Le coût de la Justice

Le 02/10/11 (modifié le 18/03/2014)

Du 1er octobre 2011 au 31 décembre 2013, tout demandeur introduisant une instance en matière civile, commerciale, prud’homale, sociale ou rurale devant une juridiction judiciaire ou administrative était tenu au règlement d’une contribution de 35 euros.

Cette tarification fixe traduisait – s’il en était besoin- le manque indiscutable de moyens de la Justice en général et de l’aide juridique en particulier.

Depuis plusieurs années, le gouvernement cherche désespérément de nouvelles sources de financement autres que la solidarité nationale.

J’avais déjà évoqué dans ces pages la Loi n°2010-1657 du 29 décembre 2010 au travers du Décret n°2011-272 du 15 mars 2011 portant diverses dispositions en matière d’aide juridictionnelle et d’aide à l’intervention de l’avocat qui avait susciter le débat.

Le 29 juillet 2011, l’article 54 de la Loi de finances rectificative pour 2011 avait crée cette contribution : le décret n° 2011-1202 du 28 septembre 2011 relatif au droit affecté au fonds d’indemnisation de la profession d’avoué près les cours d’appel et à la contribution pour l’aide juridique en avait précisé les conditions d’exigibilité et d’application.

Cette réforme malmenait une fois encore l’effectivité du principe d’accès au droit pris en étau entre équité et pérennité.

La seule question qui se pose désormais pour les justiciables, est celle du coût de la Justice et de « l’égalité de tous les citoyens devant la loi sans distinction d’origine, de race ou de religion ».

Une contribution pour l’aide juridique : 

Il y a quatre ans, le rapport d’information établi au nom de la commission des finances par Monsieur Roland du LUART, sénateur de la Sarthe, mettait en évidence l’essoufflement du système de l’aide juridictionnelle.

Il soulignait le nombre croissant de ses bénéficiaires depuis sa création par la Loi n°91-647 du 10 juillet 1991 portant les admissions prononcées entre 1991 et 2006, de 348 587 à 904 532.

Malheureusement, les crises économiques contemporaines n’ont pas enraillés cette progression…

L’article 1635 bis Q du Code Général des Impôts instaure donc une contribution pour l’aide juridique de 35,00 euros aux fins de financement d’un système dont l’implosion était annoncée.

Mais cette taxe exigible à compter du 1er octobre 2011 ne s’adressait pas à tous les justiciables : seuls les demandeurs qui ont engagé une instance doivent s’en acquitter.

De plus, il existait trois types d’exception à son règlement, l’une tenant à la qualité des personnes demanderesses, l’autre à la juridiction saisie, la dernière à la nature des procédures initiées :

– La première catégorie dispensait de tout règlement l’État et les personnes bénéficiaires de l’aide juridictionnelle (au contraire des droits de plaidoirie ).

– La deuxième catégorie écartait l’exigibilité de la redevance eu égard à la juridiction saisie en excluant les instances engagées devant :

– la Commission d’Indemnisation des Victimes d’Infraction,

– le Juge des Enfants,

– le Juge des Libertés et de la Détention,

– le Juge des Tutelles.

– La troisième catégorie exonèrait le versement de cette taxe pour certains contentieux limitativement énumérés, à savoir :

– le traitement des situations de surendettement des particuliers et les procédures de redressement et de liquidation judiciaires,

– les recours introduits devant une juridiction administrative à l’encontre de toute décision individuelle relative à l’entrée, au séjour et à l’éloignement d’un étranger sur le territoire français ainsi qu’au droit d’asile ,

– le référé liberté devant une juridiction administrative,

– les procédures d’ordonnance de protection devant le Juge aux Affaires Familiales,

– les procédures d’omission et de radiation des listes électorales.

En dehors de ces cas, la contribution de 35 euros désormais disparue était due pour toutes les instances civiles, commerciales, prud’homales, sociales, rurales et administratives, en première instance comme en appel ou en cassation.

Toutefois lorsqu’une même instance donnait lieu à plusieurs procédures successives devant la même juridiction, elle n’était versée qu’au titre de la première des procédures intentées.

Pour s’assurer de l’acquittement de cette contribution, le Législateur avait même prévu une sanction impitoyable à l’origine d’une importante polémique.

L’article 62 du Code de Procédure Civile disposait ainsi :

« A peine d’irrecevabilité, les demandes initiales sont assujetties au paiement de la contribution pour l’aide juridique prévue par l’article 1635 bis Q du code général des impôts ».

