrative en jugeant « que le préfet avait effectué les diligences nécessaires en adressant après le week-end, soit trois jours après le début de la rétention, un courrier au consul de Tunisie aux fins d’obtenir un laissez-passer consulaire pour l’intéressé ».

Cass. Civ.1ère 23 septembre 2015 Pourvoi n° 14-25064

Dans un arrêt du 18 novembre 2015, elle se place cette fois dans le cadre d’une seconde prolongation de rétention pour affirmer que le Juge des Libertés et de la Détention doit s’assurer que les obstacles à l’exécution de la mesure d’éloignement peuvent être surmontés à bref délai avant d’ordonner le maintien au centre pour vingt jours supplémentaires.

Cass. Civ. 1ère 18 novembre 2015 Pourvoi n° 15-14560

Les juges de la Haute Juridiction redessinent donc les contours des obligations de l’administration au sens de l’article L 554-1 du CESEDA.

  • La finalité de principe de la rétention administrative :

Au terme d’un arrêt du 19 juin 2014, la Cour d’Appel de LYON a ordonné une nouvelle prorogation de vingt jours d’une mesure de rétention en date du 24 mai 2014 sans sanctionner le défaut de diligences de l’administration pendant dix-sept jours consécutifs. Le retenu faisait alors l’objet d’une décision de remise aux autorités autrichiennes saisies de sa demande d’asile.

En retenant que les dispositions de l’article L 554-1 du CESEDA « n’imposent à l’administration qu’une finalité de principe sans poser concrètement d’exigences de temps dans l’accomplissement des diligences », les juges du second degré se sont exposés à la censure de la Cour de Cassation.

Un étranger ne peut pourtant être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. La rétention est exclusivement destinée à permettre l’exécution des mesures d’éloignement et à assureur leur effectivité.

On ne cessera jamais de répéter, de réécrire et de redire qu’aucune mesure privative de liberté ne peut être ordonnée ou prolongée sans être dûment causée. La légalité d’une telle mesure est la garantie essentielle qui prime sur tous les autres droits et corollaires.

La nécessité de la mesure doit ainsi s’apprécier tout au long de l’exécution de la rétention administrative et non pas uniquement lors de la décision initiale.

Dans son analyse de la Loi relative à l’immigration, à l’intégration et à la nationalité, le Conseil Constitutionnel avait d’ailleurs clairement signifier que les dispositions prévoyant une prolongation de la rétention pour une durée maximale de quarante-cinq jours « ne modifient pas les dispositions précitées selon lesquelles l’étranger ne peut être maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ, l’administration devant exercer toute diligence à cet effet » et que « l’autorité judiciaire conserve la possibilité d’interrompre à tout moment la prolongation du maintien en rétention, de sa propre initiative ou à la demande de l’étranger, lorsque les circonstances de droit ou de fait le justifient « .

Conseil Constitutionnel 9 juin 2011 no 2011-631 DC

C’est ainsi que la seconde prolongation de l’article L 552-7 du CESEDA ne peut intervenir que :

– soit en cas d’urgence absolue ou de menace d’une particulière gravité pour l’ordre public,
– soit lorsque l’impossibilité d’exécuter la mesure d’éloignement résulte de la perte ou de la destruction des documents de voyage de l’intéressé, de la dissimulation par celui-ci de son identité ou de l’obstruction volontaire à son éloignement,
– soit lorsque, malgré les diligences de l’administration, la mesure d’éloignement n’a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l’intéressé ou de l’absence de moyens de transport et qu’il est établi par l’autorité administrative compétente que l’une ou l’autre de ces circonstances doit intervenir à bref délai,
– soit lorsque la délivrance des documents de voyage est intervenue trop tardivement pour pouvoir procéder à l’exécution de la mesure d’éloignement dans le délai initial de vingt jours

Il est acquis sans discussion que ces motifs sont limitatifs et strictement encadrés.

Cass Civ. 2ème 13 décembre 2001 Pourvoi n° 00-50061

Ceux-ci souffrent parfois d’une interprétation extensive. Tel est le cas de l’absence de présentation de documents de voyage par le retenu considérée selon les circonstances comme une perte ou comme une obstruction volontaire à l’éloignement.

En l’espèce, l’arrêt de la Cour d’Appel de Lyon se place dans la situation où la mesure d’éloignement n’a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat ou de l’absence de moyens de transport.

Cependant, le Préfet s’est affranchi de l’obligation de justifier de l’intervention à bref délai de ces circonstances.

En cela, le représentant de l’état a oublié que la prolongation relève d’une décision judiciaire et non d’une simple formalité administrative au regard de la finalité de la rétention administrative.

