Le 15/10/12
« Institution pluriséculaire où se reflètent traditions et pratiques religieuses, le mariage est traditionnellement défini comme un acte juridique solennel par lequel l’homme et la femme établissent une union dont la loi civile règle les conditions, les effets et la dissolution ».
Aux échos qui ont filtré sur la toile, tels seraient les mots d’introduction du projet de loi visant à ouvrir le mariage aux couples de personnes de même sexe.
La réforme envisagée sera présentée en chuchotement dans le feutré du conseil des ministres le 31 octobre prochain alors qu’au dehors bruissent « les frondeurs ».
En effet, des voix se font entendre parmi les maires de France pour s’opposer à la modification législative et refuser la célébration de mariages d’époux de même sexe.
Je n’ai pas été sans porter attention aux sonorités de cette actualité forte en dissonance et en canon qui interroge sur les fonctions du Maire.
Désigné pour un mandat de six ans renouvelable au suffrage universel direct, le maire est choisi par les habitants de la municipalité au sein de laquelle et pour laquelle il exerce ses fonctions.
Cet élu local a une double casquette défini par les dispositions législatives et règlementaires administratives, pénales et civiles.
Il est à la fois l’organe exécutif de la Commune et un agent de l’Etat.
– En effet, le Maire est un organe de décentralisation puisqu ‘il est placé à la tête d’une collectivité territoriale en qualité notamment d’exécutant des décisions du conseil municipal.
C’est ainsi que l’article L2122-21 du Code général des collectivités territoriales dispose :
« Sous le contrôle du conseil municipal et sous le contrôle administratif du représentant de l’Etat dans le département, le maire est chargé, d’une manière générale, d’exécuter les décisions du conseil municipal et, en particulier :
1° De conserver et d’administrer les propriétés de la commune et de faire, en conséquence, tous actes conservatoires de ses droits ;
2° De gérer les revenus, de surveiller les établissements communaux et la comptabilité communale ;
3° De préparer et proposer le budget et ordonnancer les dépenses, de les imputer en section d’investissement conformément à chacune des délibérations expresses de l’assemblée pour les dépenses d’équipement afférentes à des biens meubles ne figurant pas sur les listes et d’une valeur inférieure à un seuil fixé par arrêté des ministres en charge des finances et des collectivités locales ;
4° De diriger les travaux communaux ;
5° De pourvoir aux mesures relatives à la voirie communale ;
6° De souscrire les marchés, de passer les baux des biens et les adjudications des travaux communaux dans les formes établies par les lois et règlements ;
7° De passer dans les mêmes formes les actes de vente, échange, partage, acceptation de dons ou legs, acquisition, transaction, lorsque ces actes ont été autorisés conformément aux dispositions du présent code ;
8° De représenter la commune soit en demandant, soit en défendant ;
9° De prendre, à défaut des propriétaires ou des détenteurs du droit de chasse, à ce dûment invités, toutes les mesures nécessaires à la destruction des animaux nuisibles, de requérir, dans les conditions fixées à l’article L. 427-5 du code de l’environnement, les habitants avec armes et chiens propres à la chasse de ces animaux, à l’effet de détruire ces derniers, de surveiller et d’assurer l’exécution des mesures ci-dessus et d’en dresser procès-verbal.
10° De procéder aux enquêtes de recensement ».
– Cependant, le Maire est également agent de l’Etat placé sous l’autorité du préfet comme précisé par les dispositions de l’article L2122-27 du Code général des collectivités territoriales :
« Le maire est chargé, sous l’autorité du représentant de l’Etat dans le département :
1° De la publication et de l’exécution des lois et règlements ;
2° De l’exécution des mesures de sûreté générale ;
3° Des fonctions spéciales qui lui sont attribuées par les lois ».
Dans ce cadre, sa fonction lui donne qualité d’officier de police judiciaire placé sous le contrôle du Procureur de la République.
Selon l’article 14 du Code de Procédure Pénale, il a ainsi la charge « de constater les infractions à la loi pénale, d’en rassembler les preuves et d’en rechercher les auteurs tant qu’une information n’est pas ouverte».
Mais, sa qualité d’agent de l’Etat lui confère aussi le rôle d’officier d’état civil .
Et le noeud de la fronde se situe dans l’attribution qu’il a reçu des articles 63 et suivants du Code Civil de célébrer le mariage des couples après publication des bans.
Or, l’article L2122-34 du Code général des collectivités territoriales fait du maire un dissident « dans le cas où (..), il refuserait ou négligerait de faire un des actes qui lui sont prescrits par la loi ».
Pour autant, la Loi républicaine ne saurait rester inappliquée car le Préfet viendrait requérir l’agent municipal d’accomplir son office et, le cas échéant, se substituerait à lui.
Que dire alors du cacophonique concert sur le mariage qui est annoncé au sein des mairies de l’Hexagone ?
Il se joue sur un thème en pleine évolution, celui de la Famille telle que chacun la conçoit, la vit et la ressent.
En 1804, les quatre chefs d’orchestre du code civil, Tronchet, Bigot de Préameneu, Portalis et de Maleville avaient une vision du mariage qui était celle de leur époque.
Ils ont donc fait de cet acte, à la fois institution et contrat, celui qui permet d’unir par la Loi un homme et une femme pour vivre en commun et fonder une famille.
Deux cent ans plus tard, la musique a changé et les conceptions ont modifié la partition pour offrir à la société française un autre son sur :
– le couple lié par mariage ou non, homosexuel ou hétérosexuel,
– la filiation qu’elle soit biologique ou adoptive, naturelle ou médicalement assistée.
Et le Droit écrit les notes de la nouvelle musique que l’on fredonne …