Ce qu’il faut savoir sur le Centre de Rétention Administrative

Le 16/10/11

Le jeudi 28 juillet 2011 , le Centre de Rétention Administrative de LYON SAINT EXUPERY a été ravagé par un incendie volontaire dans une certaine indifférence.

Méconnu, ce lieu privatif de liberté est un espace de vie pour les étrangers en situation irrégulière qui y sont retenus et un cadre de travail pour les policiers et personnels associatifs qui les encadrent.

Aujourd’hui, on compte 27 centres de rétention administrative en France métropolitaine et d’outre-mer énuméré à l’arrêté du 30 mars 2011.

Ces locaux « reçoivent, dans la limite de leur capacité d’accueil et sans considération de la compétence géographique du préfet ayant pris l’arrêté de placement en rétention, les étranger » en application de l’article du R. 551-2 du Code de l’Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d’Asile (CESEDA).

Je vous propose de découvrir ces centres au travers de leurs missions, de leurs conditions d’accueil et des garanties judiciaires qui protègent leurs résidents.

Quelles sont les conditions de placement au CRA ? 

Les Centres de Rétention Administrative regroupent des étrangers, hommes, femmes et enfants, qui se trouvent tous en situation irrégulière et sont destinés à être éloignés de la France.

Interpellés, contrôlés ou sortis de détention, ils font l’objet d’un arrêté de placement en rétention administrative pris à son encontre par le Préfet, représentant de l’Etat dans le Département.

Cette décision administrative est fondée sur une mesure d’éloignement de l’étranger qui ne peut être exécutée immédiatement et qui prend, selon l’article L 551-1 du CESEDA , les formes suivantes :

– procédure de remise à un État membre de l’Union Européenne,

– reconduite à la frontière en exécution d’une interdiction du territoire,

– signalement au SIS (Système d’Information Schengen) aux fins de non admission et «reconduite d’office Schengen»,

– mesure de reconduite à la frontière pour menace à l’ordre public,

– obligation de quitter le territoire français intervenue moins d’un an auparavant et pour laquelle le délai pour quitter volontairement le territoire est expiré,

– reconduite à la frontière d’office consécutive à une interdiction de retour.

La rétention administrative est donc motivée par l’impossibilité de quitter immédiatement le territoire français en exécution d’une mesure d’éloignement.

Selon les circonstances et l’origine du retenu, les raisons retardant le départ retardé sont variables.

Il peut s’agir de la délivrance tardive des documents de voyage par le consulat, de l’absence de moyens de transport, du temps nécessaire à la détermination de la nationalité de l’étranger ou de l’absence de garanties de représentation suffisantes

Durant l’attente, l’étranger est donc conduit au Centre de Rétention Administrative pour y demeurer durant le temps strictement nécessaire à l’organisation de son départ.

Il reste ainsi à la disposition du Préfet écartant sans risque de fuite jusqu’à son éloignement de la France.

Pour autant, il n’est privé que de sa liberté d’aller et de venir et peut communiquer avec l’extérieur dans le respect du règlement intérieur.

De plus, à son arrivée, le retenu reçoit notification des droits qu’il pourra exercer de manière effective, à savoir :

– exercice du droit d’asile formulée dans les cinq jours (Article L 551-3 du CESEDA)

– communication avec les autorités consulaires de son pays, son avocat ou toute autre personne de son choix (Article R 551-4 du CESEDA )

– consultation d’un médecin (Article R 553-8 du CESEDA ),

– assistance d’un interprète ou formulaires de traduction dans une langue qu’il comprend (Article R 553-11 du CESEDA ).

On l’aura compris les tolérances et les usages notamment en matière de détentions de téléphones mobiles varieront selon les Centres de Rétention Administrative.

Qu’est-ce qu’un CRA ? 

Comme il a été précisé, ces Centres sont destinés à accueillir les étrangers soumis à une procédure d’éloignement.

Les locaux placés sous la responsabilité du préfet territorialement compétent ne relèvent cependant pas de l’administration pénitentiaire et sont en principe, gérés, par la Police Aux Frontières.

En application de l’article R. 553-3 du CESDA, « Les centres de rétention administrative, dont la capacité d’accueil ne pourra pas dépasser 140 places, offrent aux étrangers retenus des équipements de type hôtelier et des prestations de restauration collective.

Ils répondent aux normes suivantes: 

1o Une surface utile minimum de 10 mètres carrés par retenu comprenant les chambres et les espaces librement accessibles aux heures ouvrables; 

2o Des chambres collectives non mixtes, contenant au maximum six personnes; 

3o Des équipements sanitaires, comprenant des lavabos, douches et w.-c., en libre accès et en nombre suffisant, soit un bloc sanitaire pour 10 retenus; 

4o Un téléphone en libre accès pour cinquante retenus; 

5o Des locaux et matériels nécessaires à la restauration conformes aux normes prévues par un arrêté conjoint du ministre de l’agriculture, du ministre de la défense, du ministre chargé de la santé et du ministre chargé des petites et moyennes entreprises, du commerce et de l’artisanat; 

6o Au-delà de quarante personnes retenues, une salle de loisirs et de détente distincte du réfectoire, dont la superficie est d’au moins 50 mètres carrés, majorée de 10 mètres carrés pour quinze retenus supplémentaires; 

7o Une ou plusieurs salles dotées d’équipement médical, réservées au service médical; 

8o Un local permettant de recevoir les visites des familles et des autorités consulaires; 

9o Le local mentionné à l’article R. 553-7, réservé aux avocats; 

10o Un local affecté à l’organisme mentionné à l’article R. 553-13; 

11o Un local, meublé et équipé d’un téléphone, affecté à l’association mentionnée au premier alinéa de l’article R. 553-14; 

12o Un espace de promenade à l’air libre; 

13o Un local à bagages. 