  • Des exigences de temps dans l’accomplissement des diligences :

Délier les diligences du préfet aux fins d’éloignement de l’impératif de temps relève d’une surprenante appréciation de l’article L 554-1 du CESEDA.

La durée stricte des quarante-cinq jours de rétention accompagne pourtant le « bref délai » précédemment évoqué.

Pour les juges de la Cour de Cassation, le préfet ne peut se heurter qu’à des obstacles temporaires pouvant être levés durant ces quarante-cinq jours.

L’incertitude et l’impuissance ne sont pas conciliables avec la privation de liberté consécutive à l’exécution d’une obligation de quitter le territoire français. Aussi le représentant de l’État ne peut-il placer en rétention un étranger que si son éloignement forcé demeure une perspective raisonnable.

Ce retournement de situation implique pour les services préfectoraux non seulement de rapporter la preuve de leurs diligences pour organiser le départ mais également de démontrer un recul sur l’activité des consulats ou l’accessibilité des transports.

Le Juge des Libertés et de la Détention ne peut donc plus se cacher derrière l’intervention éventuelle du Tribunal Administratif car c’est à lui, et à lui seul, qu’il incombe de rechercher « si les obstacles à l’exécution de la mesure d’éloignement » sont « susceptibles d’être surmontés à bref délai ».

Il ne fait dès lors qu’exercer les pouvoirs qui lui sont reconnus en décidant la remise en liberté de l’étranger lorsque le préfet n’a pas fait les diligences suffisantes pour obtenir du consulat les documents nécessaires à l’exécution de la mesure d’éloignement.

Cass. Civ. 2ème 23 mai 2001 Pourvoi no 00-50065

En l’espèce, l’administration avait attendu dix-sept jours avant de réitérer sa demande de pièces auprès du consulat étranger : elle se devait de justifier des diligences accomplies aux fins d’obtenir la délivrance de ces éléments et d’établir que ces documents lui parviendraient avant l’expiration du délai de quarante-cinq jours.

La Cour de Cassation ne précise pas cependant comment prouver que les démarches qui sont en cours auprès des autorités consulaires lesquelles procèdent à l’étude du dossier de l’intéressé vont aboutir.

Vraisemblance ou possibilité ? La part d’imprévu qui va déterminer la nécessité du maintien en rétention administrative ressort d’acteurs extérieurs aux préfectures et à leurs services. L’arrêt du 18 novembre 2015 a le mérite à contraindre l’État à respecter un principe de célérité.

Il ne saurait pourtant en résulter que l’indisponibilité d’un consulat ou bien encore l’absence notoire de réponse à toutes demandes suffisent à caractériser les obstacles à l’exécution de la mesure d’éloignement insusceptibles d’être surmontés durant le temps de la rétention.

Au regard de cette jurisprudence, il est indéniable que le contentieux de la rétention administrative s’inscrit dans la veine d’un renouvellement.

La dualité de compétence civile et administrative a déjà entrainé des ajustements de certaines notions comme ceux constatés en matière de voie de fait.

Au terme d’une décision du 17 juin 2013, ce principe juridique a été redéfini aux cas où l’administration soit a procédé à l’exécution forcée, dans des conditions irrégulières, d’une décision, même régulière, portant atteinte à la liberté individuelle ou aboutissant à l’extinction d’un droit de propriété, soit a pris une décision qui a les mêmes effets d’atteinte à la liberté individuelle ou d’extinction d’un droit de propriété et qui est manifestement insusceptible d’être rattachée à un pouvoir appartenant à l’autorité administrative.

Tribunal des Conflits 17 juin 2013 Pourvoi n°13-03911

La Cour de Cassation envoie le signal que chaque juridiction doit prendre sa compétence, chaque juge doit remplir son office dans le respect des règles de droit et des pouvoirs de contrôle que la loi lui octroie.

Dans l’attente de l’interprétation de la Cour de justice de l’union Européenne sur l’infraction d’entrée irrégulière

Depuis son entrée en vigueur le 13 janvier 2009, la directive dite « retour » 2008/115/CE du 16 décembre 2008 ne cesse de faire parler d’elle.

L’interprétation de ses dispositions est régulièrement à l’origine d’interrogations sur sa compatibilité avec le droit interne concernant les mesures d’éloignement des étrangers en situation irrégulière dans un pays de l’espace SCHENGEN.

C’est ainsi qu’en 2012, la Cour de Cassation avait admis que la directive s’opposait à une réglementation nationale réprimant le séjour irrégulier d’une peine d’emprisonnement.