L’article R 411-2 du Code de Justice Administrative précisait encore :

« Lorsque la contribution pour l’aide juridique prévue à l’article 1635 bis Q du code général des impôts est due et n’a pas été acquittée, la requête est irrecevable ».

Cependant, seul le juge pouvait relever cette irrecevabilité qui ne donnait pas nécessairement lieu à débat.

Le cas échéant, il invitait le demandeur à présenter ses observations écrites avant de statuer mais pouvait également rapporter sa décision en cas d’erreur et à la condition d’être saisie d’une requête dans un délai de 15 jours à compter de la notification.

On notera qu’en tout état de cause, les défendeurs ou intervenants à l’instance étaient purement et simplement écartés du processus décisionnel.

Peu importe les circonstances de l’espèce, le règlement de la contribution pour l’aide juridique prévalait sur le principe du contradictoire.

Cette fin de non-recevoir se distinguait donc parfaitement de l’absence de qualité et du défaut d’intérêt à agir dans un intérêt pécuniaire d’une bonne Justice.

 Sous l’égide du garde des sceaux, Christiane Taubira, la contribution a disparu : elle n’est plus due pour les instances engagées après le 1er janvier 2014.

L’existence des autres frais : 

Si la contribution pour l’aide juridique entrée en vigueur n’est plus d’actualité, elle ne constitue pas pour autant la seule participation due par les justiciables.

Il existe, encore, bien d’autres taxes, droits de procédure et frais d’enrôlement s’appliquant devant certaines juridictions.

Il convient de distinguer selon la nature du contentieux pour déterminer le coût de ces différentes contributions qui participent au financement de la Justice et de ses auxiliaires.

– En ce qui concerne les juridictions civiles et administratives, le principe qui s’applique aux actes de justice est celui de l’absence de droits.

L’article 1089 B du Code Général des Impôts dispose ainsi que « les actes des secrétariats des juridictions judiciaires et administratives ne sont pas soumis au droit d’enregistrement, ni à toute autre taxe».

Mais si la saisine est libre de taxes, les décisions des juridictions de l’ordre judiciaire peuvent donner lieu à des droits proportionnels ou progressifs, notamment devant le Tribunal de Grande Instance.

Il s’agit cependant d’une exception au sens de l’article 1089 A du Code Général des Impôts.

– Devant les juridictions pénales, l’opportunité des poursuites dévolue au Procureur de la République s’oppose aux droits d’enregistrement.

Seules les décisions répressives peuvent donc être créatrices de taxes prenant la forme d’un droit de procédure dû par chaque condamné, sauf pour les jugements sur intérêts civils.

Selon l’article 1018 A du Code Général des Impôt, ce droit fixe varie selon la décision rendue, à savoir :

– 22 euros pour les ordonnances pénales en matière contraventionnelle ou correctionnelle et les décisions des tribunaux de police et des juridictions de proximité,

– 90 euros pour les décisions des tribunaux correctionnels,

– 120 euros pour les décisions des Cours d’Appel statuant en matière correctionnelle et de police,

– 375 euros pour les décisions des Cours d’Assises.

Ainsi la qualification pénales des faits poursuivis qui détermine la juridiction compétente, aura nécessairement une incidence sur le montent du droit à régler en cas de condamnation.

– A l’inverse, les juridictions commerciales ne taxent pas les jugements qu’elles prononcent, ni les ordonnances qu’elles rendent.

Mais le fonctionnement spécifique des Tribunaux de Commerce donne lieu au règlement de droits d’enregistrement quelque soit le mode de saisine des juridictions.

L’équité impose cependant que les bénéficiaires de l’aide juridictionnelle soient dispensés de ces frais.

Pour les autres justiciables, les procédures déterminent les coût de l’enrôlement des actes introductifs d’instance oscillant de 83,48 euros pour une assignation au fond, à 49,89 euros pour assignation référé et 38,86 euros pour une injonction de payer.

Il sera précisé que le redressement et de la liquidation Judiciaire répondent à un tarif spécifique de 91,26 euros.

Ce système dérive de la délégation du service public de la justice confiés aux greffiers des tribunaux.

Ces officiers publics et ministériels sont des professionnels libéraux nommés par le garde des sceaux et encadrés par un statut défini au Code de Commerce.

A l’issue de ce balayage, les différentes taxes, droits de procédure et frais d’enrôlement évoqués semblent ne pas faciliter l’accès à la Justice et au contrôle du juge. 

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