Les centres de rétention administrative susceptibles d’accueillir des familles disposent en outre de chambres spécialement équipées, et notamment de matériels de puériculture adaptés ».

Tout comme dans un établissement carcéral, le quotidien des retenus est réglé par un règlement intérieur organisant la circulation dans le centre et l’accès aux espaces à l’air libre.

Il appartient au chef de Centre, responsable de l’ordre et de la sécurité , d’en assurer le respect.

Ce dernier est également en charge de la tenue du registre mentionnant l’état civil des retenus et de leurs enfants mineurs ainsi que les conditions de leur placement ou de leur maintien visé à l’article L 553-1 du CESEDA.

Le maintien en rétention administrative qui constitue une mesure privative de liberté, a une durée limitée à quarante-cinq jours.

Durant ce séjour, « les étrangers sont hébergés et nourris à titre gratuit. Ils sont soignés gratuitement » comme le rappelle l’article R 553-12 du CESEDA.

Ils disposent alors de :

– un espace confidentiel permettant de s’entretenir avec leur avocat accessible en toutes circonstances sauf en cas de force majeure,

– une chambres collective non mixtes, accueillant au maximum six personnes,

– des équipements sanitaires en libre accès comprenant des lavabos, douches et wc,

– Un téléphone en libre accès,

– un local permettant de recevoir les visites: autorités consulaires, familles, médecins, membres d’associations,

– une pharmacie de secours.

Quel est le contrôle du juge sur la rétention ? 

Comme il a été précédemment rappelé, la rétention administrative porte une atteinte manifeste à la liberté individuelle.

Sa nature justifie donc l’intervention du Juge des Libertés et de la Détention tout au long du séjour du retenu.

Ainsi bien que le Préfet soit à l’origine du placement, il appartient au magistrat de l’ordre judiciaire de prolonger ou non cette mesure.

En effet, l’arrêté de rétention administrative limite le maintien au CRA à une durée initiale de 5 jours.

– C’est le Juge des Libertés et de la Détention saisi par le Préfet qui ordonne, le cas échéant, la prolongation de la mesure pour une durée de 20 jours supplémentaires en application de l’article L 552-1 du CESEDA.

Il procédera alors au contrôle :

– des conditions d’interpellation, de placement en garde à vue ou de rétention douanière,

– de l’effectivité des droits du retenu,

– et de la régularité de sa saisine par le Préfet.

– Si à l’expiration du délai de 20 jours l’étranger n’a pu être éloigné, le Juge des Libertés et de la Détention peut être amené à être saisi de nouveau pour se prononcer sur une éventuelle seconde prolongation.

Mais son pouvoir d’appréciation est limité au contrôle des conditions prévues à l’article L 552-7 du CESEDA.

Il existe alors deux situations différentes justifiant une prolongation de 20 jours supplémentaires:

– En cas d’urgence absolue ou de menace d’une particulière gravité pour l’ordre public, ou lorsque l’impossibilité d’exécuter la mesure d’éloignement résulte de la perte ou de la destruction des documents de voyage de l’intéressé, de la dissimulation par celui-ci de son identité ou de l’obstruction volontaire faite à son éloignement.

– Lorsque, malgré les diligences de l’administration, la mesure d’éloignement n’a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat ou de l’absence de moyens de transport et qu’il est établi par l’autorité administrative compétente que l’une ou l’autre de ces circonstances doit intervenir à bref délai ou lorsque la délivrance des documents de voyage est intervenue trop tardivement.

– En dehors des cas précités, le Juge des Libertés et de la Détention peut également être amené à être saisi par un retenu si des circonstances nouvelles de fait ou de droit justifient qu’il soit mis fin à la rétention.

Il peut également se saisir d’office ou à la demande du procureur de la République pour décider la mise en liberté de l’étranger lorsque les mêmes circonstances le justifient.

En tout état de cause, l’autorité administrative devra être mise en mesure de présenter ses observations.

– Enfin et surtout, l’article L 553-3 du CESEDA rappelle que le Juge des Libertés et de la Détention au même titre que le procureur de la République peut se transporter sur au CRA pour vérifier les conditions du maintien pendant toute la durée de la rétention.

Malgré son rôle de gardien des libertés individuelles, on aura compris que l’intervention du Juge des Libertés et de la Détention est limitée et bien tardive depuis l’entrée en vigueur de la Loi n° 2011-672 du 16 juin 2011 relative à l’immigration, à l’intégration et à la nationalité.

C’est désormais le Tribunal Administratif saisi du recours à l’encontre de l’arrêté de placement en rétention initiale qui statue en premier.

Sa compétence reste déterminée par le Centre de Rétention Administratif dans lequel l’étranger est retenu.