Cass. Crim. Avis n° 9002 du 5 juin 2012
Cass. Civ 1ère 5 juillet 2012 Pourvoi n°11-30371
Cass. Civ 1ère 5 juillet 2012 Pourvoi n°11-19250
Cass. Civ 1ère 5 juillet 2012 Pourvoi n°11-30530

La Loi n°2012-1560 du 31 décembre 2012 avait pris acte de cette jurisprudence et écarté le placement en garde à vue des étrangers, auteurs présumés de l’infraction de séjour irrégulier au bénéfice de leur retenue pour vérification du droit au séjour.

A l’inverse, cette mesure coercitive demeurait applicable aux auteurs présumés de l’infraction d’entrée irrégulière et de maintien en séjour irrégulier.

Cette situation pourrait, cependant, prochainement évoluer à la suite de la saisine de la Cour de Justice de l’Union Européenne d’une question préjudicielle par la Cour de Cassation.

La Haute Cour a sursis à statuer dans l’attente de la réponse des juges européens.

En l’espèce, une ressortissante ghanéenne a fait été interpellée lors d’un contrôle à bord d’un autobus en provenance de Belgique et à destination du Royaume Uni alors qu’elle transitait par la France.

A l’issue de sa garde en vue pour entrée irrégulière, le Préfet du Pas de Calais lui avait notifié son placement en rétention administrative consécutif une décision de remise aux autorités belges pour réadmission.

Du Juge des Libertés et de la Détention, l’affaire s’est élevée jusqu’à la Cour de Cassation pour réclamer l’extension de l’application des jurisprudences El Dridi et Achughbabian à ceux qui y sont entrés irrégulièrement.

CJUE 28 avril 2011, El Dridi, C-61/PPU
CJUE 6 décembre 2011, Achughbabian, C-329/1

Au terme de ces décisions, il doit être rappelé que la directive « retour » doit être interprétée en ce sens qu’elle :

– s’oppose à une réglementation d’un État membre réprimant le séjour irrégulier par des sanctions pénales, pour autant que celle-ci permet l’emprisonnement d’un ressortissant d’un pays tiers qui, tout en séjournant irrégulièrement sur le territoire dudit État membre et n’étant pas disposé à quitter ce territoire volontairement, n’a pas été soumis aux mesures coercitives visées à l’article 8 de cette directive et n’a pas, en cas de placement en rétention en vue de la préparation et de la réalisation de son éloignement, vu expirer la durée maximale de cette rétention;

– ne s’oppose pas à une telle réglementation pour autant que celle-ci permet l’emprisonnement d’un ressortissant d’un pays tiers auquel la procédure de retour établie par ladite directive a été appliquée et qui séjourne irrégulièrement sur ledit territoire sans motif justifié de non-retour.

Or si la ressortissante ghanéenne originaire d’un pays tiers était entrée irrégulièrement sur le territoire, elle se retrouvait à séjourner de fait irrégulièrement en France.

De plus, elle n’avait ni été soumise aux mesures coercitives visées à l’article 8 de la directive « retour » et ni vu expirer la durée maximale de sa rétention administrative de 45 jours.

C’est donc légitimement qu’elle soutenait que la différence de traitement entre les étrangers auteurs présumés de l’infraction d’entrée irrégulière et ceux soupçonnés de séjour irrégulier s’expliquaient difficilement.

Dans le premier cas, les intéressés ne peuvent relever que du régime de la retenue pour vérification du droit au séjour alors que dans le second, ils peuvent être placés en garde à vue à l’issue de leur contrôle d’identité.

Cela s’explique par l’évolution législative du 31 décembre 2012.

L’article L 621-2 du CESEDA prévoit, en effet, que l’infraction d’entrée irrégulière est punie d’une peine d’emprisonnement d’un an permettant de recourir aux dispositions de l’article 62-2 du Code de Procédure Pénale.

L’article L 621-1 du CESEDA qui réprimait l’infraction de séjour irrégulier, a quant à lui été abrogé par La Loi no 2012-1560 précitée.

