Le 30/04/12
Le placement en rétention administrative d’un étranger en séjour irrégulier est une décision relevant de la compétence du représentant de l’Etat dans le Département, le Préfet.
En application de l’article L 551-2 du Code de l’Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d’Asile, cette décision « est prise par l’autorité administrative, après l’interpellation de l’étranger et, le cas échéant, à l’expiration de sa garde à vue, ou à l’issue de sa période d’incarcération en cas de détention ».
La privation de liberté et le transport au Centre de Rétention Administratif ressortent donc d’un arrêté préfectoral et non d’un acte judiciaire.
Dans un arrêt du 12 avril 2012, la Cour de Cassation a ainsi rappelé que le premier président d’une cour d’appel ne peut ordonner le placement en rétention administrative d’un étranger mais seulement prolonger une telle mesure.
Cass. Civ. 1ère 12 avril 2012 Pourvoi n° 11-11904
Cette jurisprudence est l’occasion d’évoquer le contentieux de la rétention administrative au travers de la compétence du juge civil et du juge administratif.
Le Tribunal Administratif, juge de la légalité du placement en rétention :
L’adoption de la Loi n°2011-672 du 16 juin 2011 a modifié l’ordre d’intervention des deux ordres juridictionnels pour donner la priorité au juge administratif.
Pour autant, la forme de sa saisine ainsi que sa compétence n’ont pas évoluées et demeurent déterminées par l’ article L 512-1 du Code de l’Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d’Asile :
« En cas de décision de placement en rétention ou d’assignation à résidence en application de l’article L. 561-2, l’étranger peut demander au président du tribunal administratif l’annulation de cette décision dans les quarante-huit heures suivant sa notification. Lorsque l’étranger a fait l’objet d’une obligation de quitter le territoire français, le même recours en annulation peut être également dirigé contre l’obligation de quitter le territoire français et contre la décision refusant un délai de départ volontaire, la décision mentionnant le pays de destination et la décision d’interdiction de retour sur le territoire français qui l’accompagnent le cas échéant, lorsque ces décisions sont notifiées avec la décision de placement en rétention ou d’assignation ».
Il appartient donc à l’étranger qui conteste l’arrêté pris à son encontre ordonnant son transport au Centre de Rétention Administrative, de saisir le juge par requête.
Ce recours juridictionnel tend à l’obtenir l’annulation de l’acte administratif assortie d’une remise en liberté immédiate.
Cependant, le contrôle du juge ne porte que sur la légalité de l’arrêté de placement et la nécessité de la rétention administrative.
Les conditions d’interpellation de l’étranger ou de placement en garde à vue ne relèvent pas de la compétence du Tribunal Administratif.
Aussi seuls les moyens fondés sur l’illégalité externe, l’illégalité interne et/ou la violation d’une convention internationale opposable à la FRANCE pourront être soulevés par l’étranger ou son conseil.
Le recours introduit dans un délai de 48 heures à compter de la notification de la décision de placement en rétention, donne lieu à une audience publique sans rapporteur publique dans le cadre spécifique d’une procédure orale.
Le Tribunal Administratif statue dans les 72 heures à compter de sa saisine par jugement susceptible d’un appel non suspensif d’exécution.
Le Juge des Libertés et de la Détention, gardien des libertés individuelles :
La compétence du juge civil varie par la nature de son contrôle qui porte sur la rétention administrative, sa mise en oeuvre de cette mesure et les conditions d’hébergement.
Son intervention se poursuit donc tout au long du séjour du retenu au Centre de Rétention Administrative jusqu’à sa sortie ou son retour.
Au contraire du juge administratif, le Juge des Libertés et de la Détention n’est, sauf exception, pas saisi d’un recours mais d’une simple requête à l’initiative du Préfet.
L’article L 552-1 du Code de l’Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d’Asile dispose ainsi :
« Quand un délai de cinq jours s’est écoulé depuis la décision de placement en rétention, le juge des libertés et de la détention est saisi aux fins de prolongation de la rétention ».
C’est à cette occasion que l’étranger pourra soumettre au gardien des libertés individuelles le contrôle de la légalité de la procédure pénale ayant précédé son transport au Centre de Rétention Administrative.
Tous les moyens d’irrecevabilité, de nullité ou d’ irrégularité pourront être soulevés pour s’opposer à la prolongation de la rétention pour un durée de vingt jours supplémentaires.
Si l’étranger bénéficie d’un passeport en cours de validité et de garanties de représentation effectives et suffisantes, il pourra solliciter son assignation à résidence dans l’attente de son retour.
A l’issue des débats tenus en audience publique, le Juge des Libertés et de la Détention statue dans les 24 heures à compter de sa saisine par ordonnance susceptible d’appel.
En cas de rejet de la requête en prolongation du Préfet, l’étranger est maintenu à la disposition durant 6 heures dans l’attente d’un éventuel appel du Procureur de la République.
Comme on l’aura compris, dans l’une ou l’autre des instances engagées, le litige oppose toujours le Préfet et au retenu.
Si le juge administratif peut annuler ou confirmer la décision de placement en rétention administrative, le juge civil ne peut qu’ordonner ou rejeter la prolongation de cette mesure.
Mais quel que soit le juge saisi, le Code de l’Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d’Asile prévoit dans ses articles L 512-1 et L 552-1 que l’étranger peut demander au Président de la juridiction de lui désigner un conseil d’office.