Le 22 octobre 2014, le Ministère de la Justice a dévoilé les chiffres essentiels de l’année écoulée sur l’activité des juridictions françaises et les moyens dont elles disposent.
Cette publication dresse le bilan annuel du fonctionnement de l’institution judiciaire à travers l’évolution du contentieux ainsi que le règlement des instances civiles, pénales et administratives.
Elle met en lumière le travail des 77 951 personnels de Justice et 76 131 auxiliaires de Justice hors associations qui interviennent au côté de justiciables.
Sans concession, ni abstraction, les chiffres clés de la justice – édition 2014 répondent et interrogent sur la célérité et la gestion judiciaire des litiges.
Les statistiques du Ministère sont ainsi l’occasion de battre en brèche de nombreuses idées reçues qui se rattachent à cette Justice tellement méconnue et si dépréciée.
– De la délinquance et du traitement des infractions :
C’est la Justice Pénale qui est d’abord passé au crible dans ce rapport.
L’activité des magistrats du parquet et leur traitement des infractions caractérisées y sont présentés en toute transparence à grand renfort de chiffres.
Ainsi, sur les 1 303 469 affaires poursuivables, il ressort que seules 135 996 se sont terminées en 2013 par un classement sans suite quels qu’en soit les motifs.
Le taux de réponse pénale du ministère public s’élève à 89,6 % pour la délinquance des majeurs contre 94,2 % pour celle des mineurs.
Celle donc la célérité et l’absence d’impunité qui prédominent en arrière plan de ce tableau de l’activité du parquet.
Le taux de récidive légale et réitération observé chez les condamnés sur une année est donc limité à moins de 6 %.
Mais, à y regarder de plus prêt, on peut voir également dans les données du Ministère de la Justice un indicateur de l’évolution des comportements délictueux.
En effet, sur les 17 766 affaires, crimes et délits confondus, dont les magistrats instructeurs ont été saisies en un an, les atteintes aux personnes représentent 45,02 % des mises en examen.
Pour autant, c’est dans le domaine de la circulation routière et transports que l’on retrouve le plus grand nombre de condamnations (253 312), soit 41,50 %.
La conduite automobile serait donc en France le premier facteur criminogène ainsi que le plus dangereux.
– De l’activité judiciaire et des contentieux les plus traités :
Les chiffres clés de la justice ne distinguent pas l’activité des tribunaux et juridictions civiles selon la géographie de la France.
Paris, Province ou DOM-TOM se retrouvent donc dans des données globales qui doivent être regardées selon la nature du contentieux.
Seuls les éléments concernant la justice administrative permet d’établir un classement local d’activités des Cours Administratives d’Appel – mais pas des Tribunaux Administratifs – plaçant Marseille devant Paris et Lyon.
En 2013, la justice civile a elle eu à connaître 2 761 554 affaires nouvelles toutes causes et toutes juridictions confondues.
Trois contentieux se démarquent particulièrement par leur importance et le recours au juge qu’ils nécessitent :
– le Droit de la Famille (417 561), soit 21,88 %,
– le Droit des personnes (402 695), soit 21,10 %,
– et le Droit de contrats (354 346), soit 18,57 %.
Mais en dehors des divorces, des tutelles et des baux, les relations de travail et la protection sociale sont aussi un des domaines de fortes activités judiciaires.
Le contentieux prud’homal est cependant le plus long en terme de traitement, la durée moyenne des affaires s’élevant à plus de 13 mois.
Il est également celui qui donne le plus lieu à contestation puisque 67 % des jugements rendus au fond ont été frappé d’appel en 2012.
Ces chiffres interrogent donc sur le fonctionnement de cette juridiction non professionnelle ainsi que sur son règlement des litiges dans un contentieux particulièrement sensible.
– De l’accès au droit et du règlement amiable des litiges :
Dans tous contentieux et tous domaines du droit, le justiciable bénéficie du droit d’ester en justice.
Au terme de sa décision du 25 juillet 1989, le Conseil Constitutionnel a consacré cette liberté fondamentale garantie par la Déclaration des Droits l’Homme et du Citoyen.
Conseil Constitutionnel 25 juillet 1989 – Décision N° 89-257 DC
Depuis plus de vingt ans, l’aide juridictionnelle est assurée par la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique.
Pour autant, l’admission au bénéfice de l’aide juridictionnelle ne cesse d’augmenter depuis plusieurs années, notamment au regard de la situation économique et de l’instabilité professionnelle.
Ainsi les données fournies par le Rapport de diagnostic de novembre 2013 portant sur la modernisation de l’action publique (MAP) et l’évaluation de la gestion de l’aide juridictionnelle relèvent que :
« En 2012, plus d’un million de justiciables ont bénéficié d’une attribution d’AJ. 25.000 avocats ont assuré au moins une mission à ce titre dans le cadre juridictionnel et 17.000 hors juridiction (ex : en garde à vue) ».
Les chiffres clés de la justice retiennent quant à eux un nombre de 919 625 admissions à l’aide juridictionnelle en 2013, soit une augmentation de 0,4 % par rapport à 2012.
On ne peut que rapprocher cette statistique que de celle des Caisses d’Allocations Familiales ayant versé le revenu de solidarité active à environs 2,30 millions foyers français en décembre 2013…
Si l’accès au droit est ainsi garanti, le constat de l’état de précarité inquiète et interroge sur sa mise en œuvre et le financement de l’aide juridictionnelle.
Mais au travers des pourcentages de l’activité et des moyens de la Justice, le rapport présente un chiffre rassurant.
Le taux de conciliation pour les conciliateurs de justice s’élève à 58,90 %, preuve que la dialogue peut permettre de résoudre les conflits en amont favorisant ainsi le règlement amiable des litiges et réduisant le recours traumatique au juge.
Cette justice qui n’est pas que contentieuse, demeure donc humaine.