Au regard de ces considérations, la Cour de Cassation a donc décidé de renvoyer à la Cour de Justice de l’Union Européenne aux fins de répondre aux questions suivantes :

« 1) L’article 3 2 de la directive 2008/115/CE doit il être interprété en ce sens qu’un ressortissant d’un Etat tiers est en séjour irrégulier sur le territoire d’un Etat membre et relève, à ce titre, du champ d’application de cette directive, en vertu de son article 2, paragraphe 1, lorsque cet étranger se trouve dans une situation de simple transit, en tant que passager d’un autobus circulant sur le territoire de cet Etat membre, en provenance d’un autre Etat membre, faisant partie de l’espace Schengen, et à destination d’un État membre différent ?
2) L’article 6, paragraphe 3, de cette directive doit il être interprété en ce sens que cette dernière ne s’oppose pas à une réglementation nationale réprimant l’entrée irrégulière d’un ressortissant d’un État tiers d’une peine d’emprisonnement, lorsque l’étranger en cause est susceptible d’être repris par un autre État membre, en application d’un accord ou arrangement conclu avec ce dernier avant l’entrée en vigueur de la directive ?
3) Selon la réponse qui sera donnée à la question précédente, cette directive doit elle être interprétée en ce sens qu’elle s’oppose à une réglementation nationale réprimant l’entrée irrégulière d’un ressortissant d’un État tiers d’une peine d’emprisonnement, selon les mêmes conditions que celles posées par la Cour de justice de l’Union européenne dans l’arrêt du 6 décembre 2011, Achughbabian (C 329/11), en matière de séjour irrégulier, lesquelles tiennent à l’absence de soumission préalable de l’intéressé aux mesures coercitives visées à l’article 8 de la directive et à la durée de sa rétention ?« 

Cass. Civ. 1ère 28 janvier 2015 Pourvoi n°13-28349

La patience est de rigueur car l’interprétation des juges européens ne devrait pas intervenir avant plusieurs mois.

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  • Actualisation :

Après de longs mois d’attente, la Cour de Justice de l’Union Européenne a retenu au terme d’un arrêt du 7 juin 2016 que la  directive retour  s’oppose à ce qu’un ressortissant d’un pays non UE puisse, avant d’être soumis à la procédure de retour, être mis en prison au seul motif de  son entrée irrégulière sur le territoire d’un État membre via une frontière intérieure de l’espace Schengen.

Elle a ainsi motivé sa décision comme il suit :

« 1) L’article 2, paragraphe 1, et l’article 3, point 2, de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil, du 16 décembre 2008, relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier, doivent être interprétés en ce sens qu’un ressortissant d’un pays tiers se trouve en séjour irrégulier sur le territoire d’un État membre et relève, à ce titre, du champ d’application de cette directive, lorsque, sans remplir les conditions d’entrée, de séjour ou de résidence, il transite par cet État membre en tant que passager d’un autobus, en provenance d’un autre État membre, faisant partie de l’espace Schengen, et à destination d’un troisième État membre se trouvant en dehors de cet espace.

2) La directive 2008/115 doit être interprétée en ce sens qu’elle s’oppose à une réglementation d’un État membre permettant du seul fait de l’entrée irrégulière par une frontière intérieure, conduisant au séjour irrégulier, l’emprisonnement d’un ressortissant d’un pays tiers, pour lequel la procédure de retour établie par cette directive n’a pas encore été menée à son terme.

Cette interprétation est également valable lorsque le ressortissant concerné est susceptible d’être repris par un autre État membre, en application d’un accord ou d’un arrangement au sens de l’article 6, paragraphe 3, de ladite directive« .

CJUE Grande Chambre 17  juin 2016 Affaire C‑47/15

Le 9 novembre 2016, la Cour de Cassation a fait sienne cette appréciation :

« Attendu qu’en cas de flagrant délit, le placement en garde à vue n’est possible, en vertu des articles 63 et 67 du code de procédure pénale, qu’à l’occasion d’enquêtes sur les délits punis d’emprisonnement ; qu’il s’ensuit que le ressortissant d’un pays tiers, entré en France irrégulièrement, par une frontière intérieure à l’espace Schengen, qui n’encourt pas l’emprisonnement prévu à l’article L. 621-2, 2°, du CESEDA dès lors que la procédure de retour établie par la directive 2008/115/CE n’a pas encore été menée à son terme, ne peut être placé en garde à vue à l’occasion d’une procédure de flagrant délit diligentée du seul chef d’entrée irrégulière ;

Qu’en se déterminant comme il l’a fait, sans rechercher si la procédure de retour établie par la directive n°2008/115/CE avait été menée à son terme à l’égard de l’intéressée, le premier président a privé sa décision de base légale« .

Cass. Civ.1ère 9 novembre 2016 Pourvoi n°13-28349

Dès lors, tout placement en garde à vue pour des faits d’entrée irrégulière par une frontière intérieure à l’espace Schengen (hors mise en œuvre de la procédure de retour)est entaché d’illégalité.

Communiqué de presse CJUE